« …Toutes ces réformes vont entrer en application dès le
premier octobre 1958 , et en attendant cette date , les fonctionnaires du
secrétariat d’état à l’éducation nationale s’attellent jours et nuits, malgré
les fortes chaleurs , comme ils l’avaient déjà fait depuis six
mois pour accomplir ce travail et
préparer les programmes sur lesquels repose l’avenir de cette nation… »
Extrait du discours du Président de la République du 25 juillet 1957 à l’occasion de la clôture
de l’année scolaire 1956/57
A l’occasion de la
rentrée scolaire 2016-2017, le blog pédagogique a voulu dresser un tableau
comparatif avec celle de l’année scolaire 1957-1958, c'est-à-dire la rentrée
qui correspond à la dernière rentrée avant la réforme de 1958, pour saisir le
chemin parcouru depuis, à travers quelques indicateurs .
1)
Premièrement : Les
indicateurs relatifs à la composition des élèves par genre et à la
scolarisation à la rentrée 1957/58
En 1957 – 1958 la population
scolaire en Tunisie était encore peu nombreuse, elle était essentiellement masculine, et les
taux de scolarisation étaient encore
très modestes,. En effet la population
scolaire, au cours de l’année scolaire 1957- 1958, ne comptait que 301 mille 433
élèves, constituée en grande majorité de garçons (environ 70%). Voir le graphique suivant :
![]() |
Composition des élèves par genre à la rentrée 1957-58 |
La situation en 2015-2016,
la population scolaire (secteur public) comptait presque deux
millions d’élèves (1.984.641), c'est-à-dire
qu’elle fut multipliée par 6.58 fois par rapport à la population
scolaire de 1957/58 , les filles représentent (50.95%)
, elles enregistrent ainsi une légère supériorité sur les garçons, il
faudrait remarquer que c’est là une caractéristique qui est partagée par plusieurs système éducatifs dans le monde .
|
Les statistiques de 1957 révèlent que le taux de scolarisation était encore faible ;
la moyenne se situait autour de 33%, mais on enregistrait de grands écarts à
tous les niveaux :
a.
Un
écart entre les garçons et les filles :
si presque 40% des garçons avaient rejoint les bancs des écoles, un peu plus du
cinquième des filles seulement avaient eu la chance d’aller à l’école.
![]() |
Taux de scolarisation général et par genre en 1957-58 |
la situation en 2015-2016 :
Le taux de scolarisation pour la classe d’âge 6-11 est
de 99.1% ( 99.5 chez les garçons et 99.2 chez les filles) ; pour la
classe d’âge 6 -16 ans, il est aussi élevé, atteignant 94.3% ( 93.1 chez les
garçons et 95.7 chez les filles).
Source : statistiques scolaire : l’éducation
en chiffres http://www.education.gov.tn/article_education/statistiques/stat2015_2016/Livret_StatAR.pdf
|
b. Un écart entre les gouvernorats qui montre déjà le clivage entre les régions côtières et les
régions intérieures.
![]() |
Taux de scolarisation par gouvernorat e 1957-58 |
c. Un écart à l’intérieur du même
gouvernorat
Gouvernorat
|
délégation
|
Taux de scolarisation
|
Médenine
|
Beni khadèch
|
7,8
|
Zarzis
|
48,5
|
|
Sousse
|
Souassi - Chorban
|
8,5
|
Mahdia
|
67,6
|
|
Gabès
|
El Hamma
|
11,1
|
El Mattouia
|
50
|
Deuxièmement : l’enseignement
primaire public
a. Les indicateurs généraux
1957- 1958
|
2015-2016
|
|
Nombre d’écoles
|
820
|
4.575
|
Nombre de classes
|
6.066
|
47.010
|
Nombre d’élèves
|
267.808
|
1.079.001
|
Nombre de maîtres
|
6.195
|
64.944
|
Commentaire :
A la rentrée 1957/58
les élèves qui fréquentaient l’enseignement primaire
représentaient l’écrasante majorité
de la population scolaire soit 88.84 %
de l’ensemble, à la rentrée de l’année précédente ( 2016-2016) , ils
ne sont plus que 54.36 %.
Entre
les deux rentrées, les statistiques montrent que l’effectif élève
du primaire s’est multiplié par 4, le nombre des écoles par 5.57,
celui des classes par 8 et enfin celui des enseignants par 10.48 fois.
|
b. Le corps enseignant en 1957- 1958
hommes
|
femmes
|
total
|
|
maîtres unilingues
d’arabe
|
3.123
|
36
|
3.159
|
maîtres bilingues
|
1.112
|
113
|
1.225
|
maîtres unilingue de
français
|
1.051
|
760
|
1.811
|
TOTAL
|
5.286
|
909
|
6.195
|
![]() |
Composition des instituteurs par genre en 1957-58 |
![]() |
Composition des instituteurs par langue en 1957-58 |
COMMENTAIRE
Le
tableau ci-dessus montre qu’au cours de l’année scolaire 1957/58 le pays faisait
appel à 6195 enseignants pour l’enseignement primaire dont 85.32 %
étaient des hommes et seulement 14.67
% de femmes, l’ensemble se répartissaient selon la langue en trois
catégories : 50.99%
instituteurs et institutrices unilingues d’arabe, 19.77% unilingues de français et 29.33
% bilingues, si on combine le genre et la langue d’enseignement , nous
constatons que 98.86 % des hommes étaient unilingues d’arabe et que
80.60% des femmes étaient unilingues de français , enfin 58.03 % des bilingues étaient des hommes.
|
Troisièmement : l’enseignement professionnel
L’enseignement
professionnel ou l’enseignement industriel (des industries) est très ancien en Tunisie, mais il est resté très limité, on comptait en 1958
dans tout le pays 52 établissements spécialisés dont 17 dans la ville de
Tunis, cet enseignement accueillait les élèves qui ont achevé leurs études primaires,
et durait 4 années, ce type d’enseignement sera remplacé par l’enseignement
moyen créé par la réforme de 1958.
Année scolaire
2015/2016
|
|
47
|
Nbre d’établissements (écoles professionnelles, centres de formation pour filles,
centres de formation pour garçons)
|
285
|
Nbre de classes
|
7003
3578
3425
|
Nbre élèves
Garçons
Filles
|
558
319
239
|
Nbre enseignants en 1958
Hommes
Femmes
|
Quatrièmement : l’enseignement secondaire public : un
enseignement à l’état embryonnaire
1)
Les lycées et les collèges (voir tableau ci-dessous)
1957- 1958
|
2015-2016
|
|
Nombre de lycées et de
collèges
|
11
|
1.409
|
Nombre de classes
|
287
|
34.969
|
Nombre total d’élèves
|
8.552
|
893.348
Garçons : 410.575
Filles : 482.824
|
élèves
garçons
|
6774
|
|
élèves
filles
|
1778
|
|
Nombre d’enseignants
|
405 (174 tunisiens et
231 étrangers)
|
75.056
|
![]() |
Composition des élèves de l'enseignement secondaire par genre en 1957-58 |
Commentaire
A la
rentrée 1957/58 , la Tunisie comptait 33625 élèves qui suivaient un enseignement post-primaire ce qui représente 11.15% de la population
scolaire, les élèves des collèges et des lycées (8.552) ne représentent que 25.40 % de la population scolaire post-primaire, ce
qui confirme le caractère embryonnaire de cet enseignement ; en comparaison avec la situation au cours de
l’année scolaire 2015/2016 , on constate que le nombre de lycées et de
collèges s’est multiplié par 128 fois , et que l’effectif élèves fut multiplié par
122 fois , celui des enseignants par 185 fois, d’autre part les données relatives à l’année scolaire 1957/58 montrent que le pays faisaient appel à un
grand nombre d’étrangers pour assurer les cours dans l’enseignement secondaire
, les professeurs étrangers représentaient à cette époque 57.03 % du corps
enseignant, aujourd’hui ce corps est entièrement tunisifié.
|
2)
Les cours complémentaires [1]
Au cours de l’année
57 – 58, on comptait 18 cours complémentaires comprenant 83 classes suivies par
2.105 élèves, dont 1 .720 garçons et seulement 385 jeunes filles.
3)
les
collèges zitouniens
En 1957-58, on comptait
28 établissements collèges zitouniens, avec 303 classes et 8.196 élèves, dont 7.874
garçons, et seulement 322 filles. Il faut préciser, qu’à partir du 1er
octobre 1958, cet enseignement va disparaitre suite à l’unification de
l’enseignement décidée par la loi de l’enseignement de 1958.
4)
Les écoles normales
Le pays comptait, au cours de l’année scolaire 1957-58, trois
écoles normales et trois sections normales dans les lycées et collèges ;
en tout, il y avait 28 classes fréquentées par 873 élèves, dont 731 garçons et
142 jeunes filles.
5)
L’enseignement technique (2ème degré)
L’enseignement
technique était assuré dans 5 établissements : deux écoles (l’école
normale d’apprentissage et l’école technique des cadres féminins), et trois
collèges techniques (Tunis, Sousse et Sfax) ; l’enseignement
technique comprenait 123 classes fréquentées par 3.660 élèves, dont 3.358
garçons et 302 jeunes filles.
En guise
de conclusion
Les indicateurs et les données statistiques que nous venons
de présenter se passent de tout
commentaire quant au chemin parcouru par la Tunisie dans le domaine de l’éducation, les réalisations dans ce domaine est une
fierté pour le pays, à ce propos l’historien Hédi Timoumi écrivait dans son
dernier ouvrage - l’enseignement de l’ignorance à l’ère de la
mondialisation et la réforme de l’éducation en Tunisie - : « … Dès son accession à l’indépendance
, le président Habib Bourguiba a commencé par unifié l’enseignement , et
décrété la gratuité et a entrepris sa modernisation et sa généralisation… l’école
tunisienne ( la loi de 1958) a contribuer à asseoir la modernité et à laïciser
beaucoup d’aspect de la vie du pays , elle a aussi consolider une identité
nationale progressiste et modérée et a permis de former des cadres qualifiés
pour le pays, enfin , l’école de 1958 a permis à un nombre important
d’enfants issus de milieux sociaux populaires une ascension sociale ,
l’enseignement est devenu en Tunisie une lueur de lumière et une des fierté de
la Tunisie, l’UNESCO a reconnu sa valeur » [2] p 15
Hédi Bouhouch& Mongi Akrout ,
Inspecteurs généraux de l’éducation retraités
Tunis , septembre 2016
[1] Les cours complémentaires
« sont des classes
d'enseignement primaire supérieur annexées à des écoles élémentaires et placées
sous la même direction (Décret du 18 janvier 1887 »
au début La durée du cours d'études dans les cours
complémentaires est d'un an ,puis elle est devenue 4 ans de
la sixième à la troisième , il est ouvert aux élèves ayant obtenus
le certificat d'études primaires élémentaires
sanctionné par le Certificat d'études primaires supérieures
[2] الهادي التيمومي :«تعليم
الجهل في عصر العولمة والإصلاح التربويّ بالبلاد ألتونسية دار النشر : محمد علي
الحامي
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