L'école primaire tunisienne vit depuis la rentrée 2022/2023 l'une des plus graves crises jamais connue, il s'agit de la grève des enseignants suppléants et des enseignants contractuels qui refusent de rejoindre les classes avant la régularisation de leur situation et la fin des formes d'emploi précaire. Le mouvement soutenu par la fédération générale de
l'enseignement de base est à sa 5ème semaine, les négociations
entamées avec les représentants du gouvernement n'ont pas abouti jusqu'à
maintenant. Il faut dire que le corps d'enseignants intérimaires
a toujours existé depuis la création de l'école "moderne" sous le protectorat, on y trouvait des suppléants, des intérimaires
et des stagiaires… Leur situation a depuis toujours préoccupé les autorités, le Blog pédagogique se propose
de publier une série de documents sur la question; et pour commencer voici
l'un des plus anciens textes qui évoque la titularisation des instituteurs et institutrices suppléants,
intérimaires ou stagiaires il s'agit
d'un décret beylical qui date de 1933. Le décret ouvre la voie à la titularisation pour
ceux-ci sous certaines conditions : Pour bénéficier de la titularisation, le concerné
doit: -
Avoir rempli des fonctions d'enseignement avant le
31 juillet 1932; -
Etre pourvu du brevet élémentaire de capacité[1],
le seul diplôme qui permet d'accéder au métier d'enseignant en France depuis
1886. -
Avoir enseigné comme suppléant, intérimaire ou
stagiaire durant au moins trois années consécutives dans une école
publique, le total du service effectué
doit être égal au moins à deux années scolaires. -
Etre resté à la disposition de l'administration de
l'instruction publique pendant les intervalles entre les suppléances
successives. -
Avoir fait
l'objet d'une inspection favorable au cours de ces années d'enseignement. Remarquons que sur les 5 conditions, trois ont un
rapport direct avec les compétences pédagogiques des candidats, il ne
s'agissait pas d'une titularisation automatique, d'ailleurs l'article 3
confirme ce souci de qualité et de compétence puisqu'il stipule qu'à
"partir du 1er octobre 1933, les stagiaires qui, après cinq ans de stage, ne
remplissent pas les conditions réglementaires pour être titularisés ne seront
pas reconduits. |
Décret du 8 mai 1933, relatif à la
titularisation des instituteurs et institutrices suppléants, intérimaires ou stagiaires
pourvus seulement du brevet élémentaire.
Louanges à Dieu
Nous, Ahmed Pacha-Bey, Possesseur du
Royaume de Tunis,
Vu notre
décret du 10 novembre 1926;
Vu les lois des 19 juillet 1889, -25
juillet 1893, 30 avril 1921 (article 69), 30 juin 1923 (article 1-2-3) et 30
décembre 1932;
Sur la proposition de Notre Directeur
général de l'Instruction publique et des Beaux-arts et la présentation de Notre
Premier Ministre,
Avons pris le décret suivant :
Article
premier — Les instituteurs et institutrices
suppléants, intérimaires ou stagiaires qui, pourvus du brevet élémentaire de
capacité[2], ont rempli des fonctions
d'enseignement avant le 31 juillet 1932, seront, à défaut de candidats pourvus
du brevet supérieur, titularisés, s'ils remplissent, outre les conditions
prévues par l'article 23 de la loi du 30 octobre 1886[3], les conditions suivantes
:
Avoir rempli comme suppléant, intérimaire ou stagiaire au cours d'au moins
trois années consécutives, des services d'enseignement dans une école publique
et dont le total sera égal au moins à deux années scolaires.
Etre resté à la disposition de l'administration de l'instruction publique
pendant les intervalles entre les suppléances successives.
Etre proposé par le chef du service de l'enseignement primaire à la suite
d'une inspection favorable au cours de ces années de suppléances.
Art. 2. — A partir du
1er octobre 1933, et sous réserve des prescriptions de l'arrêté
résidentiel du 2 janvier 1933, les candidats et les candidates pourvus du
brevet supérieur seront délégués dans les fonctions d'instituteur ou
d'institutrice stagiaire par priorité sur les candidats pourvus du
baccalauréat, du diplôme de fin d'études secondaires ou du diplôme
complémentaire d'enseignement secondaire.
« Aucun
instituteur ou institutrice intérimaire ou suppléant, pourvu du brevet
élémentaire de capacité, ne pourra, en dehors des instituteurs et
institutrices visés à l'article 1er, recevoir une délégation de stagiaire ».
Art. 3. — A partir du 1er octobre 1933, la
délégation sera retirée aux délégués stagiaires qui, après cinq ans de stage,
ne remplissent, pas les conditions réglementaires pour être titularisés.
Art. 4. — Notre Directeur générai de l'Instruction publique et des Beaux-arts est
chargé de l'exécution du présent décret, qui aura effet du 1er janvier 1933 en
ce qui concerne l'application de l'article 1er et le deuxième
paragraphe de l'article 2.
Vu pour promulgation et mise à exécution :
Tunis, le 8 mai 1933.
Le Ministre Plénipotentiaire, Résident
Général de la République Française, à Tunis,
F. MANCERON.
Présentation et commentaire Mongi
Akrout&Abdessalam Bouzid inspecteurs généraux de l'éducation.
Tunis, octobre 2022
Pour accéder à la version AR, cliquer ICI
[1] " Depuis 1816, une obligation nouvelle
s’impose à tout futur maître du primaire, celle de posséder un brevet de
capacité obtenu après le succès à un examen.... Les candidats et
candidates sont de plus en plus nombreux à s’y préparer, à l’école normale ou
dans d’autres établissements ; ils ambitionnent de conquérir le seul
diplôme qui ouvre aux carrières de l’enseignement primaire et certifie un
ensemble de savoirs constitutifs d’une culture primaire."
Daniel Toussaint, « Un examen pour les instituteurs : le
brevet de capacité de l’instruction primaire dans le département de la Somme
(1833-1880) », Histoire de l’éducation [En ligne],
94 | 2002, mis en ligne le 07 janvier 2009, consulté le 01
janvier 2021. URL :
http://journals.openedition.org/histoire-education/814 ; DOI :
https://doi.org/10.4000/histoire-education.814
"
Il existait deux
brevets de capacité pour l'enseignement primaire : le brevet
élémentaire et le brevet supérieur. Le premier est le seul titre requis pour
enseigner dans un établissement quelconque d'enseignement primaire public ou
privé.Le second confère aux maîtres et maîtresses qui en sont pourvus certains
privilèges, tels que l'accès aux deux premières classes de traitement, la
nomination aux fonctions d'adjoint ou d'adjointe dans les écoles primaires
supérieures et dans les écoles d'application annexées aux écoles normales, le
droit de se présenter aux examens supérieurs de l'enseignement primaire, etc.
http://www.inrp.fr/edition-electronique/lodel/dictionnaire-ferdinand-buisson/document.php?id=2218
[2] " Depuis 1816, une obligation nouvelle
s’impose à tout futur maître du primaire, celle de posséder un brevet de
capacité obtenu après le succès à un examen.... Les candidats et
candidates sont de plus en plus nombreux à s’y préparer, à l’école normale ou
dans d’autres établissements ; ils ambitionnent de conquérir le seul
diplôme qui ouvre aux carrières de l’enseignement primaire et certifie un
ensemble de savoirs constitutifs d’une culture primaire."
Daniel Toussaint, « Un examen pour les instituteurs : le
brevet de capacité de l’instruction primaire dans le département de la Somme
(1833-1880) », Histoire de l’éducation [En ligne],
94 | 2002, mis en ligne le 07 janvier 2009, consulté le 01
janvier 2021. URL :
http://journals.openedition.org/histoire-education/814 ; DOI :
https://doi.org/10.4000/histoire-education.814
"
Il existait deux
brevets de capacité pour l'enseignement primaire : le brevet élémentaire et
le brevet supérieur.
Le premier est le seul titre requis pour enseigner dans un établissement
quelconque d'enseignement primaire public ou privé. Le second confère aux
maîtres et maîtresses qui en sont pourvus certains privilèges, tels que l'accès
aux deux premières classes de traitement, la nomination aux fonctions d'adjoint
ou d'adjointe dans les écoles primaires supérieures et dans les écoles
d'application annexées aux écoles normales, le droit de se présenter aux
examens supérieurs de l'enseignement primaire, etc.
http://www.inrp.fr/edition-electronique/lodel/dictionnaire-ferdinand-buisson/document.php?id=2218
[3] L'article 23 de la loi du 30 octobre 1886- "Nul ne peut être nommé
instituteur titulaire s’il n’a fait un stage de deux ans au moins dans une
école publique ou privée, s’il n’est pourvu du certificat d’aptitude
pédagogique, et s’il n’a été porté sur la liste d’admissibilité aux fonctions
d’instituteur dressée par le conseil départemental, conformément à l’article
27. Le temps passé à l’école normale compte, pour l’accomplissement du stage,
aux élèves-maîtres à partir de dix huit ans, aux élèves-maîtresses à partir de
dix-sept ans ".
Bonjour, je travaille actuellement sur l'influence de l'UNESCO sur les politiques éducatives tunisiennes et j'ai rencontré des difficultés concernant la collecte des données. avez -vous des suggestions d'articles ou je pourrais trouver ce type d'informations? merci
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