Et lisant le communiqué publié par le ministère de
l'Éducation , le 17 mai 2013,sur son site officiel , au sujet des résultats de
la première phase du concours externe pour le recrutement des professeurs pour les
collèges et les lycées, pour l’année
scolaire (2013 – 2014), et en particulier sur les critères adoptés pour sélectionner les futurs
enseignant pour la deuxième année consécutive , on s’est posé des questions dont la principale était : est ce que les responsables politiques étaient conscients des conséquences de telles mesures sur le système
éducatif ?ont ils demandé l’avis des pédagogues avant d’opter pour ce mode de
recrutement ?
Première partie: Les
critères adoptés : Priorité à l'âge et à
l'ancienneté du diplôme universitaire.
Si nous analysons les critères prévus par le décret 833 - 2012 , nous constatons que l'ancienneté du
diplôme , avec 60 points et l'âge du candidat avec 40 points, sont les deux facteurs déterminants pour établir la liste des admissibles dans les limites de deux fois le nombre de
postes ouverts , pour chaque matière, ceux qui seront soumis à un test sous la forme d’un entretien devant une commission technique , l’entretien constitue la dernière étape du concours .
Or en dépit de l’importance de l’étape de l’entretien , celle ci ne changera pas les caractéristiques des futures
recrues , parce que la part consacrée à l’entretien , ne représente que 16,6% du total des points
, les résultats de l’entretien ne risque pas de modifier le classement final
d’une façon significative, et en particulier pour cinq spécialités : l’ arabe , l’éducation islamique ,la philosophie ,
l'histoire , la géographie et les mathématiques , où tous les admissibles ont
obtenu 100 points dans la première étape
, c'est à dire l'âge du plus jeune candidat admissible a dépassé
quarante ans, et l'ancienneté de leurs diplômes était
d’au moins 15 ans .
Cet état de fait pose plusieurs problèmes en rapport avec l’ancienneté
du diplôme et des nouveaux diplômés qui
se trouvent lésés par ce système.
Première problème :
l’ancienneté du diplôme
Pour les premiers classés dans les listes d’admissibilité,
l’ancienneté de l'obtention du diplôme,
varie entre les 27 ans pour les
sciences de la vie et de la terre (1986), et de 10 ans pour les derniers classés dans deux spécialistes l’allemand et la mécanique. (Tableau 1)
En ce qui concerne les derniers classés dans les listes d’admissibilité, l'ancienneté du diplôme, est
située entre 21 et 5 années. (Tableau 2) .
Cet état de fait pose le problème de l’homogénéité de la formation académique des nouvelles recrues et l’impact de cela sur plusieurs cohortes consécutives d'apprenants. , si nous
savons que les savoirs savants sont renouvelés, en totalité ou en partie, toutes
les décennies, on est en droit de se poser la question suivante : que pourraient donner des diplômés de 1986 à des élèves de 2013 ? Et comment veut on que les parents aient confiance en l'école publique ?
Deuxième
problème : l’âge moyen avancé des prochaines recrues
L’ âgé des premiers classés dans les listes des admissibles est compris entre 50 ans ( l' âge maximum de
candidature ) dans 6 spécialités qui
sont l'arabe , l’anglais , la philosophie , de l'éducation islamique et
l'éducation civique et la disposition ) et 34 ans dans deux disciplines : la construction mécanique et la langue allemande
.
Quand aux derniers classés
dans ces mêmes listes des admissibles,
l’âge varie de 49 ans(en philosophie et en éducation civique), et 34
ans pour l’allemand. (Voir le tableau 1)
Cela veut dire qu’une grande partie des nouvelles recrues auront
un âge assez avancé , ce qui constitue un handicap certain ,en effet les études ont montré que l’engagement dans le
métier d'enseignement à un âge précoce est parmi les facteurs qui aident à développer l’ identité
professionnelle et la réussite dans la carrière , car le jeune recrue à une plus grande capacité d’adaptation et d'inter-réaction avec les nouveautés dans le domaine des sciences de
l'éducation en comparaison avec les
moins jeunes .
Troisième problème :
le système est injustice vis-à-vis des nouveaux diplômés
Les critères adoptés lèsent les nouveaux diplômés en les forçant
à attendre leur tour pour de longues années, dans ce cadre on a noté que les listes
des admissibles ne comprennent pas les diplômés dont l'ancienneté est
inférieure à 10 ans dans neuf spécialités
sur les 22 spécialités ouvertes au concours.
Ces mesures ,si elles seront maintenues, entraîneront ,chez les nouveaux diplômés , une
déperdition de leurs savoirs académiques
et entameront leur motivation , sachant que le décret relatif à l’organisation du recrutement a
prévu la possibilité de concourir par la voie
d’épreuves , cette voie aurait pu permettre à certains nouveaux diplômés de réussir
et d’obtenir ainsi la possibilité de recrutement ,seulement cette voie
n’a pas été ouverte par l’arrêté d’ouverture du concours qui s’était limité a
ouvrir le concours sur dossier .
Deuxième partie : conséquences et retombées de cette option
1- Recrutement d’enseignants âgés, sans une validation de leurs
compétences académiques
Nous pensons que le concours , en cours, va aboutir au
recrutement d’enseignants âgés , avec
des diplômes qui remontent , beaucoup
d'entre eux , à plus de 15 ans en moyenne , ce qui pose la question de leur
aptitude scientifique
(surtout qu’un bon nombre parmi eux ont déjà participé aux concours d’aptitude au professorat de l'enseignement secondaire , et
n'ont pas été parmi les admis) , ceci
pose aussi des questions sur leur
capacité à réussir la tâche de l'enseignement ,surtout pour certains d’entre eux sont restés, pendant longtemps , loin des livres et
des études , tout en privant , les écoles, des nouveaux diplômés , même s’ils
ont été de brillants étudiants , parce que leurs scores les ont exclus , dés la première étape du concours . On pense
que cette façon de faire représente une
menace majeure pour l'avenir de l'éducation dans notre pays, pour de nombreuses
années.
2-
Une orientation à l’opposé de la tendance internationale dans le
domaine de la formation et le recrutement des enseignants
Toutes les études ont montré, que dans le domaine de l’éducation,
la qualité de tout système scolaire est étroitement liée à la qualité des cadres
enseignements , ce qui a poussé les
responsables des réformes scolaires, dans la plupart des
pays , à adopter des « critères très
stricts pour la sélection des enseignants..."[1] tout en
précisant que le recrutement ne peut pas
se faire " sur la base des compétences seulement, mais il doit tenir
compte du degré de motivation du
candidat pour l'exercice de la profession d’enseignant". La motivation
étant considérée comme une condition nécessaire pour réussir dans la profession.
La plupart des systèmes éducatifs au monde ( qui ont occupent les premières places dans les
évaluations internationales ( PISA) , recrutent les meilleurs compétences pour l’enseignement: «La
Corée du Sud , par exemple , recrute ses enseignants parmi les 5 ℅ meilleurs diplômés universitaires , quant à la
Finlande elle
choisit ses enseignants parmi les 10 ℅ meilleurs diplômés[2] , les candidats pré sélectionnés sont soumis à une
série de tests très sélectif (seul un candidat sur 6 sera retenu ) , avant de
rejoindre la faculté de l’éducation pour
recevoir une formation spécifique , qui les qualifie pour la profession
enseignante .
Conclusion
Ignorer le critère
de la compétence, et donner la priorité absolue à l'âge et à
l'ancienneté du diplôme universitaire, sans tenir compte des exigences de la
profession d’enseignant, à l’instar des autres professions, tels que les compétences
scientifiques et les savoirs faire professionnels, ne peut qu'aggraver d’avantage la crise l'école
publique tunisienne et que réduire sa capacité à répondre aux défis qui se
posent à notre système éducatif. Nous espérons que ce mode de recrutement ne
perdure pas et qu’une réflexion soit
entamée le plus vite au sujet de la formation des enseignants et leur
recrutement ; l’avenir de pays en dépend.
Tableau :1
Les derniers classés dans la liste des admissibles
|
Les premiers classés dans la liste des admissibles
|
|||||
spécialité
|
Ancienneté
du diplôme
|
Année
du diplôme
|
spécialité
|
Ancienneté
du diplôme
|
Année
du diplôme
|
|
Philosophie
|
21
|
1991
|
SVT
|
27
|
1986
|
|
Diplôme
le plus récent
|
Diplôme
le plus récent
|
|||||
Allemand
et construction mécanique
|
5
|
2008
|
Education
musicale
|
10
|
2003
|
|
Tableau : 2 – l’ancienneté des diplômes les plus récentes des candidats admissibles
pour passer l’entretien par spécialité
Ancienneté
en 2013
|
Année du diplôme
|
Les
spécialités
|
21
|
1992
|
Philosophie
|
18
|
1995
|
Education
religieuse et éducation civique
|
16
|
1997
|
Gestion
|
15
|
1998
|
Arabe/
Hist,Géo /Economie
|
13
|
2000
|
SVT
|
11
|
2002
|
Education
artistique
|
9
|
2004
|
Anglais/Sciences
Physiques /Informatique/Mathématiques
|
8
|
2005
|
Education
technique
|
7
|
2006
|
Français
/construction électrique/Espagnol
|
6
|
2005
|
Mécanique/Allemand/Italien
|
5
|
2008
|
Education musicale
|
3
|
2010
|
Education
théâtrale
|
Hédi Bouhouch et Mongi Akrout ; Tunis , Mai 2013
[1] Réflexions en vue d’un système éducatif plus performant pour tous les enfants- centre d’étude et de défense de l’école
publique http://www.cedep.be/downloads/Brochure_CEDEPdef_web_(2).pdf
[2] Policy paper the importance
of teaching: the schools white paper 2010 https://www.gov.uk/government/publications/the-importance-of-teaching-the-schools-white-paper-2010
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