Depuis plus d’une
semaine, le Gouvernement a publié, au Journal officiel de la République de Tunisie, le décret n° 2014-58 du 16 janvier 2014,
fixant le cadre général d'organisation des concours externes sur épreuves ,
organisés par le ministère de l'éducation, pour le recrutement des professeurs
des écoles primaires, des professeurs des collèges et des lycées, et des
professeurs du corps interdépartemental des enseignants de langue anglaise et
d'informatique.
En raison de
l’ importance de ce décret, nous avons voulu lui
consacrer ce billet, pour
présenter et commenter son contenu, et profiter de cette occasion
pour publier « le point de vue »,
que nous avions rédigé au mois de MAI
2013, et qu’on a consacré , alors , au-même sujet , à l'occasion de la
publication du ministère de l'éducation d’un
communiqué à propos des résultats de la
première phase du concours sur dossiers, pour le recrutement des
professeurs de l’enseignement secondaire .
Pourquoi nous disons que c’est un décret important ?
L'importance de ce
nouveau décret réside dans le fait qu'il rompt
avec les mécanismes exceptionnels
de recrutement qui ont été appliqué, durant les deux dernières années, et que nous avons
critiqué dans notre « point de vue » consacré à la question ;
ces mécanismes ont entrainé le recrutement des enseignants sur les critères de
l’âge et de l’ancienneté du diplôme ; le nouveau décret va rétablir le
principe du mérite et de l’égalité des chances entre les candidats .
Le rétablissement du recrutement par voie de concours
sur épreuves
Le nouveau décret rétablit le concours externe sur épreuves ;
celui-ci comprend deux parties :
§ une étape d'admissibilité, constituée d’une seule
épreuve sous la forme de questions à choix multiples (QCM). Les questions doivent porter sur les
connaissances fondamentales se rapportant aux programmes d'enseignement
officiels du :
1.
Cycle primaire pour le concours de recrutement des professeurs
des écoles primaires ;
2.
Cycle d'enseignement préparatoire et secondaire pour le concours
de recrutement des professeurs des collèges et des lycées et des professeurs du
corps interdépartemental des enseignements de langue anglaise et
d'informatique.
§ une étape d’admission ouverte aux candidats admis à
l’épreuve du QCM. Cette deuxième étape comprend deux épreuves :
1.
Une épreuve écrite
2.
Et une épreuve orale ou pratique ou un entretien avec les
membres du jury.
Quels enseignements peut-on tirer ?
Après cette brève présentation, on peut tirer un certain nombre
de points apportés par le nouveau décret, que voici :
1. En instituant le principe du concours sur épreuves en
deux étapes : une étape d’admissibilité et une étape d’admission finale, ce
système rappelle l’ancien concours d’aptitude au professorat de l’enseignement secondaire
(CAPES), suspendu pendant plus de deux ans et il met fin au mode de recrutement
institué par la loi 4-2012 portant
dispositions dérogatoires pour le recrutement dans le secteur public.
2. Ce décret met
en avant une procédure plus équitable et juste, car elle respecte le principe
de l'égalité des chances.
3. Ce mode de recrutement devrait permettre de sélectionner
les meilleurs.
D’ailleurs,
le communiqué[1]
du ministère de l’Education, publié le 26 janvier 2014, insiste bien sur tous
ces aspects en évoquant :
·
les principes d’objectivité, d’équité, de transparence,
d’égalité des chances, de mérite, de compétence ;
·
le droit de l’établissement scolaire en particulier, et la
société en général de recruter des enseignants dotés de savoirs et de compétences fondamentaux.
Toutefois, nous pensons que ce décret, en dépit de
son importance et des apports positifs, ne résout pas la question de la
formation des enseignants et même celui du
recrutement d’enseignants hautement qualifiés surtout que les statuts des
enseignants prévoient plusieurs voies de recrutement, comme par exemple ce
qu’on trouve :
·
Au niveau du recrutement des professeurs des collèges et des
lycées leur statut [2] ;
et surtout son article 19 (nouveau), stipule que le recrutement se fait par la voie de concours externes sur épreuves ou sur
titres ou sur dossiers.
·
Et aussi au niveau du recrutement des enseignants des écoles primaires,
leur statut[3],
a maintenu, pour les instituteurs, le mode de recrutement en vigueur[4] (nomination
directe des instituteurs parmi les
détenteurs du baccalauréat) et pour les professeurs des écoles primaires,
il prévoit le recrutement par voie de concours externes sur épreuves ou sur
titres ou sur dossiers ouvert aux candidats titulaires de diplôme
national de licence ou de la maîtrise.
Ce qui pourrait crée une certaine ambigüité, car tout
compte fait on ne sait pas quel mode de recrutement va adopter le
ministère : est ce par voie de concours sur épreuves uniquement ? Ou
par concours sur épreuves et sur
dossiers ?ou par nomination directe les instituteurs? Le communiqué évoqué
plus haut lève en partie cette ambigüité, en attendant la parution de l’arrête
d’organisation et celui de ‘ouverture des concours.
Conclusion
Le recrutements des enseignants , dans notre pays ,
souffre depuis plusieurs années de deux choses: d'abord , de la multiplicité de ses voies , légalisées par les
textes régissant les différents statuts
des enseignants , et d'autre part , l'absence d’une
formation initiale spécifique préparant
aux métiers de l’enseignement sur la
base d’un référentiel qui
fixe les compétences scientifiques , pédagogiques et professionnelles.
Et tant que les portes restent ouvertes devant de multiples voies de recrutement , et tant que
la question de la formation
initiale des enseignants n’est pas
tranchée, le problème du
recrutement d’enseignants hautement qualifiés et qui croient à leur mission ,restera posé .
Il est urgent que les pouvoirs publics accordent à
cette question toute l’attention qu’elle
nécessite afin de chercher, avec la participation des différents acteurs de l’école. Il s’agit d’une urgence ; l’enjeu, c’est
l’avenir de l’école publique tunisienne.
[1]
http://www.echos.education.gov.tn/2014-01-27/avis26012014.pdf
[2] Décret 666- 2013 du 29 Janvier 2013, modifiant et
complétant le décret 73-114 du 17 mars 1973, portant statut particulier des personnels enseignants des
établissements d'enseignement secondaire général du ministère de l'éducation nationale
[3] Le décret n° 2013-2225 du 3 juin 2013
[4] Ce mode de recrutement est maintenu jusqu’en 2015
A juger par les résultats, les différentes façons de recrutements soit par voie de concours écrit et pratique soit par un recrutement directe sous ses différentes formes semblent inefficaces et ouvrent la voie à un grand nombre de candidats qui ne peuvent acquérir la qualité d'enseignants même après des années de formation et de pratiques . le résultat il est là: un produit final de l'école tunisienne très médiocre sinon catastrophique ces dernières années.Certes on ne peut pas imputer tout à la qualité des enseignants(surtout ces derniers venus car il y a tout le système éducatif avec toutes ses composantes qu'il faut revoir et cela suppose une nouvelle réforme qui doit être bien réfléchie en impliquant toutes les parties et compétences du domaine . le moment venu il faudra revoir également ce problème éternel du recrutement et le résoudre un peu plus en amont c.a.d. pendant la formation de base des futurs enseignants . Mais en attendant ces jours meilleurs je crois qu'actuellement il faut opter pour une solution qui tiendrait en compte ce qu'il y a de positif dans chacune des méthodes citées et essayer de faire une sélection poussée (avec des commissions intransigeantes) qui mettrait en priorité la compétence scientifique puis pédagogique puis l’équité..Mais l'essentiel c'est le suivi et la formation adéquate pour ces enseignants .Car c'est très beau l'équité dans l'absolu mais elle ne doit pas passer au détriment de la qualité et au dépend des générations futures .
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