lundi 26 mai 2014

La fraude à l’examen du baccalauréat

Chaque année, à l’approche de la session du baccalauréat, plusieurs journaux de la place cherchent à connaitre les préparatifs du ministère de l’éducation, pour contrecarrer les tentatives de fraudes au cours du passage du plus important examen national. Quelle est la réalité de ce phénomène en Tunisie en comparaison avec ce qui se passe sous d’autres cieux ?


Partie : Présentation du phénomène
1.    La fraude est une vieille pratique qui tend à s’amplifier.
Cheikh Tahar Ben Achour a évoqué la question dans son ouvrage :«  l’aube n’est-il pas pour bientôt[1] ?», sans utiliser le terme de fraude ; il parle de dysfonctionnements   au cours des examens  de la mosquée Az zaituna ,et a énumère les types de fraudes de l’époque  et leurs causes, telle que « l’inefficacité  des surveillants  et leur manque de vigilance  qui s’expliquent par le fait qu’on chargeait de la surveillance  des personnes non qualifiés , comme les  agents de la bibliothèque  ou du censorat de la mosquée ou  des agents de Dar Al Sharia ;  ceux-ci ne réussissent  pas à s’apercevoir des techniques utilisées par les étudiants pour s’échanger des informations » ;il cite d’autres causes  comme l’utilisation d’un nombre insuffisant de surveillants :« on trouve 5 à 6 surveillants pour 100 candidats », et les espaces  exigus et inappropriés pour les examens,  où   «  les candidats sont entassés , en désordre » . p 241   
Ce témoignage montre que la fraude est un phénomène ancien  qui a évolué depuis ces temps , se répandant parmi les élèves et les étudiants à tous les  niveaux de l'enseignement, devenant une pratique courante et banale  à l’occasion des examens au cours de l’année scolaire ;  ce comportement s’est étendu  pour  toucher les examens nationaux , et en particulier l'examen du baccalauréat .
Au cours de la session 2012 du baccalauréat tunisien, 539 cas de fraude ont été traités par les commissions compétentes[2] ; ce qui représente 0,40 % des candidats. Le phénomène reste limité dans notre pays , en comparaison à  avec  l’Algérie ( 3180 dans le cas  au cours de la session de 2013 , soit 0,84 % ) , mais il est  très élevé par rapport à la France , avec un taux de  0,05 % au cours de la session de 2010 .
Les cas de fraude au baccalauréat tunisien connaissent  une hausse régulière ;  ils ont été multipliés par plus de deux fois et demi , en moins de 20 ans, passant de 141 cas , ce qui représentait 1,61 cas  pour 1000 candidats  milieu des années quatre-vingt dix  du siècle dernier , à 539 cas[3] au cours de la session  de 2012 , soit  4,52 cas  pour 1000 candidats - Annexe1-  .
Cependant, il nous semble que ce nombre ne reflète pas la réalité de la triche à l'examen du baccalauréat ; il ne correspond qu’aux cas qui ont été découverts et sanctionnés. Nous n’avons pas de données sur les cas qui ont été traduits devant les commissions, sans suite, par manque de preuves.  Mais, surtout nous ne savons  rien sur le nombre de fraudeurs qui ont réussi à déjouer la vigilance des surveillants (avec ou sans complaisance ou complicité) ; car de nombreux  anciens élèves affirment que la fraude est une pratique très répandue parmi les candidats à l'examen du baccalauréat, qui s’est traduite par l’apparition,  ces dernières années, d’une terminologie spécifique,  comme le terme " IFASKI " , c'est-à-dire utiliser une fausse copie préparée  à l’avance, ou encore le terme de « YKAYET », c'est-à-dire s’équiper d’un kit qui permet de communiquer avec un complice à l’extérieur de la salle d’examen; d’ailleurs les cas évoqués par la presse  à l’occasion de la session  2013 ne sont qu’une confirmation de l’ampleur du fléau .
2.    Le fléau touche toutes les catégories de candidats et toutes les disciplines.
Les fraudeurs n’appartiennent pas à une catégorie particulière ; on les trouve aussi bien  parmi les élèves qui ont de bonnes moyennes au cours de l’année scolaire, que parmi les moins bons ; mais la majorité des fraudeurs appartiennent  à la deuxième catégorie ;  ceux-ci cherchent à surmonter leurs handicaps  dans une ou plusieurs disciplines par la fraude ; d’autre part, les candidats  provenant des  écoles privées représentent plus de la moitié des  cas de fraudes ( 236  sur 539 cas en 2012  alors  qu’ils représentaient moins  du tiers des candidats) ( voir tableau ci-dessous) .
Tableau : évolution des cas de fraudes et de mauvaises conduites par types d’enseignement.
candidats
publics
Privés
Individuels
total
1996
61
72
8
141
2012
288
236
15
539

3.    La fraude : une pratique répandue dans tous les systèmes scolaires
La fraude à l'examen est un fléau universel qui accompagne l’examen, partout où il se trouve ; il n’épargne aucun système éducatif :
En France , le ministère de l’Éducation a enregistré au cours de la session du baccalauréat 2011, 272 cas de fraudes pour 600 000 candidats, soit 0,05 % ; ce chiffre était de 219 au cours de la session 2010, soit de 0,04 %.
Les résultats d’une recherche[4]  publiée en 2009 indiquent que 70,5 % des élèves ont pratiqué la fraude au cours de leur scolarité.
Ces conclusions expliquent, peut-être, la campagne lancée par l'ancien ministre[5] français de l’Education, le 7 Juin 2013, contre la fraude à l'examen du baccalauréat, quelques jours avant la date des épreuves.
En Angleterre,[6] la pratique de la fraude n’est pas moins répandue qu’ailleurs : en 2009, " 4500 tentatives de fraudes ont été enregistrées à l’examen du certificat général de l'enseignement secondaire (l’équivalent de notre diplôme de fin de l’enseignement de base) et dans les tests du niveau - 1 - (l’équivalent de l'examen du baccalauréat).
Au Maroc, un magazine écrivait en Juillet 2004 à propos de la triche aux examens ceci : " La triche est pour certains devenue un "droit". La triche est considérée par beaucoup d’étudiants marocains comme "un droit". Un phénomène inquiétant qui peut s’avérer dangereux pour des surveillants ou des enseignants trop zélés. Toutes les matières, et en particulier l’histoire, la géographie et la philosophie, sont touchées. " [7] .
Après un répit  au cours de  l’année 2008 - qui a enregistré  une baisse de la fraude selon le ministre de l'éducation , le nombre de cas de fraude est passé de 1350 à 504 au cours d’une seule année- la situation s’est aggravée  de nouveau et la fraude est considérée comme le mal de l’école ; la session 2011 - 2012 a enregistré 2480 cas de fraude, ,  dont près de la moitié à la  session de rattrapage ( équivalent de notre session de contrôle) ; à l’occasion de la dernière session, le 13 Juin 2013, le ministre marocain de l'éducation[8] a parlé " de bandes qui organisent  la fuite  des examens du baccalauréat."
En Algérie, la question de la fraude a fait les éditoriaux de la presse, au cours de la session 2013 ; un journal titrait « la fraude empoisonne le baccalauréat "  6, après la découverte d’un cas de fraude collective impliquant 10.000 candidats dans l’épreuve de philosophie ; ce cas a provoqué des protestations des candidats et de leurs parents. Le nombre de cas de fraudes confirmées s’éleva en fin à 3180 selon le directeur de l'office national des examens et des concours.[9]
5 – les différentes techniques de la fraude
Les techniques de fraude sont très nombreuses ; elles ont évolué d'une année à l'autre,  et d'une génération à l'autre ; un chercheur [10] a  pu dénombrer plus de 20 méthodes ou techniques ; on y trouve les vielles techniques et aussi les plus sophistiquées :
a.     les techniques anciennes , telles que l'utilisation de documents préparés à l'avance pour tricher , le candidat l’amène avec lui  dans la salle d'examen , ou le copiage direct  de la réponse du voisin ou  encore , prétextant un besoin urgent, certains candidats  ramènent   des réponses déposées par un complice selon un scénario préparé à l’avance , ou enfin l'entrée d’un faux candidat à la place du vrai candidat , après  un accord préalable et la falsification de carte d'identité.
Cheikh Mohamed Tahar Ben Achour a rapporté dans son livre,  déjà cité, certaines de ces techniques, «... et l'échange des réponses entre les candidats, ou l’utilisation de dissertations  préparées et amenées par les candidats  ... ou   encore la pratique  qui consistait à ce qu’un candidat quitte la salle d’examen  après avoir pris connaissance du sujet – puis il se met à  lire à  haute voix   «les  questions et  les réponses .. . »,  pour en informer les autres candidats restés dans la salle (p. 241-242).
b.           Les nouvelles techniques : la nouvelle génération de fraudeurs a mobilisé les nouvelles  technologies, pour mettre au point de nouvelles techniques de fraudes, en utilisant les Smartphones, et calculatrices programmables, les écouteurs … Des sites sur le web  se sont spécialisés dans ce domaine, et proposent  des équipements pour frauder.
 Au cours de la session 2012, les cas de fraude à l'aide du téléphone mobile au baccalauréat tunisien avaient représenté la moitié des cas enregistrés (277 sur un total de 539 cas de fraude). En France, 166 cas sur les 419 ont utilisé des technologies modernes (Smartphone, i Phone - MP 3 – casque…)

2° partie : la lutte conte le fléau de la fraude
Tous les systèmes éducatifs ont tenté d’endiguer le phénomène de la triche dans les examens, en tant que   comportement malsain et une menace pour le système éducatif.
 Ces systèmes ont mis en place une législation pour sanctionner les fraudeurs, et ont conçu de nombreux moyens de prévention. Mais, tout cela  n’a pas réussi à éradiquer le mal, ni même à le réduire ;  au contraire, dans la plupart des pays le phénomène s’est aggravé puisqu’il s’accompagne de violences et d’agressions à l’encontre  des surveillants et de l’administration qui cherchent à contrecarrer les tentatives de fraude.
1.  Les législations et les lois anti- fraudes
Pour lutter contre la triche, plusieurs pays ont promulgué des lois et ont mis en place un ensemble de sanctions de plus en plus sévères. Nous allons présenter quelques exemples, à titre indicatif.
a.  En Tunisie
L’arrêté du ministre de l'Éducation et de la Formation, en date du 24 Avril 2008 relatif au régime du baccalauréat a consacré l’article 19 à la question de la fraude, précisant les procédures à suivre en cas de fraude, et fixant les différentes sanctions qu’encourent les fraudeurs. - annexe 2 -
Pour les sanctions, l’article en question a assimilé la fraude aux tentatives de fraude, et à la mauvaise conduite, et il n’a pas fait de différence entre l'auteur principal de la fraude et ses complices. Les sanctions administratives et pénales peuvent être prononcées à l’encontre des responsables du centre de des surveillants.
L’arrêté, sus cité,  a confié  la mission   de statuer  sur les différentes  irrégularités à  « des jurys chargés d’enquête », sans préciser leur composition, ni l’autorité qui est chargée de les nommer[11] ;  ces jurys jouissent de larges prérogatives , ainsi ils  peuvent décréter la nullité de  l'examen s’ils jugent qu’il y a fraude ou tentative de fraude ou mauvaise conduite caractérisée, la nullité de  l’examen pour  les deux sessions, si l’infraction a eu lieu au cours de la session principale ;   la nullité  est prononcée à l’encontre de l’auteur principal et de ses complices éventuels ; en plus de cette sanction, les jury peuvent  proposer également  au ministre de l’éducation  de décider l’interdiction de  participation à l'examen , pour une période comprise entre un et cinq ans .
Les décisions de la nullité prononcées par la commission des fraudes sont définitives et prennent effet immédiatement ; elles sont sans appel et ne peuvent pas être   contestées.
 Cet aspect est l’un des points  négatifs de cette procédure ; Il  ne reste aux candidats sanctionnés d’interdiction de participer aux examens que deux  recours possibles : celui de déposer une plainte  devant le tribunal administratif, ou de présenter une  demande  de réduction de la sanction  au ministre de l'éducation ( cette deuxième  possibilité pratiquée souvent n’est pas prévue par le texte ) .
En comparant les sanctions qui étaient prévues par l’arrêté de 1981 et celles prévues par l’arrêté de 2008 - annexe 3 - on constate que ces dernières sont moins sévères, puisqu’elles ont supprimé la sanction la plus lourde qui prévoyait « l’exclusion définitive de tous les lycées et des institutions universitaires », en plus de l’interdiction de participer aux examens du baccalauréat, c'est-à-dire le candidat sanctionné n’a plus d’avenir dans l’enseignement en Tunisie.
Quant à la décision de la nullité de l’examen, si elle n’est pas accompagnée d’une interdiction de participer aux prochaines sessions,   elle ne peut pas être considérée comme une pénalisation par certains candidats qui n’ont rien à perdre, car ils n’avaient aucune chance de réussir leurs examens sans la triche.
b.                          Au Maroc
Devant le développement du phénomène, et les agressions  perpétrées sur les enseignants surveillants, le gouvernement marocain promulgua, au mois de Juin 2013, une nouvelle loi plus rigoureuse, pour lutter contre la fraude aux examens du baccalauréat ; cette loi prévoit l’interdiction de se présenter à l’examen pour une période de deux années académiques consécutives[12] ,"et même des sanctions pénales ; le ministère a pris, en outre,  des mesures préventives,  telles que l’interdiction d'utilisation de matériels  électroniques sophistiqués  par les candidats .
c- En France
La France a été l'un des premiers pays  à légiférer pour lutter contre  la fraude aux  examens ; la première loi remonte au  début du siècle dernier (loi  23 du 23 Décembre  1901)[13] laquelle a  prévu  une  peine de prison pouvant aller jusqu'à trois ans d’emprisonnement , et une amende de 10 000 francs  pour les auteurs de la fraude .
En 2012, fut promulgué le décret n° 2012-640 du 3 mai 2012 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux candidats au baccalauréat ; ce décret a défini entre autre :
-                     la composition de la commission chargée de statuer sur des cas de fraude (présidé par un professeur d’université et comprenant six membres dont un élève et un étudiant),
-                    et les différentes sanctions , lesquelles ont un caractère  progressif, commençant par  le blâme avec inscription au livret scolaire, la privation de toute mention au baccalauréat, l’interdiction de subir tout examen conduisant à l’obtention du baccalauréat ou d’un titre ou diplôme délivré par un établissement public dispensant des formations post-baccalauréat pour une durée maximum de cinq ans, l’interdiction de prendre toute inscription dans un établissement public dispensant des formations post-baccalauréat pour une durée maximum de cinq ans.
 L’usurpation d’identité (une personne prend la place du véritable candidat) est punie d’une peine de prison.
Le 7 Juin 2013, un nouveau décret donne à la commission chargée de statuer sur des cas de fraude de nouveaux pouvoirs qui lui permettent de retirer le certificat ou le diplôme, si la fraude est découverte après l'annonce des résultats.
 Ainsi, la législation française est très différente de la législation tunisienne ; en effet :
- elle prévoit la représentation des élèves et des étudiants dans la Commission de fraudes
 -  le niveau de la législation est au rang de loi  
 - la commission prend tout son temps avant de statuer puisque ses réunions n’auront lieu qu’au mois de septembre, en présence des intéressés.
 - toute fraude confirmée sera sanctionnée par un zéro dans l’épreuve concernée , mais elle n'empêche pas le candidat d’obtenir son diplôme mais sans la mention  .
Toutes ces lois et ces dispositions n’ont pas réussi à dissuader les étudiants qui ont l'intention de tricher ; la pratique de la fraude n’a pas cessé de s’amplifier, ce qui explique le recours des responsables aux mesures préventives pour réduire la fraude.
4.    Les mesures préventives
Devant le développement des techniques de fraude, de nombreux pays , comme la France , la Chine et la Tunisie , ont interdit l'introduction des téléphones mobiles et autres appareils dans les centres d’examens ; les candidats qui ne respecteraient pas cette consigne  feront l’objet  de sanctions . Les centres d'examen ont aussi utilisé la technique de brouillage et des détecteurs de téléphones mobiles ; en Angleterre, les autorités ont pensé à installer des caméras de surveillance dans les salles d’examens.
Nous terminons cette revue, en fournissant trois expériences originales de lutte contre la fraude :
- la première nous vient d’un pays africain, la cote d’Ivoire، qui a conçu une méthode unique qui consiste à recruter des surveillants  qui se présentent à l’examen comme de faux candidats, pour pouvoir entrer dans les salles ; à la fin de l'examen ,  ces faux candidats remettront leur rapport couvrant la gestion du centre et le comportement des candidats et des surveillants.
 - la deuxième expérience nous vient  d’un pays de l'Europe du Nord , le Danemark , où les autorités ont décidé de couper l'herbe sous les pieds des  tricheurs , en permettant l'utilisation d 'Internet , au cours de l'examen , à titre expérimental, en adoptant  une « évaluation basée sur la réflexion et la recherche et l'utilisation de l'information dans le bon contexte »,  et en prenant certaines précautions  comme l’impossibilité pour le candidat  d’utiliser l’e -mail ; l'expérience, lancée en 2010 dans certains établissements, avait concerné 1300 candidats ; en  2011,  elle fut généralisée  à tous les établissements touchant  6.000 étudiants.[14]
- la troisième expérience nous vient de la Chine, où les autorités éducatives ont  embauché des agents de police pour surveiller les candidats, en plus de l'utilisation de dispositifs de surveillance et de brouilleurs de communication et des détecteurs de métaux .
Troisième partie : les causes de la fraude
Les causes de la fraude aux examens sont multiples et variées ; certaines sont en rapport avec les conditions matérielles et humaines du déroulement des épreuves ; d’autres sont en rapport avec le candidat lui même.
1.    Défaillance au niveau de l’organisation
a.        La mauvaise organisation aide à la fraude, et offre de nombreuses possibilités pour les étudiants qui ont l'intention d'utiliser des moyens illégaux pour obtenir les meilleurs résultats à l’examen. Les procès-verbaux des fraudes et les rapports des visites d'inspection dans les centres d’écrit montrent que la triche est, dans plusieurs cas, le résultat d’une négligence et de la mauvaise application des consignes à l’organisation des examens et à la surveillance, tels que :
-         le fait de permettre aux candidats de garder leurs documents dans les salles de l’examen, alors que les consignes insistent sur l’obligation de retirer tous les documents, avant le démarrage des épreuves.
-         l’absence de rigueur lors de la vérification des identités des candidats,   ce qui a permis à des personnes de passer l’examen à la place d’autres.
-         la négligence au niveau de la surveillance. (l’emplacement des surveillants dans les salles ; leur déplacement, leur vigilance…)
b.    Le comportement de certains directeurs de centres et de certains surveillants :
 Dans certains cas de fraude, l’enquête a montré l’implication des chefs de centres et des surveillants de la fraude, soit :
-         Directement, en facilitant  la fraude ( passer  les réponses aux candidats ) , afin d’enregistrer des taux de réussite élevés  dans les institutions qu'ils supervisent , pour des raisons professionnelles ou financières[15] ; en 2012, un scandale a éclaté dans la ville d'Atlanta aux États-Unis, suite à la découverte d'une fraude à grande échelle qui a touché la moitié des écoles, et dans laquelle sont impliqués des  directeurs  et des enseignants  qui ont donné aux élèves les bonnes réponses , afin de maintenir la subvention  financière annuelle  accordée  par les autorités à chaque école, en fonction des résultats de ses élèves dans l’évaluation nationale ; l’affaire a entraîné le licenciement de 178 directeurs  et professeurs, et la  nomination  d’un nouveau directeur de l’éducation. En septembre 2013 le journal Londonien «  The Guardian[16] » rapporte les faits concernant une affaire similaire dans une école au sud de Londres.
-         Indirectement, en raison de leur ignorance du règlement concernant la fraude, et les mesures à prendre dans de tels cas,  ce qui encourage les candidats à poursuivre la triche.
2.    Les raisons particulières de l’élève
Le comportement des élèves est généralement un comportement similaire dans les différents systèmes éducatifs. Ainsi, les diverses études qui ont porté sur la fraude dans les examens ont cité les mêmes motifs chez les fraudeurs, parmi lesquels on peut citer :  
-La mauvaise préparation à l’examen, la peur de l’échec, l’anxiété et la peur des réactions de la famille en cas d’échec.
-Le désir de réussir et d’exceller par tous les moyens dans un cadre de concurrence malsaine,
-L’incapacité de mémoriser ses cours et le sentiment d'infériorité et le doute,
-La paresse et l’impact de la culture de la fraude[17]    : certains élèves se vantent d’avoir réussi à frauder ( le considérant  comme un exploit et un acte  de bravoure) et le dénigrent  l’élève laborieux et respectueux des règles.
-L'effet de la dépendance : l'élève habitué, depuis les premières années, à la triche, peut difficilement s’en passer en classe terminale, malgré tous les risques.  

Hédi Bouhouch et Mongi Akrout ; Inspecteurs généraux de l’éducation
Tunis, Juillet 2013

Articles sur la question


Lutte contre la triche : comment les autres pays s’en sortent?



Notes précédentes sur le baccalauréat tunisien



- Annexe1- Evolution des cas de fraudes et de tentatives de fraudes et de mauvaises conduites
Nbr/1000
Nombre
Session
1,61
141
1996
2,87
238
2008
2,55
439
2009
3,35
447
2010
4,29
539
2012


 ( session 2013) Les cas de fraude et de mauvaise conduite  selon les sections
sport
Sc inf
Sc tech
Ec- ges
Sc exp
Math
lettres
Section
4
54
72
186
58
43
328
Nbr de cas

- Annexe2- Article  19 de l’arrêté du 24 avril 2008  relatif au régime du baccalauréat
Toute fraude ou tentative de fraude ou mauvaise conduite à l’examen du baccalauréat seront sanctionnées selon les modalités suivantes :

  1. fraude ou tentatives de fraude ou mauvaise conduite constatées dans les centres des épreuves pratiques ou écrites :

a) les jurys chargés d’enquête portant sur les cas de fraude ou de mauvaise conduite, délibèrent, pour chaque cas, sur la base d’un dossier comportant les pièces suivantes :
- les rapports des deux surveillants,
- le rapport du président du centre d’examen et du vice président le cas échéant
- les questionnaires adressés aux candidats concernés,
- les documents saisis, relatifs au cas de fraude et au manifestation de mauvaise conduite le cas échéant,
- ainsi que tous les documents et pièces susceptibles de permettre aux jurys de prendre les décisions adéquates,
b) les jurys chargés d’enquête portant sur les cas de fraude ou de mauvaise conduite déterminent s’il y a eu fraude caractérisée ou tentative de fraude ou mauvaise conduite,

c) dans tous les cas, les jurys prononcent la nullité de l’examen, pour les deux sessions, à l’encontre de l’auteur principal de la fraude ou la tentative de fraude, à l’encontre de l’auteur de la mauvaise conduite et à l’encontre de leurs complices,

d) outre la prononciation de la nullité de l’examen, les jurys chargés de l’enquête portant sur les cas de fraude ou de la mauvaise conduite peuvent proposer au ministre de l’éducation et de la formation, après appréciation des circonstances et du degré de gravité de la fraude ou de la mauvaise conduite, de prendre la sanction d’interdire aux candidats concernés de s’inscrire à l’examen et leur exclusion des établissements éducatifs publics pour une période allant de un à cinq ans.

Les jurys peuvent également proposer d’engager une enquête administrative afin de délimiter les responsabilités dans les cas examinés.

  1. cas de fraude ou de mauvaise conduite constatés lors de la correction :

Si un professeur s’aperçoit, en corrigeant les copies, que certaines d’entre elles se ressemblent impliquant une présomption de fraude, ou de conduite des propos sans rapport avec le sujet de l’examen et touchant à la personne du professeur-correcteur ou au système éducatif d’une façon générale, il sera appelé à rédiger un rapport où il explicite les raisons de ses soupçons et à le remettre au président de la commission de correction. Ce dernier chargera un deuxième professeur de corriger de nouveau les copies douteuses.
Le président du centre de correction établit un dossier comportant :
- le rapport du premier professeur-correcteur,
- le rapport du deuxième professeur-correcteur,
- le rapport du président de la commission de correction,
- ainsi que tous les documents et pièces susceptibles de permettre aux jurys de prendre les décisions adéquates.
Les jurys chargés d’enquête portant sur le cas de fraude ou de mauvaise conduite seront appelés à délibérer sur ces cas, à la lumière de ce dossier enrichi par les questionnaires des candidats concernés et des surveillants le cas échéant, ils détermineront s’il y a eu ou non fraude, et il sera de même pour les cas de mauvaise conduite. Dans l’affirmative, la nullité de l’examen est prononcée à l’encontre des candidats reconnus coupables. Les jurys peuvent proposer une des sanctions prévues à l’article 19 du présent arrêté.

Les cas de fraude ou tentative de fraude et de mauvaise conduite feront l’objet de procès-verbaux
Source : Journal Officiel de République Tunisienne, 25 avril 2008, N° 34, Page 1326

- Annexe 3 – Evolution des sanctions selon les arrêtés de 1981 et 2008 
Arrêté du 24 avril 2008
Arrêté du 16 avril 1981
Ajout de l’infraction de mauvais conduite (introduite depuis l’amendement  du 31 mars 1998)
Les sanctions prévues en plus de l’annulation de l’examen :
l’interdiction de s’inscrire à l’examen et L’exclusion des établissements scolaires publics    pour une période allant de un à cinq ans.
Évoque l’infraction de fraudes et  de tentatives de fraudes
Les sanctions prévues en plus de l’annulation de l’examen :
1-     Le blâme
2-     l’interdiction de s’inscrire à l’examen pendant une année ou plus.
     3- L’exclusion des établissements scolaires publics et privées   l’interdiction de s’inscrire à l’examen pendant pour une période allant de un à cinq ans.
    4-L’exclusion définitive des établissements scolaires  et universitaires  cette sanction entraine l’interdiction de s’inscrire aux  examens










[1] Mohamed Tahir ben Achour , «  Alaysa Assoubhou Biqarib.  l’aube n’est il pas pour bientôt ?» l’enseignement arabo musulman , étude historique et idées réformistes,  STAG, 2° édition- 1988 ( texte en arabe)
Mohamed Tahar Ben Achour, né en septembre 1879 à Tunis et décédé le 12 août 1973 à La Marsa, est un professeur et recteur de l'Université Az zaitouna.
[2]  L’article 19 de l’arrêté du 24 avril 2008 relatif à l’organisation du baccalauréat  stipule que « les les jurys chargés d’enquête portant sur les cas de fraude ou de mauvaise conduite, délibèrent, pour chaque cas, s’ils confirment la faute ; ils  prononcent la nullité de l’examen, pour les deux sessions, à l’encontre de l’auteur principal de la faute et à l’encontre de leurs complices, ils  peuvent proposer au ministre de l’éducation et de la formation, après appréciation des circonstances et du degré de gravité de la faute de prendre la sanction d’interdire aux candidats concernés de s’inscrire à l’examen pour une période allant de un à cinq ans »
[3]  http://www.kapitalis.com/societe/10716-tunisie-le-taux-de-reussite-au-baccalaureat-2012-atteint-4974.html.
[4] De Tarlé Sophie,  L’Éducation nationale face à la triche : un réveil difficile ; http://www.letudiant.fr/bac/triche-au-bac-et-aux-examens-quels-risques-12268.html  consulté le 10/06/2013    
[5]  Peillon,V ; ancien ministre de l’éducation dans le gouvernement de F .Hollande  2013 – 2014
[6] http://www.letudiant.fr/bac/triche-au-bac-et-aux-examens-quels-risques-12268/triche-aux-examens-quel-pays-est-le-plus-severe-10039.html
[7] Les examens et la fraude au Maroc ; L’Economiste ; 20 Juillet 2004 < http://www.afrik.com/article7474.html
[9] B ;Malika ;Un bac empoisonné par la triche ; le journal  Liberté.
http://www.liberte-algerie.com/actualite/un-bac-empoisonne-par-la-triche-le-ministere-de-l-education-annonce-3-180-cas-averes-de-fraude-202896
[10] Arafet, F, le phénomène de la fraude : causes, techniques et moyens de le traiter ; WWW.alnoor.se
[11] ces jurys  siègent dans les centres de ramassage et de distribution ; ils sont présidés par les   présidents du centre  qui font partie du corps de l’inspection pédagogique ; chaque jury est composé de 4 membres , l’assistant du président du centre ,un inspecteur administratif et deux directeurs de lycée ;  généralement, les jurys finalisent leur mission avant la proclamation des résultats .
[13] Lelievre. Claude ;Le Bac : Histoire d’un bicentenaire ; Le café pédagogique ;avril 2012 ; http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/2012/bb2012_27.aspx
[14] Bertereau ,virginie ; Lutte contre la triche : comment les autres pays s’en sortent ,2011
http://www.letudiant.fr/bac/triche-au-bac-et-aux-examens-quels-risques-12268/triche-aux-examens-quel-pays-est-le-plus-severe-10039.html

[17] Pour d’autres élèves, la fraude est le chemin le plus court pour réussir. C’est aussi la conséquence "naturelle" d’un programme trop chargé et du parcoeurisme. Ils assurent qu’environ 80% parmi eux trichent. ""Pourquoi je gaspillerais mon temps à apprendre quand je peux réussir à moindre effort, en trichant. De toute façon, bien formés ou pas, nous sommes tous "des futurs chômeurs"", affirme un lycéen. Les élèves dénoncent également le laxisme de certains surveillants. Ces derniers ferment les yeux. "Pourquoi je passerais des nuits blanches lorsque d’autres réussissent en trichant au vu et au su des surveillants ?" s’insurge un jeune garçon.
Les examens et la fraude au Maroc ; L’Economiste ; 20 Juillet 2004  



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