lundi 2 mai 2016

L’évaluation nationale des acquis des élèves : WATHEQ


Le 28 avril 2016, le centre national d'innovation pédagogique et de recherches en éducation (CNIPRE) a organisé, en collaboration avec la direction générale des programmes et de la formation continue, une évaluation nationale des acquis des élèves sur le modèle de la célèbre évaluation internationale organisée tous les trois ans par l’OCDE,   connue sous l’appellation de PISA[1] .
Le blog pédagogique a voulu lui consacrer la note de cette semaine pour présenter cette louable initiative.



Pourquoi cette évaluation ?
L’école tunisienne a, depuis le début des années 2000, et surtout avec La loi d’orientation  relative à l'éducation et à l'enseignement scolaire,  n°80 -2002, en date du 23 juillet 2002,  a cherché à instituer la culture de l’évaluation,  en lui consacrant, pour la première fois dans l’histoire de l’école tunisienne, un chapitre entier ( chapitre VII); l’article  60 de la loi  stipule  ceci : « Sont organisées périodiquement, au niveau national, des évaluations qui concernent un échantillon d'élèves de différents niveaux d'enseignement. Ces évaluations ont pour objectif de vérifier le degré d'atteinte des objectifs fixés relativement à la qualité des apprentissages réalisés et à la valeur des acquis de l'élève. »[2]
Mais à notre connaissance, ce mécanisme ne fut mis en application qu’une seule fois, au milieu des années 2000[3] ; puis il est tombé dans les oubliettes, comme plusieurs autres mesures ; l’initiative du Cnipre est une tentative de le faire revivre, par l’organisation d’une évaluation nationale des acquis des élèves, dans le but de :
§  « Constituer une base de données objectives sur le rendement du système éducatif qui va aider les décideurs à prendre les mesures adéquates pour l’améliorer.»
§  Et « d’exploiter les critères internationaux pour permettre aux enseignants et aux formateurs de mettre en place un système d’évaluation national conforme aux normes internationales ».
§  « Contribuer à développer une nouvelle culture de l’évaluation chez tous les acteurs du système éducatif. » [4]
WATHEQ, c’est quoi ?

En réalité, les concepteurs de cette évaluation, (le département des Etudes Prospectives et Comparées), ont choisi de suivre le modèle de Pisa dans toutes ses composantes (choix des domaines à évaluer, le mode d’échantillonnage, la nature des tests, le type de présentation, le mode de passation des tests …) ; c’est ainsi que WATHEQ :

§  A choisi d’évaluer les  compétences des élèves  dans trois domaines qui sont : 1- la compréhension de l’écrit, 2- la culture mathématique, - la culture scientifique, suivant le modèle de PISA 
§  L’évaluation comporte 60 questions (20 par domaine) que les élèves devraient réaliser en 2 heures trente minutes (50 mn par domaine).

 

Qui est concerné par l’évaluation ?

 

La population ciblée par l’évaluation est constituée par les élèves âgés de 15 ans, indépendamment du niveau scolaire. échantillon est choisi selon le mode d’échantillonnage probaliste ;[5]  il est constitué de 1559 individus répartis sur 49 établissements scolaires ( 25 collèges, 18 lycées secondaires, 4 collèges pilotes et deux établissements regroupant des élèves de collèges et des élèves du secondaire)  qui n’ont que deux points communs : avoir 15 ans et  poursuivant ses études ; le choix du critère de l’âge est justifié par l’âge théorique d’un élève en 9ème année de l’enseignement de base ( c'est-à-dire la fin de l’école de base ),  mais la réalité nous donne une population très hétérogène, quant au niveau de la scolarité ; seul un peu moins de la moitié sont en 9ème année, c'est-à-dire qu’ils sont dans les « normes » ; mais nous nous trouvons avec 13,15% d’élèves en retard scolaire de deux années complètes; l’écart de trois années d’études est une des difficultés rencontrées par les concepteurs de l’outil d’évaluation,  et que vont devoir prendre en considération les personnes qui seront chargées d’ analyser les résultats plus tard. (Voir graphique ci - dessous)

 



 

 

 Pour conclure , le blog pédagogique salue cette initiative , car ce n’est qu’avec des outils pareils qu’on puisse avoir des indicateurs objectifs qui permettent à tous les acteurs de l’éducation d’analyser, rigoureusement, le rendement interne de l’école, loin des jugements approximatifs et subjectifs, et de prendre les mesures adéquates pour remédier aux insuffisances.
Néanmoins, il est peut être utile de faire remarquer qu’il serait nécessaire pour les prochaines sessions de se libérer du modèle Pisa d’une part, pour éviter le double emploi, puisque notre pays participe déjà aux évaluations PISA, et d’autre part, pour concevoir une évaluation ciblée sur les objectifs d’enseignement d’un cycle, ou d’une année donnée, car  l’objectif  poursuivi par l’évaluation PISA  est d’établir des comparaisons entre les systèmes éducatifs dans le monde et  «  d’ évaluer les compétences des élèves à mobiliser et appliquer leurs connaissances dans des situations de la vie de tous les jours  dans la vie d’adulte … PISA n’est pas directement relié aux programmes nationaux ; son objectif n’est de mesurer l’atteinte des objectifs fixés par les programmes nationaux d’enseignement, mais propose des épreuves mesurant des compétences générales communes aux élèves arrivant en fin de scolarité obligatoire »[6] ; c’est important, mais nous pensons que l’école tunisienne a  d’autres urgences.

Hédi bouhouch & Mongi Akrout ; Inspecteurs généraux de l’éducation
Tunis, Mars 2016


Pour aller plus loin

l’évaluation internationale PISA 2003 : compétences des élèves français  en mathématiques, compréhension de l’écrit et  sciences- les dossiers, enseignement scolaire, n°180, mars 2007 . DEPP, France
http://media.education.gouv.fr/file/83/1/4831.pdf
De Lara Philippe, PISA : un pis-aller ?  In revue Skhole.fr : Penser et repenser l’école (Philippe de Lara est philosophe et enseignant en sciences politiques). Son blog, dédié à l'enseignement supérieur, décrypte les voies d'évolution et de réforme de l'université)
Publié le 28 janvier 2011

Schleicher, Andreas : Les leçons de l’enquête PISA
(Andreas Schleicher, Conseiller spécial du Secrétaire général, chargé de la politique de l’éducation, OCDE)





[1] Le programme PISA (acronyme pour « Program for International Student Assessment » en anglais, et pour « Programme international pour le suivi des acquis des élèves » en français) est un ensemble d'études menées par l'OCDE et visant à la mesure des performances des systèmes éducatifs des pays membres et non membres. Leur publication est triennale. La première étude fut menée en 2000.

[2] La décision d’intégrer ces évaluations dans la loi de 2002  est  venue pour combler le vide créé par la suppression de l’examen régional de la sixième de l’enseignement de base et par le désir de mettre en place des évaluations formatives
[3]  Le Cripre a organisé en 2005 une évaluation nationale qui avait concerné les élèves de la 2ème et la 4ème de l’enseignement de base à l’époque du Ministre Sadok  Korbi , il semble que les résultats n’étaient  pas au niveau des attentes , on décida de ne pas les publier à une grande échelle , cette évaluation a eu pour conséquence directe l’institution d’un examen régional au niveau de la 4ème année de l’enseignement de base, qui n’a pas fait long feu.
[4] Voir le dépliant produit par le Cnipre pour annoncer l’évaluation

[5] « Échantillonnage probabiliste : Méthode d'échantillonnage où chaque membre de la population a une chance d'être sélectionné. On le nomme aussi « échantillonnage aléatoire » en raison de la manière aléatoire dont les personnes sont choisies afin de garantir une représentation sans biais de l'ensemble de la population. »

https://old.uqu.edu.sa/page/ar/68141


[6] l’évaluation internationale PISA 2003 : compétences des élèves français  en mathématiques, compréhension de l’écrit et  sciences- les dossiers, enseignement scolaire ,n°180 , mars 2007 . DEPP, France 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire