Le 28 avril 2016, le centre national d'innovation
pédagogique et de recherches en éducation (CNIPRE) a organisé, en collaboration
avec la direction générale des programmes et de la formation continue, une
évaluation nationale des acquis des élèves sur le modèle de la célèbre
évaluation internationale organisée tous les trois ans par l’OCDE, connue sous l’appellation de PISA[1] .
Le blog pédagogique a voulu lui consacrer la note de
cette semaine pour présenter cette louable initiative.
Pourquoi cette évaluation ?
L’école tunisienne a, depuis le début des années
2000, et surtout avec La loi d’orientation relative à l'éducation et à l'enseignement
scolaire, n°80 -2002, en date du 23
juillet 2002, a cherché à instituer la
culture de l’évaluation, en lui consacrant,
pour la première fois dans l’histoire de l’école tunisienne, un chapitre entier
( chapitre VII); l’article 60 de la loi stipule ceci : « Sont organisées
périodiquement, au niveau national, des évaluations qui concernent un
échantillon d'élèves de différents niveaux d'enseignement. Ces évaluations ont
pour objectif de vérifier le degré d'atteinte des objectifs fixés relativement
à la qualité des apprentissages réalisés et à la valeur des acquis de
l'élève. »[2]
Mais à notre connaissance, ce mécanisme ne fut mis en
application qu’une seule fois, au milieu des années 2000[3] ;
puis il est tombé dans les oubliettes, comme plusieurs autres mesures ;
l’initiative du Cnipre est une tentative de le faire revivre, par
l’organisation d’une évaluation nationale des acquis des élèves, dans le but
de :
§ « Constituer une base de données objectives sur
le rendement du système éducatif qui va aider les décideurs à prendre les
mesures adéquates pour l’améliorer.»
§ Et « d’exploiter les critères internationaux
pour permettre aux enseignants et aux formateurs de mettre en place un système
d’évaluation national conforme aux normes internationales ».
§ « Contribuer à développer une nouvelle culture
de l’évaluation chez tous les acteurs du système éducatif. » [4]
WATHEQ, c’est quoi ?
En
réalité, les concepteurs de cette évaluation, (le département des Etudes
Prospectives et Comparées), ont choisi de suivre le modèle de Pisa dans toutes
ses composantes (choix des domaines à évaluer, le mode d’échantillonnage, la
nature des tests, le type de présentation, le mode de passation des tests
…) ; c’est ainsi que WATHEQ :
§ A choisi d’évaluer les compétences des élèves dans trois domaines qui sont : 1- la
compréhension de l’écrit, 2- la culture mathématique, - la culture
scientifique, suivant le modèle de PISA
§ L’évaluation comporte 60 questions (20 par domaine)
que les élèves devraient réaliser en 2 heures trente minutes (50 mn par
domaine).
Qui est concerné
par l’évaluation ?
La
population ciblée par l’évaluation est constituée par les élèves âgés de 15
ans, indépendamment du niveau scolaire. échantillon
est choisi selon le mode d’échantillonnage probaliste ;[5] il est constitué de 1559 individus répartis
sur 49 établissements scolaires ( 25 collèges, 18 lycées secondaires, 4
collèges pilotes et deux établissements regroupant des élèves de collèges et
des élèves du secondaire) qui n’ont que
deux points communs : avoir 15 ans et
poursuivant ses études ; le choix du critère de l’âge est justifié
par l’âge théorique d’un élève en 9ème année de l’enseignement de
base ( c'est-à-dire la fin de l’école de base ), mais la réalité nous donne une population
très hétérogène, quant au niveau de la scolarité ; seul un peu moins de la
moitié sont en 9ème année, c'est-à-dire qu’ils sont dans les
« normes » ; mais nous nous trouvons avec 13,15% d’élèves en
retard scolaire de deux années complètes; l’écart de trois années d’études est
une des difficultés rencontrées par les concepteurs de l’outil
d’évaluation, et que vont devoir prendre
en considération les personnes qui seront chargées d’ analyser les résultats
plus tard. (Voir graphique ci - dessous)
Pour conclure
, le blog pédagogique salue cette initiative , car ce n’est qu’avec des outils pareils qu’on
puisse avoir des indicateurs objectifs qui permettent à tous les acteurs de
l’éducation d’analyser, rigoureusement, le rendement interne de l’école, loin
des jugements approximatifs et subjectifs, et de prendre les mesures adéquates
pour remédier aux insuffisances.
Néanmoins, il est peut être utile de faire remarquer
qu’il serait nécessaire pour les prochaines sessions de se libérer du modèle
Pisa d’une part, pour éviter le double emploi, puisque notre pays participe
déjà aux évaluations PISA, et d’autre part, pour concevoir une évaluation
ciblée sur les objectifs d’enseignement d’un cycle, ou d’une année donnée, car l’objectif
poursuivi par l’évaluation PISA
est d’établir des comparaisons entre les systèmes éducatifs dans le
monde et « d’ évaluer les
compétences des élèves à mobiliser et appliquer leurs connaissances dans des
situations de la vie de tous les jours dans la vie d’adulte … PISA n’est pas
directement relié aux programmes nationaux ; son objectif n’est de mesurer
l’atteinte des objectifs fixés par les programmes nationaux d’enseignement,
mais propose des épreuves mesurant des compétences générales communes aux
élèves arrivant en fin de scolarité obligatoire »[6] ;
c’est important, mais nous pensons que l’école tunisienne a d’autres urgences.
Hédi bouhouch & Mongi Akrout ; Inspecteurs
généraux de l’éducation
Tunis, Mars 2016
Pour aller plus loin
l’évaluation internationale PISA 2003 :
compétences des élèves français en
mathématiques, compréhension de l’écrit et
sciences- les dossiers, enseignement scolaire, n°180, mars 2007 . DEPP,
France
http://media.education.gouv.fr/file/83/1/4831.pdf
De Lara Philippe, PISA : un pis-aller ? In revue Skhole.fr : Penser et repenser
l’école (Philippe de Lara est philosophe et enseignant en sciences politiques).
Son blog, dédié à l'enseignement supérieur, décrypte les voies d'évolution et
de réforme de l'université)
Publié le 28 janvier 2011
Schleicher,
Andreas : Les leçons de
l’enquête PISA
(Andreas
Schleicher, Conseiller spécial du Secrétaire général, chargé de la politique de
l’éducation, OCDE)
[1] Le programme PISA (acronyme pour
« Program for International Student Assessment » en anglais,
et pour « Programme international pour le suivi des acquis des
élèves » en français) est un ensemble d'études menées par l'OCDE et
visant à la mesure des performances des systèmes éducatifs des pays membres et
non membres. Leur publication est triennale. La première étude fut menée en
2000.
[2] La décision d’intégrer ces évaluations dans la loi de
2002 est
venue pour combler le vide créé par la suppression de l’examen régional
de la sixième de l’enseignement de base et par le désir de mettre en place des évaluations
formatives
[3] Le Cripre a
organisé en 2005 une évaluation nationale qui avait concerné les élèves de la 2ème
et la 4ème de l’enseignement de base à l’époque du Ministre Sadok Korbi , il semble que les résultats n’étaient pas au niveau des attentes , on décida de ne
pas les publier à une grande échelle , cette évaluation a eu pour conséquence
directe l’institution d’un examen régional au niveau de la 4ème année de l’enseignement
de base, qui n’a pas fait long feu.
[4] Voir le dépliant produit par le Cnipre pour annoncer l’évaluation
[5] « Échantillonnage probabiliste : Méthode d'échantillonnage où chaque membre de la population a une chance d'être sélectionné. On le nomme aussi « échantillonnage aléatoire » en raison de la manière aléatoire dont les personnes sont choisies afin de garantir une représentation sans biais de l'ensemble de la population. »
https://old.uqu.edu.sa/page/ar/68141
[6] l’évaluation internationale PISA
2003 : compétences des élèves français
en mathématiques, compréhension de l’écrit et sciences- les dossiers, enseignement scolaire
,n°180 , mars 2007 . DEPP, France
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