dimanche 6 avril 2025

Les quatre défis du système éducatif tunisien

 


Hédi Bouhouch

Le blog pédagogique  propose cette semaine un extrait d’un rapport de l’UNICEF  paru en 2014[1] ,  l’extrait que nous avons choisi met l’accent sur les défit  que le système éducatif tunisien se doit de relever.

1-    Améliorer le taux de scolarisation  pour la tranche d’âge 12-18 ans : Depuis plus de dix ans, la Tunisie peine à maintenir un taux de scolarisation supérieur à 74-75 % pour cette tranche d’âge, malgré une couverture quasi universelle de l’enseignement primaire (99 % des enfants de 6 à 11 ans). Les taux élevés de redoublement (17,3 % au collège et 16,8 % au lycée) et d’abandon (9,3 % au collège et 11,9 % au lycée) illustrent les difficultés du système éducatif, notamment la transition entre le primaire et le secondaire.


2-    Le faible taux de préscolarisation constitue un autre défi, avec un quart des enfants non couverts et un tiers ne suivant pas l’année préparatoire. Il est recommandé de rendre le préscolaire obligatoire et gratuit, d’investir dans les infrastructures et la formation des éducateurs, et de renforcer l’équité territoriale, notamment en milieu rural.

3-    Le 3ème défi concerne  la formation des enseignants  qui  doit être améliorée, avec une redéfinition des compétences requises et une meilleure adéquation entre qualifications académiques et pédagogiques.

4-    Enfin, après avoir atteint les objectifs d’accès à l’école pour tous, le système éducatif tunisien doit désormais relever les défis de la qualité et de l’équité, en adoptant une approche par compétences et en réformant les curriculums et les méthodes d’évaluation pour améliorer les performances des élèves.

 

 

 

La Tunisie n’a pas réussi, et cela depuis plus de dix ans, à maintenir au Collège et au Lycée plus de 74-75% des enfants de 12 à 18 ans.

 

«  La Tunisie actuelle, en transition vers la démocratie, ne peut que parler le langage de l’objectivité et de la transparence. Elle ne peut que reconnaître que si elle est arrivée à scolariser à l’école Primaire 99% des enfants de 6 à 11 ans, elle n’a pas réussi, et cela depuis plus de dix ans, à maintenir au Collège et au Lycée plus de 74-75% des enfants de 12 à 18 ans. Le ministère de l’Education a saisi l’opportunité offerte par l’Initiative mondiale en faveur des enfants non scolarisés (OOSCI), lancée par l’UNICEF et l’Institut de statistique de l’UNESCO, de soutenir la réalisation d’une étude sur les enfants non scolarisés afin d’approfondir l’analyse de ce phénomène, de mieux connaître les profils des enfants non scolarisés grâce à une méthode novatrice, d’établir des liens entre ces profils et les causes responsables de l’exclusion. Le but étant de disposer d’éléments pertinents pour élaborer et mettre en œuvre des politiques efficaces de lutte contre l’exclusion scolaire dans une perspective multisectorielle »

 

En 2013, le taux net de scolarisation des enfants de 6 ans est de 99,4% ; celui des enfants de 6 à 11 ans est de 98,9% ; et celui des jeunes de 12 à 18 ans est aux alentours des 74-75%.

Les taux de redoublement  sont  17,3% au Collège et 16,8% au Lycée contre 7,5% dans le Primaire.

 Les taux d’abandon sont 1% dans le Primaire contre 9,3% au Collège et 11,9% au Lycée »

 

 

« En 2013, le taux net de scolarisation des enfants de 6 ans est de 99,4% (égalité filles/garçons) et celui des enfants de 6 à 11 ans est de 98,9% : il s’agit d’une couverture quasi universelle assurée depuis une dizaine d’années déjà. Par ailleurs, le ratio d’élèves par enseignants ne cesse de diminuer pour atteindre aujourd’hui 17,2. Au Collège et au Lycée, la situation est plus problématique puisque le taux de scolarisation des jeunes de 12 à 18 ans stagne depuis 10 ans aux alentours des 74-75%. Le Collège et le Lycée accusent par ailleurs un taux de redoublement qui, en 2011-2012, était de 10 points plus élevé que celui du Primaire (17,3% au Collège et 16,8% au Lycée contre 7,5% dans le cycle Primaire). Le taux d’abandon est aussi significativement supérieur : 1% dans le Primaire contre 9,3% au Collège et 11,9% au Lycée ».

 

 

Les taux d’abandon au primaire sont passés en 2012 de 9% à 3%, mais cette diminution s’est faite au détriment d’un système d’enseignement de qualité, les élèves n’ayant pas acquis les compétences de base requises arrivent au Collège, ce qui explique les taux de redoublement et d’abandon élevés.

 

« En termes de maintien des élèves dans le cycle Primaire, les données sont encourageantes puisqu’en 2012, le nombre d’abandons est trois fois moindre que ceux enregistrés en 2000 (passant de 9% à 3%). Mais cette diminution s’est faite au détriment d’un système d’enseignement de qualité, les élèves n’ayant pas acquis les compétences de base requises atteignant malgré tout la sixième année de l’enseignement de base. C’est pourquoi, au Collège, on enregistre un nombre d’abandons qui, s’il a baissé en 12 ans, reste deux fois plus élevé qu’au Primaire, posant la question de la délicate transition entre les deux cycles. »

« Les enfants de 12 à 14 ans sont en dehors de l’école dans des proportions plus élevées qu’au Primaire : un peu plus d’un enfant en âge d’aller au Collège sur dix… ne suit pas, en effet, une scolarité dans le deuxième cycle de l’enseignement de base… l’abandon la problématique majeure du Collège. De 12 ans à 18 ans, la probabilité d’être en dehors du système scolaire augmente avec l’âge.

 

Constats et recommandations

Le système éducatif tunisien reste confronté à une faible préscolarisation des enfants, ce qui freine le développement de l’enfant et affecte l’efficacité de l’enseignement primaire… Aujourd’hui encore, un enfant sur quatre ne bénéficie toujours pas de couverture Préscolaire et un enfant sur trois ne suit pas l’année Préparatoire avant d’entamer le cycle Primaire.

Il faut rendre «  le Préscolaire obligatoire et gratuit, dans le cadre d’une politique d’ensemble, c’est-à-dire une politique qui ne se limite pas uniquement à l’année préparatoire, mais qui intègre aussi la préscolarisation des enfants de 3 et 4 ans. »

 

 

1-     « il faut investir massivement dans le préscolaire : dans les infrastructures, l’unification et la standardisation des programmes et la formation des éducateurs.

Le système éducatif tunisien reste confronté à une faible préscolarisation des enfants, ce qui freine le développement de l’enfant et affecte l’efficacité de l’enseignement primaire.

Bien que le taux de couverture ait augmenté depuis 2006, lorsque la moitié des enfants ne recevait aucune forme de préscolarité avant 6 ans, aujourd’hui encore, un enfant sur quatre ne bénéficie toujours pas de couverture Préscolaire et un enfant sur trois ne suit pas l’année Préparatoire avant d’entamer le cycle Primaire. La question de la couverture Préscolaire se pose avec plus d’acuité en milieu rural.

Il convient de contrer cette tendance en rendant le Préscolaire obligatoire et gratuit, dans le cadre d’une politique d’ensemble, c’est-à-dire une politique qui ne se limite pas uniquement à l’année préparatoire, mais qui intègre aussi la préscolarisation des enfants de 3 et 4 ans. Ces années qui précèdent le début de la scolarisation Primaire sont en effet cruciales pour le développement de l’enfant : pour la formation de sa personnalité, pour la contribution à ses succès scolaires ultérieurs mais aussi pour le dépistage précoce d’insuffisances physiques ou mentales susceptibles de limiter ses chances de réussite scolaire. »

« Dans le cadre d’une stratégie nationale du Préscolaire, relancer la volonté de généralisation de l’année préparatoire, sous l’impulsion du ministère de l’Education et du ministère chargé de l’Enfance, et sous les conditions suivantes :

§  penser la généralisation dans le cadre d’une politique d’ensemble du Préscolaire – c’est-à-dire une politique qui ne se limite pas à l’année Préparatoire mais inclut aussi les enfants de 3 et 4 ans ;

§   penser quantité et qualité ensemble, car il n’est pas concevable de généraliser l’enseignement Préscolaire s’il n’est pas de qualité ;

§   et mettre davantage encore l’accent sur les régions rurales.

§  S’appuyer sur l’ensemble des acteurs opérant à un niveau local, en particulier les collectivités locales.

 

2-     La qualité du système éducatif tunisien (y compris la qualité de l’offre) reste un défi très actuel. Cette qualité doit être améliorée à tous les niveaux, en commençant par le niveau préscolaire, et en privilégiant notamment la transition entre le primaire et le collège. »

 

«  Il est indispensable qu’une politique de formation des enseignants ambitieuse soit élaborée, en distinguant bien les compétences attendues des enseignants / éducateurs dans chacun des niveaux.

Les critères de recrutement des enseignants doivent aussi être révisés. Le métier d’enseignant ne s’improvise nullement et exige des compétences spécifiques d’ordre pédagogique.

 

 Le premier défi à relever pour augmenter la qualité de l’éducation est celui de la formation des enseignants. A ce jour, la Tunisie ne possède pas de centre de formation pour l’ensemble des métiers de l’éducation. Il est indispensable qu’une politique de formation des enseignants ambitieuse soit élaborée, en distinguant bien les compétences attendues des enseignants / éducateurs dans chacun des niveaux.

Les critères de recrutement des enseignants doivent aussi être révisés. Le métier d’enseignant ne s’improvise nullement et exige des compétences spécifiques d’ordre pédagogique. La balance existant actuellement entre qualifications (dans une optique de valorisation du métier d’enseignant, via l’exigence de posséder une maîtrise) et compétences enseignantes (dans une optique d’exercice du métier d’enseignant) est déséquilibrée et doit être repensée au profit du deuxième pôle ».

 

« le système éducatif tunisien est confronté à de nouveaux défis de qualité et d’équité après avoir atteint les objectifs quantitatifs (l’accès à l’école pour tous). »

 

 « A peine cette nouvelle réforme 2002)  ) est-elle promulguée que le système éducatif tunisien est confronté à de nouveaux défis de qualité et d’équité après avoir atteint les objectifs quantitatifs (l’accès à l’école pour tous). En mettant en évidence les faibles performances des élèves, les évaluations nationales et les comparaisons internationales mettent au jour la faiblesse de l’efficacité du système éducatif de même que le grand décalage qui existe entre la réforme d’une part et les réalités du terrain d’autre part. C’est notamment suite à ce constat alarmant que la Tunisie, dans un souci d’amélioration des acquis des élèves, adopte l’approche par compétences. Redonner sens aux apprentissages, décloisonner les savoirs, rendre l’élève plus actif dans la construction de ceux-ci, outiller les enseignants afin qu’ils interviennent auprès des plus faibles… tels sont les objectifs recherchés en vue d’augmenter l’efficacité du système éducatif tunisien et de le rendre plus inclusif et équitable. A cette fin, les curriculums sont refondés et le système d’évaluation ainsi que la formation des enseignants sont réformés ».

 

 UNICEF -  Ministère de l’éducation tunisienne - TUNISIE RAPPORT NATIONAL SUR LES ENFANTS NON SCOLARISÉSoctobre 2015



[1] UNICEF -  Ministère de l’éducation tunisienne - TUNISIE RAPPORT NATIONAL SUR LES ENFANTS NON SCOLARISÉS octobre 2014

 

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