dimanche 23 mars 2014

Les SMS : un allié pour les apprentissages scolaires ?

Nous avons lu, ces derniers jours, une étude très intéressante sur les effets  des SMS [1] intitulée- La pratique des SMS des collégiens et des lycéens, qui a été publiée au mois Août 2013. L’étude est réalisée par Josie Bernicot , professeure à l'université de Poitiers, pour le Centre Henri Aigueperse[2].

Pourquoi cette étude ?
Devant l’explosion de la pratique des SMS, qui est apparue il y a déjà plus que 20 ans , les élèves sont de plus en plus nombreux  et de plus en plus de jeunes  à utiliser les SMS pour communiquer; un nouveau langage, qui ne respecte  ni les règles de l’orthographe,  ni celle de la grammaire, ni aussi la structure des messages classiques , est né  ; les parents et les enseignants s’en inquiètent; ils ont peur du nouveau langage, n’entrave- t- il  pas  l’acquisition du langage scolaire?  «  Beaucoup n’ont pas hésité à imputer les difficultés scolaires et la baisse du niveau»  à cette nouvelle pratique.
Cette recherche a essayé de donner une réponse à cette question.
Brève présentation de l’étude
L’étude a  durée 3 ans ( 2011 – 2013) ;  5 000 SMS ,recueillis de façon longitudinale pendant une année produit par des collégiens français  de 11-12 ans[3]  et lycéens français  de 13 à 18 ans, ont été analysés et comparés aux résultats de l’échantillon obtenus dans un test standardisé qui permet de distinguer l’orthographe d’usage et orthographe de règle aux résultats scolaires  du même échantillon en écrit traditionnel.

L’étude  de 109 pages est constituée de deux parties :
La 1° intitulée : Les SMS des élèves de 10-12 ans forts ou faibles en orthographe :Une étude longitudinale d’une durée d’un an au collège
 Il s’agit d’élèves de 5° et de 6° du  Collège Camille Guerin de Vouneuil sur Vienne qui n’ont pas utilisé auparavant des téléphones mobiles, et à qui on a offert des téléphones mobiles, après l’accord des parents et de la direction de l’école ;  et après avoir donné leur accord pour la collecte et l’étude des SMS qu’ils ont produit durant  une année.
Les chercheurs ont comparé l’orthographe d’usage et orthographe de règle aux résultats scolaires  du même échantillon en écrit traditionnel.
La 2° intitulée  Les SMS chez les adolescents de 13-18 ans: Une étude de la longueur, de la structure et de la fonction sociale des messages.
L’étude a analysé un échantillon constitué de 1131 SMS produits  par 115 ; dont 54  adolescents et  61 adolescentes ; ces SMS se répartissent de la façon suivante :
    selon l’âge:
Catégorie d’âge
Nombre d’élèves
Nombre d’ SMS
13 – 14 ans
23
227
15 – 16 ans
41
336
17 - 18
51
568
TOTAL
115
1131
   selon le sexe et l’ancienneté et la fréquence
SMS recueillis selon le sexe
SMS recueillis selon l’ancienneté et fréquence  d’utilisation
Filles
655
Ancienne et  fréquente
802
Garçons
476
Récente et rare
329
Total
1131

1131

L’étude porte sur le rôle de l’âge, le genre (fille-garçon) et de la pratique des SMS (récente et rare/ancienne et fréquente) sur la longueur des messages (nombre de caractères avec espaces et nombre de mots), leur structure dialogique (avec ou sans ouverture et clôture) et leur fonction (informationnelle/relationnelle).
L’étude ne s’est pas  intéressée à chaque variable séparément ; mais elle les a  croisées afin étudier leurs effets regroupés. Alors, dans quelle mesure  la longueur, la structure et de la fonction sociale des SMS varient elles selon les ses auteurs ?
Dans Chaque partie l’auteure expose, après une introduction,  la méthode  de travail suivie  puis les  résultats et termine par une  discussion de ces résultats   et  par les références bibliographiques
Les principales conclusions
Les conclusions de la première partie :
Les conclusions sont plutôt rassurantes et positives, elles se résument  en 4 points:
1.     Le lien entre le niveau des élèves en orthographe et leur pratique des SMS n’est pas clair ; les élèves forts ou faibles en écrit traditionnel au début du recueil des données restent respectivement forts ou faibles pendant un an, quelle que soit leur pratique des SMS (l’échantillon  étaient constitué de jeunes n’ayant jamais  utilisé des téléphones mobiles avant l’expérience). 
2.     l’auteure  rejette «  l’hypothèse d’une influence négative de la pratique des SMS sur l’apprentissage de la langue écrite à l’école »,  en avançant qu’«  aucune étude n’a démontré de liens négatifs entre la pratique des SMS et la maîtrise de l’écrit traditionnel » ,elle réfute aussi les thèses qui   considèrent que «  les SMS comme une forme incorrecte et dégradée de l’écrit traditionnel que les élèves seraient tentés d’utiliser en toutes circonstances »  et elle défend  l’idée qui considère que «   les SMS sont  un nouveau registre de la langue écrite … défini par un ensemble des marques langagières structurales appropriées dans une situation sociale donnée … On n’écrit pas… de la même façon un SMS à un copain et le résumé la dernière leçon de géographie à l’école. »  p14-15
3.      pour  l’auteure «   les SMS sont une occasion nouvelle et supplémentaire de pratiquer l’écrit, qui auparavant, pour des enfants de 11-12 ans, était restreint au milieu scolaire. Nous avons jusqu’à maintenant insisté sur les 52% de mots qui contiennent des textismes[4] dans les SMS. Il faut aussi considérer les 48% de mots qui sont écrits selon les règles traditionnelles. »
4.      Enfin l’auteure du rapport pense que  les SMS  pourraient être utilisés comme un allié pour les apprentissages scolaires en se basant sur quatre faits :
-         les élèves pratiquent cette forme de communication (en écriture comme en lecture) avec facilité et enthousiasme.
-         aucune étude n’a démontré de lien négatif de cette pratique avec la maîtrise de l’écrit traditionnel.
-         un pourcentage important d’élèves possède un téléphone mobile qui constitue l’une des nouvelles technologies les moins onéreuses.
Pour toutes ces raisons, (le rapport final)  avance que «  le téléphone mobile et les SMS pourraient être utilisés comme support d’apprentissages scolaires» p 47-48

Les conclusions de la deuxième partie :
L’étude est  arrivée aux conclusions suivantes :
§  Au sujet de la taille des SMS, globalement le nombre de caractères augmente avec l’âge et est plus important pour les filles que pour les garçons. Surtout pour les tranches d’âge  15-16 ans et 17-18 ans.
§  Pour la structure des SMS, l’étude a montré que 25%  sont conforme à la structure traditionnelle  c'est-à-dire comportant  une ouverture suivi du message et se termine par une clôture; 75% ne respectent pas cette  structure où manquent l’ouverture ou la clôture ou les deux à la fois ; dans 25% des cas les messages sont seuls sans ouverture ni clôture ; ainsi on peut admettre que les SMS sont un type de communication écrit.
§  Pour la fonction des SMS, l’analyse des contenus des messages a révélé qu’ils remplissent deux fonctions principales :
-         la première est une fonction « informationnelle-transactionnelle » elle représente  43.13%  de l‘échantillon, cette fonction est plus présente dans les SMS produits par les garçons   (45.09%)  et seulement (41.7% ) chez les filles ; cette fonction est plus importantes chez la tranche d’âge 17-18 ans  (44.98 %) et chez les nouveaux utilisateurs (47.16 %)
-           la deuxième est une fonction « relationnelle »  56.86  % des SMS , cette fonction est plus présente dans les SMS des jeunes filles 58.26% contre 54.91 % chez les garçons , elle devient très présente dans le SMS de la tranche d’âge 15-16 ans ;
Les thèmes de la fonction« relationnelle »   sont par ordre décroissant  les relations amicales et l’organisation sociale (environ 35% pour chaque catégorie), puis les relations amoureuses et les échanges interpersonnels ritualisés (environ 15% pour chaque catégorie).
 Tels étaient les résultats et les conclusions de cette étude fort originale


PS :
Pour ceux qui sont intéressés par la question, nous leur proposons  les liens suivants :
L'Expresso du 6 mars 2014  où on peut lire une brève présentation de l’étude http://www.cafepedagogique.net/Documents/06032014Article635296861458424606.pdf
Extraits de la synthèse (Josie Bernicot) 
Communication rapide (SMS, réseaux sociaux) et pratiques pédagogiques http://www.education.com/spip.php?article69




[1] S MS : short message service  ( service de messages succincts)
[2] Le rapport final - http://cha.unsaeducation.com/IMG/pdf/unsabernicotrapportfinal_161213.pdf
[3] Il s’agit d’élèves de 5° et de 6° Collège Camille Guerin de Vouneuil sur Vienne .
[4] Le textisme est le changement dans la forme orthographique de mot par rapport à l’écrit traditionnel 
Cliquez ici pour la version AR

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