En hommage à la mémoire du professeur Moncer Rouissi, le blog pédagogique poursuit cette semaine la publication de l'étude réalisée en 1998 quand il était à la tête du Ministère de la formation professionnelle et de l'emploi; cette étude est l'une des meilleures et des plus complètes réflexions sur l'état du système éducatif tunisien. Nous avons consacré le numéro de la semaine passée à la première partie de l'étude qui a été réservée à : - la
présentation du diagnostic fait par la commission de réflexion sur la réforme
de l’éducation présidée par Dr.H.Karoui et qui a donné lieu à un rapport
intitulé « Pour une réforme du système éducatif » en date de
janvier 1982 et des recommandations qui proposer de réformer le système
éducatif en place depuis 1958, mais cette réforme a tardé à venir ce qui a
contribué a l'aggravation de la crise du S.E. jusqu'à la venue de la réforme
de 1991. - l'exposé d'un bilan critique de la réforme de 1991 au niveau de
l'enseignement de base (E.B), l'étude estime que cette réforme n'a pas réussi
à changer " la logique interne
du système: l’école de base est restée un cycle non finalisé qui prépare
simplement au cycle secondaire qui à son tour prépare au supérieur" comme
elle n'a pas réussi à réduire fondamentalement le volume des abandons et enfin "le problème du coût de
l’éducation reste posé". Le papier de cette semaine est
consacré à la deuxième partie de l'étude qui
traite l'état de l'enseignement secondaire issu de la réforme de 1991. Pour revoir la première partie, Cliquer ICI Le
blog pédagogique, janvier 2021 |
1-2-1- Au
niveau du secondaire
Au
niveau de l’enseignement secondaire, le problème de la rétention artificielle s’ajoute
à celui des abandons. Cette rétention commence au niveau du système public et
se prolonge toujours par une autre au niveau de l’enseignement privé. Cette
année , les candidats au baccalauréat sont pratiquement aussi nombreux que ceux
qui se sont présentés à l’examen de l’école de base.
La
disparité
régionale est réellement excessive pour ce qui l’enseignement secondaire.
Les
jeunes de certaines régions sont 4 fois moins scolarisés dans le secondaire que
ceux d’autres régions. La
situation du marché de l’emploi au
niveau régional devient de ce fait
extrêmement difficile. Quelles sont les solutions en matière d’emploi dans
des régions où 80% d’une tranche d’âge ont au maximum une éducation de niveau
primaire ? Comment dans ces
conditions peut-on attirer des investissements dans ces régions ?
Il semble même, au vu des caractéristiques des
demandeurs d’emploi diplômés de l’enseignement supérieur, que les disparités quantitatives globales
entre les régions soient accompagnées d’une autre disparité au niveau de la
répartition des élèves entre les options du secondaire
Les régions du centre-ouest, et surtout du sud-ouest, se caractérisent notamment par une prépondérance des diplômés en sciences humaines parmi les demandeurs d’emploi de ces régions inscrits auprès des bureaux de l’emploi. Ces diplômés étaient au départ des bacheliers en lettres.
2-
La réforme de l’économie et
ses implications en matière de formation professionnelle :
Il
y a d’abord lieu de rappeler les objectifs de la réforme de la formation professionnelle qui
intègrent fondamentalement ceux de la réforme de l’économie.
Durant les trois premières décennies de
son développement économique, la Tunisie
a utilisé comme avantage concurrentiel des facteurs élémentaires tels que
i.
sa position
géographique,
ii.
l’existence
d’une main d’œuvre relativement éduquée quoique non qualifiée
iii.
et un niveau de
salaires comparativement avantageux aidé en cela par un taux de change
favorable.
Ces facteurs élémentaires n’ont
cessé de perdre de leur importance
en devenant de moins en moins indispensables et de plus en plus disponibles
sur les marchés internationaux. Ils ne sont plus suffisants compte tenu des
changements fondamentaux qui sont entrain d’affecter l’économie régionale et
mondiale .
Au
moyen de réformes structurelles, la Tunisie a pris l’option stratégique
majeure dès le début des années 90, de se doter en nouveaux facteurs d’avantage concurrentiel.
C’est ainsi que des facteurs complexes sont entrain
d’apparaître sur plusieurs axes tels que celui de l’infrastructure
de la communication, l’informatique,
la recherche
scientifique, l’enseignement supérieur et la formation
professionnelle. |
La
loi d’orientation de la Formation Professionnelle de 1993 a d’abord permis de
lancer une réforme en profondeur visant à re-positionner la Formation
Professionnelle dans la société tunisienne et à initier de nouvelles articulations entre la formation et le monde économique confronté
aux restructurations induites par l’ajustement structurel. L'accord de
partenariat avec l'Union Européenne a ensuite accéléré cette action de réforme
de la formation professionnelle dans son ensemble.
Une
série de CMR a été consacrée à ce sujet et a permis l’adoption d’un ensemble de
mesures à même de concrétiser cette option. (cf notamment CMR du 26 janvier 94, 22 juillet 94, 15 mars 95, 2 juin
95, 21 juillet 95, 4 mars 96, 10 janvier 97.)
L’étude
stratégique N°11, pilotée conjointement par les Ministères du Développement Economique, de
l’Education Nationale, de l’Enseignement Supérieur et de la Formation
Professionnelle et de l’Emploi, a été consacrée aux rôles des systèmes
d’éducation et de formation dans le développement des qualifications compte
tenu des exigences du nouveau contexte économique. Cette étude a été élaborée
courant 1995 et 1996 et présentée au CMR du 10 Janvier 1997.
La
stratégie MANFORME[1]
a défini un programme d’action sur 7 ans
pour mettre à niveau le système de formation
professionnelle selon une approche qualité imposée par
ailleurs par l’impératif de compétitivité exigé de l’ensemble du système
productif . Cette stratégie a été arrêtée
lors du CMR du 21 juillet 1995 .
Une
meilleure expression du besoin, associée à une nomenclature nationale des métiers et professions reconnues et
utilisées par tous, des curriculas élaborés
selon les compétences correspondantes à ces besoins et tenant compte de leur
évolution, un partenariat avec l’entreprise grâce au mode de formation en alternance, des centres
bénéficiant d’une large autonomie , intégrés dans leur environnement et
pratiquant un marketing stratégique, un système de certification des qualifications obtenues, une démarche qualité implantée dans tout le
dispositif de formation : telles sont en résumé les principales
caractéristiques du système de formation qui est entrain de se mettre en place
dans le cadre de la stratégie MANFORME.
Au pilotage par l’offre
de formation a été substituée une logique qui s’apparente à " l’approche client " et un pilotage
par la demande des entreprises en qualification.
Le libre choix des
jeunes, associé à un pré-requis éducatif de qualité, constitue cependant une
condition nécessaire à la mise en place de normes de qualité dans le dispositif
de formation professionnelle. Les
textes relatifs à l’établissement de la classification nationale des
emplois et des métiers d’une
part et à l’homologation des diplômes de la formation professionnelle
d’autre part ont permis le démarrage de
la mise en application de ces orientations.
Une situation nouvelle
est ainsi créée qui rompt avec l'articulation par l'échec entre le système
éducatif et la formation professionnelle. La rupture avec la logique de
l'articulation par l'échec vaut pour tous les niveaux de formation et
d'enseignement, aussi bien au terme de l’école de base qu'à celui du premier comme
du second cycle secondaire.
L’étude
stratégique N°11 a montré que l’abandon de l’articulation par l’échec,
outre le fait qu’il constitue une condition sine qua non à la valorisation de la formation
professionnelle, réduit la
pression sur l’enseignement secondaire, améliore le rendement de l’école de
base et permet même de dégager une économie potentielle sur le fonctionnement du système éducatif qui
pourrait être ré-affectée à l’amélioration des conditions matérielles de son
fonctionnement et partant de la qualité de ses prestations.
Le
passage à ce schéma « d’articulation optimisée » ne saurait se faire
que dans un processus de transition volontariste qui implique la réalisation
des conditions d’employabilité et de promotion donc d’attractivité.
Ces
conditions s’articulent autour des points suivants :
« La
mise en place d'un système de formation professionnelle intégré, cohérent,
promotionnel et sanctionné par des diplômes reconnus et homologués ;
« L’engagement
d’une action de révision en profondeur des programmes de formation, de
production de référentiels et de manuels de formation ainsi que d'outils
pédagogiques appropriés ;
« L’adoption
de modes de formation professionnelle efficace en terme d’insertion ;
« Une
information destinée aux jeunes et à leur famille sur le nouveau dispositif de
formation professionnelle et sur les perspectives qu'il ouvre au double plan
de la promotion et de l'emploi de
demain.
Cette information ne saurait
cependant produire l’impact souhaité sur la décision des jeunes et de leurs
parents que dans la mesure où elle est exprimée à travers l’école de base et du
secondaire et véhiculée par des éducateurs judicieusement préparés et bien
informés.
Fin de la deuxième partie :à suivre. Pour revenir à la première partie, cliquer ICI
Pour consulter la version AR, cliquer ICI
[1]
le programme de mise à niveau de la formation professionnelle et de
l'emploi (MANFORME) élaboré en 1995 par le
Gouvernement tunisien.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire