Le blog pédagogique ouvre pour la troisième fois ses
pages à notre collègue Amor Bennour ,
Inspecteur général et Directeur de l’Inspection générale depuis sa création au début des années quatre
vingt dix contribuant à la mise en place de cette noble institution, pour poursuivre ses réflexions
sur les réformes éducatives (A propos de la réforme du système éducatif et A propos de le réforme éducative : les références juridiques)
et pour parler cette fois des références pédagogiques des réformes .
Nous remercions Si
Amor pour ses contributions et nous serons toujours heureux de lui ouvrir les
pages du blog pédagogiques ; nous souhaitons que
d’autres collègues suivent l’exemple de Si Amor
pour enrichir la scène nationale
de leurs expériences, le blog pédagogique leur est toujours ouvert.
Hédi Bouhouch et Mongi Akrout
Introduction
Nous
avons vu, dans une précédente note, les références juridiques qui déterminent
l’action éducative, en insistant sur les réformes éducatives, pour terminer par
les principaux objectifs du 11ème plan du développement de
l’éducation qui a été arrêté par la révolution.
Et avant
de poursuivre, dans cette note, l’étude
des références pédagogiques sur lesquelles s’appuie l’acte éducatif, il serait
bon de préciser que les principes que nous évoquons sont des principes
universels, et ils sont loin d’être spécifiques à notre système éducatif, mais
nous les partageons avec d’autres
systèmes éducatifs.
Prenons, par exemple, le principe de
« l’éducation est une priorité nationale absolue », ou encore celui
qui déclare que « l’élève est au centre de l’action éducative »,
nous les retrouvons dans la loi d’orientation française, plus connu sous le nom
de la « loi Jospin » de 1989[1] ;
la première phrase de l’article premier de la dite loi dit ceci :« L’éducation
est la première priorité nationale » ; on retrouve aussi presque la
même similitude à propos de la place de
l’élève ou de l’étudiant, où il est dit : « Le service public de
l’éducation est conçu et organisé en fonction des élèves et des
étudiants » ; « Les
élèves et les étudiants élaborent leur projet d’orientation scolaire,
universitaire et professionnelle, en fonction de leurs aspirations et de leurs
capacités, avec l’aide des parents, des enseignants, des personnels
d’orientation et des professionnels compétents. Les administrations concernées,
les collectivités territoriales, les entreprises et les associations y
contribuent. »
Dans la
loi marocaine, « la charte nationale d’ éducation et de formation »,[2]
on lit dans l’article 21 ceci :
« Le secteur de l'éducation et de la formation est érigé, en première
priorité nationale, après l'intégrité territoriale » . L’article 6 dit
que « La réforme de l'éducation
et de la formation place l’apprenant, en général, et l'enfant en particulier,
au centre de la réflexion et de l'action pédagogiques ».
Ces deux
exemples sont la preuve que les principes qu’on a cités étaient devenus des
principes universels, partagés par les systèmes éducatifs qui aspirent au
progrès, et regardent vers l’avenir et croient au rôle de l’école.
Les références pédagogiques
1.
Le
programme des programmes
Ce
document est paru en 2003 , préparé par la Direction des programmes et de la
formation continue ; c’est la première fois, dans l’histoire de l’école tunisienne,
que ce type de document est produit ;
mais il était connu, dans d’autres pays telle que la France ou la Belgique, où
il est connu sous le nom de « socle de compétences » ; le
programme des programmes a délimite’ le profil et les compétences de l’élève à
la sortie du système, et les niveaux de leur réalisation à la fin de chaque
cycle ; il a ensuite détaillé ( précisé) les dimensions personnelles ,
civiques, cognitives , culturelles et scientifiques ; et il a, enfin,
énuméré les huit compétences transversales[3]
que devrait acquérir chaque apprenant, à la fin de sa scolarité ; ces
compétences sont :
-
S’exprime de façon adéquate pour
communiquer
-
Exploite les données
-
Adopte une méthodologie de travail
efficace
-
Utilise les nouvelles technologies
-
Réalise un projet
-
Résout les problèmes
-
Communique avec autrui pour vivre avec les
autres et travailler avec eux
-
Use de l’esprit critique.
Ces
compétences ont été réparties selon les domaines du savoir, à savoir le domaine des langues, celui des sciences exactes,
des sciences humaines, de la technologie et des arts. Ceux qui analysent tout cela remarquent la
noblesse des finalités éducatives et l’image du futur citoyen formé à l’école
et à l’université tunisienne ; mais est- ce que nos programmes et nos
méthodes ont-ils traduit ces finalités sur le terrain et la réalité quotidienne
de l’école avant de parler d’un cadre plus large ( la société) ? Ou
qu’entre les ambitions et la réalité il ya des distances ? Dans quelle
mesure l’élève d’aujourd’hui est-il capable de communiquer dans une langue
saine et correcte ? Dans quelle mesure use-t-il de l’esprit
critique ? et quel projet peut-il entreprendre ? Et dans quel domaine
fait-il appel aux nouvelles technologies ? Et bien d’autres questions se
posent à nous aujourd’hui ; or, même si la réforme de 2002 n’a pas fait
l’objet d’une évaluation scientifique , l’impression dominante aussi bien
chez monsieur tout le monde, comme chez les
personnes du domaine est que l’écart entre la théorie et la pratique est énorme, et qu’il y a eu un
disfonctionnement entre les inputs et les outputs, qui est du en grande partie
aux décisions irréfléchies des ministres qui se sont succédés, à Bab Benet, ces dernières années ; des
décisions qui ne tenaient pas compte de la structure du système, ce qui
provoque des dégâts au niveau de ses
bases mêmes, et crée des lacunes
qui entrainent des résultats négatifs inattendus
ou imprévisibles.
2. Les
programmes
La
réforme éducative a nécessité l’élaboration de nouveaux programmes pour tous
les cycles, qui devraient
théoriquement aider à réaliser les compétences
citées ci-dessus ; les différentes commissions chargées de l’élaboration
des programmes ont travailler studieusement dans ce sens ; mais si nous
avons noté un changement dans les nouveaux programmes du premier cycle de
l’enseignement de base ( l’école primaire) qui ont essayé de répondre aux
exigences des compétences, les programmes des deux autres cycles n’ont
été touchés par le vent des compétences que superficiellement, où l’approche par objectifs s’est maintenue ( centré sur les savoirs ,
savoir- faire et le savoir être ), si bien que les changements sont restés au
niveau des savoirs et des connaissances seulement ; ainsi nous ne trouvons
pas de liens solides entre ces programmes et les contenus du document du
programme des programmes ; et s’il n’y avait pas eu les initiatives des
équipes d’élaboration des manuels, qui ont fait que les manuels soient en
avance sur les programmes, on serait tenté de dire qu’il n’y a eu guère de changements.
3. Les
écoles et les courants scientifiques et pédagogiques : les fondements
épistémologiques auxquels s’est référé le programme
Au cours des années quatre- vingt, nos
pratiques pédagogiques ont vu arriver la pédagogie par objectifs ; en fait,
le mérite revient au programme de l’éducation en matière de population à
l’époque, qui a contribué à vulgariser
cette approche et à former les enseignants, en plus de la production et la distribution de livrets qui ont aidé les enseignants à
s’approprier la nouvelle approche qui se
réfère à l’école béhavioriste ;[4]
l’adoption de la nouvelle approche par nombreux enseignants
et inspecteurs, sans
réserves notables, s’explique, à notre avis, par le fait qu’elle
n’était ni parachutée, ni imposée ;
mais elle était le fruit d’un groupe d’éducateurs motivés, même les hésitations
des autres furent surmontées après leur
formation et leur encadrement ; ainsi,
l’approche finit par devenir une pratique courante, avant d’être de
devenir une pratique officielle appliquée dans les programmes , les
recommandations et les manuels scolaires ; et elle continue à être présente au niveau du
deuxième cycle de l’enseignement de base et de l’enseignement secondaire, après avoir été enrichie par la pratique des
enseignants et des inspecteurs qui ont eu des formations dans d’autres
approches, qui sont apparues après la pédagogie par objectifs.
Et, afin
de suivre l’évolution de la recherche scientifique et pédagogique, et dans le cadre de l’intérêt de plus en plus important accordé à ce qu’on appelle aujourd’hui la didactique, l’école
tunisienne, comme d’autres écoles ailleurs, s’est ouverte
sur de nouveaux courants qui s’inspirent du constructivisme[5]
et du cognitivisme, [6]
et sur les approches pédagogiques qui en
découlent , lesquelles s’intéressent beaucoup à la nature des savoirs et au rôle de l’apprenant dans la construction de
ces savoirs, comme elles s’intéressent
aussi aux cheminements intellectuels, affectifs
et sociaux qui accompagnent l’acquisition
des nouveaux savoirs, et la remédiation et des reprises que nécessitent
ces savoirs, et de la structuration continue des pré- requis nécessaires, ces théories étaient à l’origine de
l’approche par compétence que nous traiterons dans le prochain article ( à
suivre)
Amor
Bennour , Inspecteur général de l’éducation
bennour.amor@gmail.com
Traduction Hédi Bouhouch & Mongi
Akrout
Tunis, Octobre 2015.
Cliquer ici pour
accéder à la version AR
Articles publiés par le blog pédagogique sur le même thème
Bouhouch et Akrout . Les axes de la future réforme de l’éducation aux yeux du nouveau
ministre de l’éducation tunisien
http://bouhouchakrout.blogspot.com/2015/03/les-axes-de-la-future-reforme-de.html
Bennour, A. A propos de la
réforme du système éducatif -
Bennour, A. A propos de le réforme éducative : les
références juridiques
Bouhouch et Akrout . Rapport
de la commission sur l’enseignement secondaire[1] L’Action 18-9-1967
Jerbi,A. La politique éducative ou quelle politique éducative
pour quelle réforme de l'éducation?
http://bouhouchakrout.blogspot.com/2015/10/avant-propos-cette-semaine-le-blog.html
Boukhari . O. la gouvernance du système éducatif tunisien
[3] Les compétences transversales :
Dans
le langage pédagogique courant, la compétence transversale renvoie aux capacités,
et aux mécanismes cognitifs. On retrouve alors des opérations mentales comme
déduire, induire, synthétiser, comparer, par exemple ou encore les mécanismes
intellectuels qui figurent dans la taxonomie de Bloom (comprendre, appliquer,
analyser, transposer, interpréter, extrapoler, synthétiser, évaluer, ...). Dans
la même veine, on appelle aussi compétences transversales, des savoir-faire
méthodologiques (prendre des notes, structurer un discours, manipuler des
concepts et, d’une manière générale, maîtriser l’abstraction) Dans un registre
connexe, on appelle également compétences transversales, ce que nous avons
appelés attitudes, les savoir-être (pouvoir travailler un groupe, participer
aux institutions de citoyenneté, réaliser des projets personnels ou professionnels,
écouter un interlocuteur dont on ne partage pas les idées, être assertif, oser
parler en public, avoir de l’entregent, ...)[4].
Ainsi conçue, la
compétence transversale donne lieu à un débat parmi les didacticiens : la
compétence transversale existe-t-elle en elle-même, c’est-à-dire est-ce une
compétence identifiable et stabilisée (dont on peut établir un référentiel
comme dans le cas d’un cuisinier ou d’un chauffeur de poids lourds, par
exemple) ou est-ce un potentiel général susceptible de s’exprimer dans diverses
circonstances ?
[4]Pour « le béhaviorisme : enseigner c’est stimuler,
créer et renforcer des comportements observables appropriés.. Apprendre c’est Associer,
par conditionnement, une récompense à une réponse spécifique.. Les méthodes pédagogiques appropriées : Programme
d’autoformation assistée par ordinateur..
Anastassis
Kozanitis , les principaux courants théoriques de l’enseignement et de
l’apprentissage : un point de vue historique .
Bureau d’appui pédagogique , Page 5 ; Septembre 2005 École
Polytechnique
[5] Pour « le
constructiviste enseigner c’est offrir des situations obstacles qui permettent
l’élaboration de représentations adéquates du monde. Apprendre c’est construire
et organiser ses connaissances par son action propre. Les méthodes pédagogiques appropriées : Apprentissage
par problèmes ouverts, étude de cas.
Anastassis
Kozanitis , les principaux courants théoriques de l’enseignement et de
l’apprentissage : un point de vue historique . Bureau
d’appui pédagogique , Page 5 ; Septembre 2005 École Polytechnique
[6] Pour le cognitivisme enseigner
c’est présenter l’information de façon
structurée, hiérarchique, déductive.. Apprendre c’est Traiter et emmagasiner de
nouvelles informations de façon organisée.. Les méthodes pédagogiques appropriées :
Exposé magistral, résolution de problèmes fermés.
Opt
cite
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