lundi 18 janvier 2016

L’histoire des réformes scolaires en Tunisie, depuis l’indépendance (Chapitre 3) : Evaluation de la réforme de 1958 et les tentatives d’adapter le système à l’évolution continue de la réalité : Les réformes de la période de 1967 à 1969




« …L’organisation actuelle de notre enseignement pose des problèmes que nous devons examiner avec courage et lucidité .Il est normal, qu’au bout d’une expérience de dix ans, une révision de notre système s’avère nécessaire… »
  Habib Bourguiba, Président de la République, le 31 janvier 1967[1].


Avant propos
La loi de 1958 est restée en vigueur, du point de vue juridique, jusqu’au 29 juin 1991, date de son remplacement par la nouvelle loi de la deuxième grande réforme éducative, (1991), dans l’histoire de la Tunisie indépendante.
Mais, entre 1968 et 1988 le système éducatif a connu plusieurs réformes qui ont cherché à adapter le système à l’évolution de la réalité, sans toucher pour autant la loi de 58.  Parmi ces réformes, on peut citer les réformes de 1969 avec le ministre Ahmed Ben Salah, suivie par les réformes de Mohammed Mzali au cours des années soixante -dix ; enfin la dynamique de la fin des années quatre vingt qui a préparé le terrain à la deuxième grande réforme de 1991[2].

      I.            Le contexte des réformes de 1967
En 1967, la réforme s’approche de la fin de sa première décennie, et le plan décennal de développement éducatif, qui couvre la période de l’année scolaire 1959- 60 à l’année scolaire de 1968- 69, approchait de son terme.
Le gouvernement décida d’anticiper et de lancer une grande opération d’évaluation, dans un contexte marqué par un malaise et une crise qui a touché le pays :
Sur le plan intérieur, le pays traversait une crise économique, suite à l’échec du modèle de développement adopté par le congrès du parti au pouvoir, ( le néo- Destour), qui a opté pour le système coopératif, dont l’architecte  était le ministre Ahmed ben Salah ; le pays a connu des mouvements de contestations populaires et des mouvements des étudiants, en juin 1967,  après le congrès de Korba de l’union générale des étudiants tunisiens ( UGET), et l’émergence d’organisations de tendances gauchistes, et d’autres fervents du nationalisme arabe. Toute cette agitation a inquiété le régime.

Sur le plan international, le contexte fut marqué par la guerre israélo-arabe et par la défaite des armées arabes ; la débâcle avait aggravé la division des dirigeants arabes sur la question palestinienne ; la plupart d’entre eux étaient hostiles à l’approche du président Bourguiba qu’il a exprimée, lors de sa visite en Palestine en 1965, (discours de Jéricho) ; même la rue de Tunis a manifesté son hostilité à la position de son président. 
      I.            L’évaluation de la réforme de 1958.
a.   La mission de la commission d’évaluation et les motifs du diagnostic.
En 1967, c'est-à-dire huit ans après ses débuts, une vaste opération d’évaluation de la première réforme scolaire[3] est lancée par le chef de l’état, au cours de la première réunion de la commission constituée spécialement pour cette tâche, le 31 janvier 1967. Le président de la république a fait le constat suivant : «  …l’organisation actuelle de notre enseignement pose des problèmes que nous devons examiner avec courage et lucidité .Il est normal, qu’au bout d’une expérience de dix ans, une révision de notre système s’avère nécessaire »  Il avait précisé sa mission dans les termes suivant « nous devons examiner, un à un, les problèmes concrets, et essayer de leur trouver des solutions adéquates ; ainsi par exemple , les déchets de l’enseignement primaire sont très importants. …C’est un problème qui mérite d’être sérieusement examiné ; certains mettent en cause le niveau des maîtres, la conception des programmes ou la surcharge des classes ; nous devons examiner tous ces éléments, et trouver des remèdes… » Il a appelé la commission à donner son avis sur le rythme actuel de la scolarisation, et s’il faudrait le maintenir ou le ralentir ? Et sur le rendement de l’école, le président a insisté sur le fait, qu’aujourd’hui, la question qui se pose aux responsables du pays est si la réforme en cours est en train de « rapprocher le pays de ses objectifs, et s’il est possible de le rapprocher à moindre frais, ou plus rapidement aux mêmes frais ? »[4] 
La commission de l’enseignement présidée par Ahmed Ben Salah, le secrétaire général adjoint du parti, fut scindée en trois sous- commissions : une pour l’école primaire, la deuxième pour l’enseignement secondaire, et la troisième pour l’enseignement supérieur.
b.    Les conclusions de la commission
2.1- Au sujet l’enseignement primaire[5]
La commission avait traité toutes les questions en rapport avec l’école primaire tels que la langue d’enseignement, le rendement de l’école et des enseignants ; elle a commencé par établir un diagnostic, et elle a avancé des recommandations pour chaque thème.
a.     Au sujet de la langue [6]:
La commission « a estimé qu’il importe de rester fidèle à l’option fondamentale, déjà adoptée, qui a fait de l’arabisation de l’enseignement un objectif national devant aboutir, à l’épanouissement de la personnalité tunisienne, et à l’authentification de notre civilisation auprès des générations auxquelles s’adresse cet enseignement ». La commission «  croit profondément à la nécessité de maintenir notre civilisation ouverte à tous apports humains , grâce à l’enseignement les langues vivantes et à la connaissances des littératures étrangères » …Dans cette optique, la commission «  fait observer que l’emploi  de la langue française,  pour l’enseignement des sciences, est  une nécessité inéluctable,   dans cette phase  transitoire que traverse notre pays, en attendant que soit consolider  les bases de  notre université et renforcer les structures de notre enseignement national.
Sur cette base, la commission a fait les trois recommandations suivantes :
¨     Le maintien de l’arabisation de l’enseignement dans les premières années du cycle primaire.
¨     Poursuivre l’usage des deux langues « dans les années suivantes du cycle primaire, une fois que l’enfant se sera familiarisé avec la langue nationale »
¨     Exiger un diplôme d’arabe ou des études en arabe à l’échelle de l’université, de tout candidat à une licence, qu’elle soit de lettres, ou de sciences ; ainsi se formera un cadre universitaire capable d’enseigner toutes les disciplines et de rédiger en arabe.
b.    Le rendement de l’enseignement
La commission a estimé que le rendement du cycle primaire «  laissait à désirer, le nombre des élèves qui accèdent aux cycles secondaire et moyen ne dépasse pas 40% de l’effectif total, en dépit de la complaisance manifeste  à l’examen ; elle a constaté également qu’un pourcentage considérable d’élèves ne réussit pas à poursuivre l’enseignement moyen, et que rien n’a été prévu pour récupérer » et les préparer à affronter la vie,  avec des chances de réussir ; les études ont révélé qu’un  l’élève passe en moyenne 8 années, au lieu de six, et que le taux de redoublement  avait atteint 30.5%,  au cours de l’année scolaire 1967/68, et le taux d’abandon approchait 7%.
Au vu de ce diagnostic très inquiétant, la commission avait formulé les quatre propositions suivantes :
·       « Fixer pour objectif à l’enseignement primaire ( EP) de faire parvenir tous les élèves au terme de cet enseignement, afin de leur assurer l’accès à un autre cycle d’enseignement ou de formation. »
·       « Orienter les élèves qui terminent avec succès l’EP vers l’une des sections de l’enseignement secondaire(ES) : scientifique, littéraire, technique, agricole ou économique » 
·       Orienter les élèves qui ont obtenu des moyennes insuffisantes pour accéder au cycle secondaire vers la formation professionnelle ( FP) industrielle, commerciale ou agricole pour en faire des ouvriers qualifiés ou spécialisés »
·       Diriger tous les défaillants au niveau de la sixième année vers l’apprentissage d’un métier pour en faire des ouvriers habiles capable de s’intégrer dans un circuit productif. »

c.     Le cadre enseignant
La commission constate que «  la généralisation de l’enseignement et la multiplication  du nombre des écoles ont imposé au secrétariat d’état un recrutement intensif des instituteurs, mais les prévisions du plan décennal de l’éducation estimaient que les besoins ne seront couvert qu’en 1971 ; et comme les écoles normales ne formaient pas encore suffisamment d’instituteurs et « qu’un nombre d’instituteurs expérimentés ont été détaché à l’enseignement secondaire, force a été de recourir au recrutement de catégorie de moniteurs qui n’avaient pas les compétences nécessaires et la qualité de l’enseignement n’a pas manqué de s’en ressentir. »[7]


La commission a fait les six recommandations suivantes :
·       « Se passer des moniteurs et notamment de ceux qui n’ont pas réussi à s’adapter à la fonction d’enseignant, et les reclasser dans d’autres fonctions. »
·       « Renoncer au recrutement de jeunes gens ne justifiant pas de cinq ans d’études secondaires au moins, sauf nécessité impérieuse, et sous réserve de les former valablement ».
·       « Définir une méthode rationnelle pour relever le niveau culturel et professionnel des moniteurs, afin de déceler les éléments doués, et en permettre au plus grand nombre possible de s’intégrer dans le cadre instituteurs »
·       « Dispenser les directeurs des écoles de la gestion des cantines scolaires pour qu’ils se consacrent à la direction de leur établissement et des questions pédagogiques »
·       « Encourager les jeunes à faire carrière dans l’enseignement, par des mesures incitatives comme :
-      Le reclassement de la fonction d’enseignant dans le cadre de la fonction publique
-      Révision des méthodes d’orientation vers les écoles normales en laissant le champ libre au choix spontané basé sur la conviction intime des intéressés et sur la noblesse attachée à la carrière d’éducateur. »
-      Concession de certains avantages matériels en sus de la gratuité
-      Possibilité pour les meilleurs éléments des écoles normales d’accès au concours d’entrée à l’école normale supérieure et à l’école des professeurs adjoints »
·       Augmenter le nombre des inspecteurs et des inspecteurs- adjoints et réviser les méthodes de leur recrutement en adoptant le voie du concours ».
d.   La taille des classes[8] : les études ont monté que l’effectif par classe est élevé ; la moyenne en première année est de 46.35 ; elle baisse en fin de cycle pour atteindre 36.15[9], mais cette moyenne cache des réalités différentes selon les régions du pays ; en effet, la moyenne atteint parfois 50 et même 60 dans les écoles de la ville de Tunis, alors qu’elle chute à 30 dans les écoles de Sfax ou de celles de Gabès.
Si la commission considère que la taille des classe est parmi les facteurs qui pourraient affecter la qualité de l’enseignement , elle n’en voit pas moins que la taille maximale de la classe ne devrait pas dépasser 40 ou 45 élèves ; bien qu’elle était consciente qu’une telle mesure implique une augmentation au niveau des salles er au niveau des enseignants, la commission a recommandé de  ne pas dépasser  44 élèves  par classe, et de faire une enquête générale pour avoir des données précise par gouvernorat et par milieu .


e.     Les programmes d’enseignement
La commission a préféré confier les questions des programmes et de l’horaire et sa distribution à des commissions techniques spécialisées, mais elle a néanmoins attiré l’attention sur trois aspects qui sont :
¨    l’insuffisance de l’éducation sociale (religieuse, morale et formation civique)
¨    l’horaire trop court impartie à l’enseignement de certaines matières fondamentales telles les langues et le calcul ; ce qui oblige souvent l’instituteur de sauter certaines phases que chaque leçon doit théoriquement comporter : (la révision, l’exposé et les exercices d’application).
¨    « l’absence des travaux manuels et des enseignements pratiques, ce qui donne à notre enseignement un caractère théorique et abstrait, et qui pousse les élèves à tourner le dos à l’enseignement professionnel… »
La commission présenta dans ce domaine quatre recommandations :
·       « Réserver dans les programmes de tous les niveaux une large place aux travaux manuels et aux exercices de travaux pratiques qui inculquent à la jeunesse l’amour de l’effort, de la production, de la mise en valeur de la terre et le désir d’acquérir habileté et tour de main ».
·       « Etablir une relation très étroite entre les programmes scolaires et le milieu social et économique de l’élève, de telle sorte que l’élève aura, dans les régions rurales, à pratiquer en cours de sa scolarité des travaux agricoles et d’élevage … de même que l’élève aura dans les villes et les villages à mettre en œuvre ses connaissances scolaires en pratiquant les métiers en honneur dans son milieu. »
·       « Construire, dans toutes les écoles, des salles équipées en vue des travaux manuels ainsi que des jardins scolaires dans les écoles rurales et des centres d’élevages … »
·       « Recourir à la télévision pour l’organisation de cours types destinés aux enseignants en vue de perfectionner leurs méthodes. »
f.      L’horaire hebdomadaire
La commission a considéré que l’horaire actuel est « nettement insuffisant » ( 15 h en 1er année, et 25 h pour les autres niveaux ; voir tableau ci-dessous), et elle a recommandé de le revoir vers la hausse, « pour répondre à un besoin urgent d’agir rapidement sur les résultats l’enseignement primaire et  de relever le niveau des élèves candidats à l’enseignement secondaire et de les mieux préparer à suivre ses programmes. La commission a recommandé d’augmenter l’horaire de 5 heures pour tous les niveaux, d’une façon échelonnée en commençant par la 6ème, afin de renforcer la formation de ces élèves en français et en calcul, car l’examen de la sixième a révélé trop de lacunes chez certains élèves .Cet avis n’a pas obtenu l’unanimité de tous les membres de la commission ; certains membres « proposaient de commencer par la première année pour remonter jusqu’à la sixième. Cette proposition fut rejetée car elle fait retarder de six ans les effets de la réforme, et que si on choisit de commencer par le bas les besoins en instituteurs triplera car la 1er renferme le plus gros des élèves. »
g.    Le manuel scolaire
Il faudrait rappeler que les manuels scolaires, sous le protectorat, provenaient de la métropole pour les matières enseignées en français, et de l’orient arabe pour les matières enseignées en arabe.
La commission a relevé le manque de manuels scolaires destinés aux écoles primaires, sauf en manuels de lecture. La commission expliqua ce manque par le « peu d’empressement des auteurs, et par les difficultés de l’impression et de l’édition. Pour faire face à cette situation, la commission a fait quatre propositions :
·       Réviser les méthodes de contrôle des manuels, et créer à cet effet un comité national composé d’enseignants aux compétences confirmées… qui aura la tâche de susciter des vocations d’auteurs valables, et de provoquer dans leurs rangs une saine émulation. »
·       Organiser l’édition et la diffusion pour obtenir le livre le meilleur, au meilleur prix, et dans les meilleurs délais. »
·       Assurer la tunisification du livre scolaire, pour en faire, par ses textes, par l’image qu’il donne de la vie, par sa présentation un instrument  adapté au caractère évolutif de la science et de la civilisation dans le monde. »
·       Consolider le manuel par d’autres moyens didactiques (moyens audio- visuels, images fixes, magnétophones, télévisions, cartes…) pour mieux expliquer les leçons et aider à l’assimilation.»

2.2 - A propos de l’enseignement secondaire[10]

a.    Enrichir les objectifs de l’enseignement secondaire
La commission de l’ES a tenu, d’abord, à confirmer les trois objectifs déjà définis par la loi de 1958, et plus précisément par l’article 14.( assurer aux jeunes une formation et une culture générale, former les cadres moyens techniques ou non spécialisés nécessaires à tous les secteurs d’activité, découvrir les sujets doués et aptes à poursuivre des études supérieures).
La commission a proposé d’ajouter d’autres objectifs que l’ES devrait chercher à atteindre, comme l’objectif « d’inculquer à la jeunesse tunisienne une culture authentiquement tunisienne ; et adopter des programmes et des méthodes en symbiose avec l’évolution scientifique du monde moderne qui est en progrès constant, et enfin répondre, dans la formation des cadres, aux exigences des plans de développement nationaux, dans leurs lignes directrices ».
b.    Appel à regrouper l’ES sous une même autorité administrative
La commission a noté « la grande diversité des établissements secondaires, (comme ce fut le cas sous le protectorat), qui dépendaient de départements différents ; les uns dépendaient du secrétariat d’état à l’éducation nationale, les autres de secrétariat d’état à l’agriculture, ou du secrétariat d’état à la santé publique. »
La diversité se manifeste aussi pour l’enseignement secondaire géré par le département de l’éducation nationale, puisque on trouvait trois filières différentes dans l’enseignement secondaire : les sections A, B et C, en plus des sections normales A et B dans les lycées, alors qu’existaient des institutions spécialisées dans la formation des maîtres (les écoles normales des instituteurs et des institutrices).
« En plus de cette dispersion, la commission a constaté que l’enseignement secondaire général s’est développé, et a évolué au dépens de l’enseignement technique et agricole.
Pour pallier à cette situation, et permettre à tous les types d’enseignement secondaire d’évoluer sur le même rythme, la commission a recommandé l’unité des structures, et de mettre tous les établissements secondaires l’ES sous la même tutelle administrative et pédagogique, à l’exception des écoles de santé qui garderont leur statut, pour des raisons particulières.
c.     La durée de l’enseignement secondaire
La commission fait observer que l’horaire hebdomadaire en vigueur rend compte de la surcharge des programmes, qu’il est difficile d’achever dans de bonnes conditions. En conséquence, la commission propose d’allonger les études secondaires sur sept ans, au lieu de six ans en vigueur, afin d’assurer aux élèves une maturité d’esprit plus grande, et de confirmer leur aptitude à affronter avec succès les études supérieures ».
d.    La question de l’orientation :
La commission s’est intéressée à la question de l’orientation scolaire ; elle a étudié les résultats de l’opération dans sa forme actuelle, c'est-à-dire une première orientation à la fin de la première année où l’élève est orienté vers l’une des trois filières de l’ES (général/ technique/économique), suivie d’une deuxième orientation à la fin de la troisième année où l’élève est orientée vers l’une des sections suivantes : lettres, sciences, technique, économie, normale).
L’évaluation du  procédé a montré ses limites, et même son inefficacité dans sa version actuelle ; la commission estime que l’orientation doit jouer un rôle actif, en stimulant les aptitudes et les énergies, et non en prenant actes de ces aptitudes pour s’en servir comme référence, pour répartir les élèves sur les différentes sections, compte tenu des besoins du pays en cadres. »   La commission propose de changer le calendrier de l’orientation, en décalant la première à la fin de la 3ème année, et la 2ème à la fin de la 4ème, au lieu de la troisième année.
e.     Révision de la structure de l’enseignement secondaire
La commission a constaté que la structure actuelle de l’ES souffre d’une disparité, et qu’il est nécessaire d’unifier les étapes, les cycles et les sections de cet enseignement. Et c’est dans cette optique qu’elle proposa :
¨    Le « maintien des deux cycles existants de l’ES ( le premier et le deuxième cycle), mais en revoyant la finalité de chacun des cycles :  le 1er cycle sera un tronc unique pour tous les élèves de l’ES ; son objectif est de donner à l’élève issu de l’école primaire  une formation de base solide, et de l’habituer à fournir un effort  diversifié et équilibré , et de le doter d’un esprit scientifique et technique, en accordant à l’enseignement scientifique, pratique et technique, la  place qui lui convient dans les programmes de ce cycle ». Quant au deuxième cycle, il doit comporter un enseignement basé essentiellement sur les aptitudes des élèves, et se répartit en quatre sections ( générale, technique, agricole, économique) ; la commission prévoit de ramifier ces 4 sections selon les spécialités vers lesquelles seront orientés les élèves dans le cadre de la deuxième orientation … Ainsi, les trois dernières années de l’ES seront centrées sur les matières de la spécialité choisie ».
f.      La formation des enseignants de l’ES : la commission affirmait que «  l’institution d’un enseignement secondaire moderne et dynamique que si les cadres (enseignants) sont à la mesure de leurs responsabilités ; » or, «  le pays manque de cadres dans l’enseignement en général, et dans le cycle secondaire en particulier, et qu’il est impératif de trouver des solutions rapides à ce problème ; c’est dans cette optique que  la commission a proposé de :
-      remplacer la section dite  « normale »  par des classes qui seront appelées « pédagogiques », pour former les enseignants pour tous les cycles ; cette filière devrait attirer une élite d’élèves vers le métier d’enseignant ;  « cette section  servira de creuset où se formeront les élites ; elle doit  permettre d’accéder à l’école normale supérieure ou à l’école normales des professeurs adjoints, ou bien d’exercer directement le métier d’instituteur, après le baccalauréat ;la commission pense, qu’avec cette nouvelle forme, « la formation pédagogique sera unifiée et harmonieusement conçue  pour tout le corps enseignant qu’il soit primaire , secondaire ou supérieur .»
-      remettre en question les conditions d’accès à l’école normale supérieure ; seuls doivent y être admis les candidats faisant preuve d’aptitudes laissant prévoir qu’ils atteindront les échelons les plus hauts de l’enseignement supérieur. »
-   Etablir un plan précis pour former les professeurs de l’enseignement secondaire, et que le secrétariat d’état à l’éducation nationale commence à le mettre en application, sans plus tarder.
g.    Créer un cycle d’enseignement professionnel : la commission propose de créer un enseignement secondaire professionnel d’une durée de quatre années, qui sera dispensé dans les établissements annexés aux établissements secondaires pour former « les cadres de base dans les domaines agricole, industriel et commercial »; la commission n’a pas précisé les conditions d’accès à cette filière, mais il semble qu’il est conçu pour remplacer l’enseignement moyen.
Telles sont les grandes lignes du nouvel enseignement secondaire conçu par la commission, c’est un enseignement composé de deux types principaux :
L’enseignement secondaire long qui dure 7 ans, constitué de deux cycles ; le premier est un tronc commun de 3 années au terme duquel les élèves sont orientés vers trois options : général, technique et économique ; le deuxième cycle de 4 années est un cycle de spécialisation ; les élèves sont répartis sur quatre grandes filières (générale, technique, agricole et économique).
L’enseignement secondaire professionnel qui dure 4 ans destiné à la formation de cadre de base dans les domaines agricole, technique et commercial.

h.    La question des programmes, de la langue d’enseignement et des manuels scolaires
La commission a estimé que la nouvelle organisation de l’ES (étalement, nouvelles filières…) impose naturellement une refonte des programmes qui sera la tâche des commissions techniques ; néanmoins, la commission a avancé quelques recommandations d’ordre général, comme :
-      La création d’un organisme chargé des études pédagogiques qui pourrait être chargé, entre autre, de la question des programmes scolaires
-      La nécessité de réviser les contenus des manuels en vigueur, à la lumière des réformes qui seront décidées.
-      La nécessité pour le secrétariat d’état d’étudier la question de l’arabisation de l’enseignement secondaire …en s’inspirant des principes qui ont été à l’origine de la section -A-  

A suivre 


Hédi Bouhouch & Mongi Akrout , Inspecteurs généraux de l’éducation
Tunis, octobre 2014


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[1] Extrait du discours du président de la république le 31 janvier 1967 à l’occasion du démarrage des travaux de la commission chargée d’évaluer le système éducatif , publié par le journal le petit matin , Annuaire de l’Afrique du nord, VI , 1967 , CNRS  France 1977 .
[2] Loi 91 - 65  du 29 juillet 1991 relative au système éducatif, jort n°55 du 6 août 1991

[3] le 17 janvier 1967 le parti socialiste destourien a institué ,dans le cadre de la commission des études socialistes, la sous- commission de l’enseignement présidé par le secrétaire général adjoint Ahmed Ben Salah,  avec pour mission «  d’évaluer l’état de l’enseignement et proposer ce qu’on peut garder et ce qu’il faudrait changer », les travaux de la sous- commission se sont étalés sur trois mois , ( études des rapports des régions et de leurs propositions  , analyse des rapports du corps enseignant, les parents les cadres du parti, les statistiques du secrétariat d’état à l’éducation) ; au mois de juillet 1967,  la sous- commission a remis le premier rapport  réservé à l’enseignement primaire qui a été publié le 1°  Juillet par les journaux Assabah et Echaab,   suivi  du 2ème rapport sur l’enseignement secondaire, en septembre   .
[4] Discours du 2 février 1967 devant la commission de l’enseignement paru au journal le Petit Matin
[5] Le rapport de la commission a traité 10 thèmes dans l’ordre qui suit : la langue et les méthodes de l’enseignement, l’avenir des élèves, le cadre enseignant et l’orientation, l’allègement de l’effectif des classe, les programmes, l’horaire hebdomadaire scolaire, les manuels scolaires, l’âge de la scolarisation, la généralisation dans le cycle primaire de la mixité, la durée de la scolarité au primaire.
[6] Nous nous référons au rapport publié par le journal l’Action du 4 juin 1967 , reproduit pat l’Annuaire de l’Afrique du nord( opt cité)
[7]  Au cours de l’année scolaire 1969/70 , on comptait 17200 enseignants exerçant à l’EP  dont 8550 instituteurs et 2625 moniteurs 1er ordre et 6025 moniteurs 2ème ordre , sur le total 9440 étaient des enseignants temporaires , en 1968/69 sur 16200 enseignants au primaire 20% seulement avaient le niveau de la première partie du bac-  rapport de l’Unesco - 1970, au cours de l’année scolaire 1966/67 , on comptait encore 1415 instituteurs français dans les écoles tunisiennes ( les tunisiens : 13429) à l’ES ,ils étaient 3608  étréngers et  français et 2574 tunisiens- Michel Lelong , 1968 , P 29.

[8] Les données sont prises à partir du rapport d’évaluation fait par l’Unesco en 1970 ; p 8.
[9] La moyenne de la taille des classes était de 43 .37 en 2ème , 40.84 en 3ème , 39.06 en 4ème et  37.49 en 5ème.

[10] Nous nous référons au rapport publié par le journal l’Action du 16 septembre  1967 , reproduit pat l’Annuaire de l’Afrique du nord( opt cité)

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