Après
avoir évoqué les travaux de la commission nationale de l’enseignement
secondaire et ses principales recommandations, nous consacrons la note de cette
semaine aux différentes mesures qui avaient
été prises
par le ministre Mahmoud Messadi et
puis par son successeur le ministre Ahmed
Ben Salah entre 1968 et 1969 .
( pour accéder à la première partie , CLIQUER ICI)
( pour accéder à la première partie , CLIQUER ICI)
III.
L’impact des travaux de la commission et
le devenir de ses recommandations
En lançant les travaux de la commission,
le président de la république avait insisté sur l’urgence de sa mission :
« vos travaux ne doivent pas trainer en longueur ; ils doivent aboutir à
des résultats concrets … au plus tard fin avril… Ses conclusions seront
communiquées, pour avis, au bureau politique, et au conseil de la république. Les
réformes qui seront adoptées devront entre en vigueur dès la prochaine rentrée. » Ces directives présidentielles furent respectées à
la lettre, et la rentrée scolaire 1967 - 68 a vu les premières réformes sous la
houlette de Mahmoud Messadi ; elles vont prendre de l’ampleur et de la
vitesse avec le nouveau responsable du département de l’éducation nationale,
Ahmed ben Salah, président de la commission de l’enseignement.
1.
Les premières mesures sous la direction
de Mahmoud Messadi
Au cours de la conférence de presse
consacrée à la rentrée scolaire 1967/68, le secrétaire d’état à l’éducation
nationale annonça une série de mesures qui traduisaient, sur le terrain,
certaines recommandations de la commission ; ces mesures ont touché les
deux degrés :
1.1-
Les réformes de l’enseignement
primaire :
§
Le retour au régime de 30h en 6° (ce retour était
prévu pour octobre 1968 d’après le plan quinquennal de développement éducatif, la recommandation de son élargissement
à tous les niveaux n’a pas été retenue pour des raisons matérielles ; elle
est reportée à la rentrée1969. Cependant, les « inspecteurs ont été
invité à étendre immédiatement à autant de classes que possible le régime de 30
heures d’après le Ministre.
§
Le principe de la réduction du nombre d’élèves par
classe est retenu, mais son application était pratiquement irréalisable par
manque de salles et d’instituteurs, et l’augmentation du nombre des élèves.
§
Extension de la mixité dans en 1er ,2ème, 3ème
et 4ème dans la mesure du possible, il faudrait signaler que la
mixité était déjà pratiquée dans plusieurs écoles.
§
Constitution de deux commissions de réflexion : la
première pour étudier les méthodes pédagogiques adéquates pour l’enseignement
du calcul en 3ème, qui est enseigné depuis cette classe en français,
et la seconde pour l’organisation et les programmes de cours de
perfectionnement à l’usage des moniteurs.
§
Consolidation du corps des inspecteurs pédagogiques et
la réduction de ses charges administratifs, afin qu’il puisse se consacrer aux
questions pédagogiques, et surtout à la formation des instituteurs et leur mise
à niveau, sur le plan scientifique et professionnel ; pour seconder
le corps de l’inspection, le secrétariat d’état a nommé 250 conseillers ou
assistants pédagogiques pour encadrer les nouveaux recrus.
§
Création d’une bibliothèque pédagogique dans chaque circonscription.
1.2
- Les réformes de l’enseignement du
second degré
§ Prolongation de la durée de
l’enseignement secondaire d’une année, la durée devient de 7 années au lieu de
six ans.
§ Rattachement de l’enseignement agricole
à l’éducation nationale et unification de l’enseignement secondaire, en mettant
un terme à la section A (arabe) et la section - C - (française) et la
généralisation de la section B (bilingue)
§ Institution d’un tronc commun de 3 ans, et
d’une première orientation à la fin de la 3° année vers cinq
sections : générale, pédagogique (normale), technique, économique, et
agricole. Le démarrage de ce régime est décidé pour le mois
d’octobre 1967 avec un nouveau programme et un nouvel horaire pour les mathématiques
et une nouvelle répartition des disciplines techniques.
§ Suppression de l’enseignement moyen et
son remplacement par l’enseignement secondaire professionnel, d’une durée de 4
années[1] et comprenant trois
sections : industrielle, agricole et commerciale. (ainsi la section
générale de l’enseignement moyen disparait de la carte scolaire)
Les autres questions relatives à la
réforme des programmes, de la révision de l’horaire, celle de l’arabisation de
l’enseignement secondaire, le manuel scolaire… ont été confiées à des
commissions techniques pour études.
2.
L’œuvre du nouveau ministre de
l’éducation Ahmed Ben Salah
A la fin du mois de juin 1968, un
remaniement amena Ahmed Ben Salah[2], le président de la commission
nationale de l’enseignement au département de l’éducation nationale à la place
de M. Messadi.
Ce changement va amener des réformes plus
profondes ; il ne s’agissait plus de simples mesures de rectifications,
mais d’une « révision profonde au niveau des objectifs et des choix »,
disait Ben Salah, dans une entrevue donnée à Jeune Afrique, le 23 septembre 1968,
et ajoutant que la « commission avait repensé les finalités et les
méthodes d’enseignement ».
Dès
les premières semaines de son mandat, le nouveau secrétaire d’état avait
multiplié les réunions et les rencontres[3] avec toutes les
composantes de l’éducation nationale pour « réfléchir à la première
étape de notre œuvre commune relative aux questions de l’enseignement, et afin
de mettre en application les recommandations de la commission nationale
et les orientations définies par le combattant suprême dans ce domaine ».[4]
2.1-
La stratégie de la réforme de Ben Salah
Au fils de ses différents discours se
dégagent les grandes lignes du plan de réformes de Ben Salah, qui devrait se
réaliser en deux temps ou deux étapes :
a.
La première commença à la rentrée scolaire1968 -1969, il s’agit d’une étape essentiellement
de préparation et d’organisation[5] « qui prépare à
introduire quelques remaniements (changements) au niveau des structures de
l’enseignement »[6] ; c’est dans ce cadre
que s’inscrivent les mesures administratives et pédagogiques qui ont été décidées
et qui sont entrées en application rapidement.
§ les mesures
administratives
- La création de
nouvelles directions centrales[7] : la direction de l’enseignement
supérieur et de la recherche scientifique, la direction de l’administration scolaire, la direction de l’action
sociale, les services économiques et administratifs, direction des relations
extérieures, la mission des ces directions centrales est une « mission de contrôle,
d’orientation et de planification»[8] .
- La fondation
d’un institut national des sciences de l’éducation avec pour mission de développer la
recherche dans le domaine de l’éducation et faire évoluer les méthodes
d’enseignement en Tunisie et « de suivre de près les expériences
pédagogiques en cours et de concevoir de nouvelles méthodes susceptibles
d’améliorer le rendement de l’enseignement ».
-
L’installation d’une
direction régionale de l’enseignement dans chaque gouvernorat et
la nomination de 13 directeurs régionaux[9] choisis parmi les meilleurs directeurs
ou censeurs de lycées , ces directions devraient prendre en charge les affaires administratives et les questions
d’organisation de l’enseignement au niveau de la région et elles doivent surtout travailler pour améliorer
le niveau de l’enseignement dans la région « chaque directeur régional
est appelé à organiser le travail de manière à dégager clairement l’état de
chaque école, le travail de son directeur et . جهويّ مدعوّ إلى تنظيم
هذا لعمل تنظيما كفيلا بأن يُبرز، بشكل واضح، وجهَ كلّ مدرسة ومديرها والمسؤولين
بها وبقية معلّميها عن رفع المستوى."[10] Ce n’est pas clair
- La consolidation du corps des
inspecteurs pédagogiques par la nomination d’un inspecteur
régional de l’enseignement primaire dans chaque gouvernorat dont « la mission … , reste
essentiellement et fondamentalement une
mission pédagogique…»[11]
( formation et l’encadrement des
instituteurs des directeurs d’écoles ) et par la nomination d’un
inspecteur de l’enseignement de français dans chaque circonscription pour
former et encadrer les instituteurs chargés
de l’enseignement du français , et
les conseillers pédagogiques, on fit appel aux instituteurs français coopérants qui sont encore affectés
en Tunisie pour se charger de l’assistance pédagogique.
Chaque circonscription fut dotée d’un
noyau de bibliothèque pédagogique et scientifique afin de rapprocher les
ouvrages et les ressources nécessaires de l’inspecteur et de
l’instituteur.
En outre il fut décidé de réduire les
charges administratives qui étaient dévolues aux inspecteurs surtout après la
création des directions régionales.
Et pour seconder le corps de
l’inspection, le secrétariat d’état a nommé 250 conseillers ou assistants
pédagogiques pour encadrer les nouveaux recrus.
- La décision de décharger en partie, dans
la mesure du possible, « les directeurs des grandes écoles primaires … pour s’occuper de la pédagogie en leur
affectant un secrétariat administratif ,
ce qui leur permet de se consacrer davantage à l’encadrement des jeunes
instituteurs et des moniteurs et les
aider à rehausser leur niveau et à bien connaitre leur métier »[12], les directeurs seront aussi appelés
à « s’occuper des élèves en
difficultés comme les redoublants qui ne trouvent peut être pas l’aide dont ils
ont besoin auprès de leurs parents , il est nécessaire de s’en occuper au
niveau de chaque
région »[13] , le secrétaire d’état « insistait sur le fait que la
mission des directeurs est foncièrement une fonction éducative , elle
consiste avant tout à enseigner , à assister et à aider les instituteurs qui
ont besoin de conseils et de soutiens »[14] .
D’ailleurs la direction des affaires
pédagogiques a été chargé de « préparer
une circulaire qui fixe d’une façon détaillé la responsabilité du directeur en
tant que responsable pédagogique des instituteurs qui travaillent avec lui et
en tant que responsable de la bonne marche de son école de façon générale »
selon les vues de la réforme scolaire ; « nous souhaitons que ça ne soit pas une simple circulaire,
mais plutôt un important document qui balise les voies et clarifie les méthodes
de travail »[15].
- L’affectation d’instituteurs
confirmés dans les
écoles rurales pour
encadrer les moniteurs
et améliorer leurs compétences et leur rendement, ce qui va contribuer à réduire
les écarts entre les écoles du milieu urbain dans celles du milieu rural.
- La
suppression, à partir du 1er octobre 1968, des anciennes appellations : écoles de garçons, écoles de
filles et écoles mixtes, désormais les écoles seraient appelés « école du
premier degré »[16] dans le cadre de
l’extension de la mixité qui a commencé déjà en octobre 1967 en application à
une recommandation de la commission nationale de l’enseignement.
§ les mesures
pédagogiques annoncées à la rentrée de 1968-69
A coté des différentes mesures d’ordre administratif,
la première étape a connu aussi nombres de mesures d’ordre pédagogique
dont :
- L’adoption
d’un nouvel horaire pour l’école primaire [17] : 25 heures pour les 5 premières années et 27 heures 30
pour la 6ème , cette mesure devrait entrer en vigueur dès la rentrée
de 1968 et toucher toutes les classes de 6ème sans exception et sur
tout le territoire du pays » ( Il est bon de rappeler que Messadi avait décidé 30 h pour la classe de 6ème
année).
- Renforcement
de la langue française ; avec le retour du français dès la première année du
primaire avec 10 heures par semaine[18] sur un total de 25 H , (cette
décision remet en question celle prise par Messadi, sur recommandation de la commission) et l’utilisation
du français pour enseigner les matières scientifiques et techniques à
partir de la classe de 4ème .
-Suppression du certificat de fin
d’études primaires
dont l’utilité n’est plus d’après le ministre qui annonça la décision au cours
d’une réunion[19].
b.
La deuxième étape de la stratégie de la réforme :
C’est celle qui va permettre à Ben Salah « après études, consultations
et réflexions, d’entreprendre des remaniements dont certaines toucheront le
fond des contenus de l’enseignement en Tunisie » [20] , c’est l’étape
« de mise en œuvre du plan de relèvement du niveau, de l’application
des nouveaux programmes et du développement de l’esprit qui aspire à faire
évoluer l’enseignement » , Ben Salah disait à ce propos « nous comptons étudier la plupart
des sujets avant la fin de l’été , excepté la question des programmes et des
contenus dont l’étude nécessite une année entière , nous allons passer l’année
scolaire 1968-1969 à approfondir l’étude des problèmes de l’enseignement de
tous les degrés … pour faire de notre système éducatif… une expérience
pilote de renaissance de l’enseignement , de sa démocratisation et de sa
généralisation »[21].
cette deuxième phase « sera
suivi ,l’année prochaine c'est-à-dire en
1968-69 par une étape de révision de tous
les faces de notre politique
éducationnelle et de ses contenus dans les trois degré du système…cette
révision nécessitera un large et profond effort collectif, nous veillerons
à ce que cette révision se fasse dans un
cadre scientifique pur , puis une consultation nationale ouverte sur tous les
cadres responsables du pays » [22] , enfin le secrétaire
d’état a émis le vœu de produire «une
nouvelle loi »[23] qui remplacerait la loi de 1958.
Et sur la base de cette stratégie, plusieurs choix relatifs aux grandes questions
furent pris, parmi ces choix, on pourrait citer ceux-ci :
§ Le choix de
repenser la mission et la fonction de l’école en rapport des besoins du pays et de ses orientations
économiques « … notre désir de fonder un enseignement… sur des bases
solides liées intimement, non pas à la réalité figée et calcifiée du pays, mais
à sa réalité en évolution et à la nouvelle vie de la Tunisie d’aujourd’hui[24] »disait le
secrétaire d’état.
La révision de la fonction et de la mission de l’école vise à assurer le maximum
d’harmonie et de coordination entre le plan de développement éducatif et le
plan de développement économique et social « « l’école doit être ouverte sur
la vie sociale et sur le monde du travail ; chaque cycle de l’enseignement
doit permettre à l’élève de s’intégrer dans le système de production , l’école
doit répondre aux besoins immédiats et doit avoir assez de souplesse pour
pouvoir s’adapter facilement avec toutes les étapes du développement économique
du pays, le secteur de l’éducation ne peut pas rester isolé et ignorer le monde
de la production.[25] .
§ Le deuxième choix est de mettre en place
une nouvelle structure
de l’enseignement avec de nouveaux objectifs :[26]
Nous avons déjà signalé que la commission nationale de l’enseignement
avait recommandé la mise en place d’un tronc commun de trois ans et de remplacer
l’enseignement moyen par un enseignement professionnel d’une durée de quatre
années et de décaler l’orientation à la fin du tronc commun qui doit aboutir à
répartir les élèves sur cinq sections ou filières, tenant compte de ces
recommandations les commissions techniques ont conçu la nouvelle structure
suivante pour l’enseignement secondaire
A la fin de l’école
primaire, les élèves passent à l’enseignement secondaire par la voie du
concours d’entrée en première année de l’ES ; tous les admis feront un
tronc commun de trois ans, ce choix avait plusieurs objectifs à la fois : le
premier est de mettre fin aux problèmes psychologiques que connaissaient les
élèves qui étaient dirigés à l’enseignement professionnel dès la première année
à cause de leur âge , le deuxième est de
mettre fin à la dualité professionnel filière de l’échec / enseignement général filière de la réussite ; le troisième
objectif mettre en place « un enseignement homogène de neuf ans pour tous
les jeunes tunisiens, dans tout le cycle primaire et durant trois années du
cycle secondaire »
c’est
là une sorte « d’enseignement de base » avant le terme [27].
C’est peut être là la grande spécificité
de cette nouvelle structure qui a mis
fin aux différences entre l’enseignement moyen et le premier cycle de
l’enseignement secondaire long qui étaient basées sur le seul critère de l’âge
, qui empêchait un nombre d’élèves qui
« avaient dépassé la limite d’âge de 14 ans de poursuivre des
études longues même s’ils étaient aptes à le faire» désormais le seul critère
retenu serait la compétence et l’aptitude . » Sraieb
A la fin du tronc commun les élèves
seront orientés en fonction de leur aptitude, soit vers l’une des sections
de l’enseignement secondaire long, soit vers l’une des options de
l’enseignement professionnel sanctionné par un diplôme professionnel au terme
de la cinquième année.
Les élèves orientés vers l’enseignement
secondaire long sont répartis en première années sur cinq (5) sections ou
filières : sciences de l’éducation, sciences, lettres, agricole, technique
économique ou technique industrielle).
A la fin de la 1ère année la
section technique industrielle est
scindée en deux spécialités (génie civile et électromécanique).ainsi que la
section sciences en deux spécialités (sciences et spécialités paramédicales)
A la fin de la deuxième année, les
autres sections (exceptée la section sciences de l’éducation) se scindent en
deux ou trois spécialités pour
offrir aux élèves l’occasion de suivre la voie qui répond le mieux à leurs aptitudes
et à leurs désirs (voir tableau ci dessous)
Section (
1et 2ème)
|
Spécialité à partir de la 3ème
|
section
sciences
|
Sciences
|
Mathématiques
|
|
Sciences économiques
|
|
section
lettres
|
Lettres
|
Civilisation islamique
|
|
agricole
|
Sciences agricole
|
Techniques agricoles
|
|
technique
économique
|
T.E.administrative
|
T.E.gestion
|
Ainsi la deuxième orientation permet une sorte de
spécialisation au cours des deux dernières années, notons que les élèves qui
suivent les deux spécialités techniques industrielles ont la possibilité de
choisir entre un grand nombre de spécialités (une dizaine).
L’enseignement secondaire professionnel est un cycle
court d’une durée de
deux années après le tronc commun, il est sanctionné par un diplôme de
l’enseignement professionnel à la fin de la deuxième année ( 5ème ), l’enseignement professionnel compte huit
spécialités dans les secteurs du textile, de l’industrie mécanique, de
l’électricité[28] … les lauréats ont la possibilité de
poursuivre leurs études , une sixième
année et une septième année spéciales sont prévus pour ces élèves.
§ Le troisième
choix : revoir les programmes
les nouveaux programmes doivent être moins chargés, en rapport avec la
vie quotidienne, assurant l’équilibre entre les matières littéraires et les
matières scientifiques, et accordant une place importante aux travaux manuels
et à l’initiation technologique , cette orientation nous rappelle
étrangement les choix imposés par Charlety ; l’ancien directeur général de
l’enseignement public à l’époque du protectorat en 1909 pour l’école franco
arabe.
Les nouveaux programmes du tronc commun
ont cherché à traduire sur les principes
suivants : respecter l’équilibre entre les matières scientifiques et
littéraires, l’introduction de la technologie, « bannir les antagonismes
entre « classiques » et « modernes » entre
« littéraires et scientifiques ». [29]
§ Faire le choix
de la formation initiale et continue :
- Pour la formation initiale des
instituteurs :
Renforcer la capacité des écoles
normales des instituteurs et des institutrices par l’ouverture d’une école dans
chaque gouvernorat et le transfert des
sections normales vers ces écoles , quant à la formation des professeurs , la
seule mesure était l’ouverture des portes de l’école normale supérieure et
celles de l’école normale des professeurs adjoints aux lauréats des écoles normales des
instituteurs en remplaçant le concours écrit par un concours sur dossier depuis
1968.[30].
- La formation continue : considérant
que la formation continue est un besoin
urgent pour toutes les membres de la famille éducative, il a été décidé de mettre en place « un organisme qui se
chargerait de relever le niveau de tous les membres de la famille éducative et
non pas seulement la catégorie des moniteurs…plusieurs instituteurs ,professeurs,
directeurs, inspecteurs ont besoin d’un complément de formation, mais pour
chacune de ces catégories existent des spécialistes habilités à assurer ce
complément de formation »[31], ce complément de
formation « peut être soit une
formation initiale c'est-à-dire linguistique ou scientifique , soit dans la
plupart des cas une formation pédagogique »[32], ce plan devrait prendre plusieurs année selon le
secrétaire d’état , au cours desquelles l’organisme chargé de la formation devrait
s’intéresser aux aspects pédagogiques , car les méthodes en cours devraient
évoluer pour s’adapter aux objectifs des nouveaux programmes, « il nous
faudrait recycler les instituteurs pour qu’ils assimilent les nouvelles
méthodes et les nouveaux moyens d’enseignement et afin qu’ils améliorent leurs
aptitudes et leurs pratiques pour que notre école soit en harmonie avec la
Tunisie nouvelle »[33] ; mais à coté de ce plan à long terme ,le secrétariat doit avoir un plan d’urgence
destiné aux moniteurs afin de relever
leur niveau scientifique et pédagogique et les intégrer dans le cadre des
instituteurs « nous devons nous occupé de cette catégorie d’enseignants. »[34]
§ Accorder une
attention particulière aux méthodes d’enseignement
Ben Salah était très critique quant aux méthodes répétitives pratiquées à l’école tunisienne qui est sont inefficaces dangereuses , elles sont la cause des problèmes d’indiscipline, l’enseignant qui se limite a exposé sa leçon sans donner à
ses élèves l’occasion de discuter ou de
débattre »[35] « la méthode
d’enseignement ne devrait pas se limiter à apprendre à l’élève à s’adapter à
la réalité mais elle devrait lui
apprendre à surpasser cette réalité , donc la méthode d’enseignement devrait
être une force qui pousse l’enfant à atteindre les objectifs que nous nous
sommes fixés » il est nécessaire d’adopter des méthodes qui attisent la vivacité et le dynamisme de
l’élève dès sa première année à l’école , le ministre fait un parallélisme
entre l’usine et l’école , la première produit des objets inertes , l’école elle, produit des esprits ,
des sentiments et des volontés … notre école devrait produire des jeunes
extravertis , avisés et capables d’engager toutes les batailles de sa vie de citoyen , c’est dans cet esprit que s’inscrit
l’appel à changer les pratiques scolaires ( utilisation de la télévision scolaire , organiser des visites
aux entreprises avoisinantes ; création de clubs pour des activités
culturelles...
Bilan et conclusion
La période 1967 - 1969 fut pour
le secteur de l’éducation une période de doute mais aussi d’effervescence et de
réflexion, et une période avec un goût d’inachevé.
§ Le bilan quantitatif :
année scolaire
|
population scolaire
|
nombre d’établissements
|
effectif enseignants
|
|||
primaire
|
secondaire
et moyen
|
primaire
|
secondaire et moyen
|
primaire
|
secondaire
et moyen
|
|
1958-59
|
320363
|
32934
|
889
|
64
|
5358
|
1270
|
1968-69
|
844994
|
135947
|
2151
|
121
|
16194
|
5787
|
augmentation
|
524631
|
103013
|
1262
|
56
|
10836
|
4517
|
Source : Ministère de
l’éducation : activités du ministère de l’éducation nationale en 1983 et
ses perspectives, publication interne
Les différents indicateurs traduisent
les efforts consentis par l’état au cours de la première décennie de la
réforme, le taux de scolarisation est
proche de 75% en 1969 ( 27% en 1956), la
scolarisation des filles ayant progressée de 290 % , celle des garçons de
235%.( même source précédente) .
§ Une réforme de
la réforme inachevée
Les motivations de la réflexion et de
l’évaluation lancées en 1967 étaient nobles, les réformes qui s’en sont suivies
aspiraient vers :
- Relever le niveau de l’enseignement
primaire et poursuivre son extension ;( poursuivre les constructions et
l’équipement de nouvelles salles et de nouvelles écoles)
- Améliorer le système de formation et de
recrutement des enseignants et veiller à leur donner une bonne formation
académique et professionnelle ;
- Faire de l’enseignement secondaire un
enseignement efficace et utile, amarré aux différents secteurs économiques du
pays et capable de répondre aux besoins de l’économie en cadres moyens ;
Avec Ben Salah, la réforme prend une autre envergure,
la réforme se voulait radicale avec de nouvelles représentations quant aux
rapports entre la société, l’éducation et l’enseignement, et de nouvelles
conceptions quant à la fonction de l’enseignant, le rôle du directeur des
établissements scolaires.
Elle était aussi une réforme de fond en
ce sens qu’elle a :
- misé sur une formation éclairée des
enseignants qui leur permet de s’ouvrir sur le monde moderne et d’être
perméables aux innovations.
- Mis les fondements de la
décentralisation dans le secteur de l’enseignement.
Mais ce fut une œuvre inachevée, car
après le limogeage du professeur Ben Salah, alors que la réforme était en plein
chantier, ses successeurs ont gelé certaines mesures et avaient annulé d’autres
(retour à l’enseignement professionnel de trois ans sans passer par le tronc
commun, retour à l’arabisation totale des trois premières années du primaire,
arrêt de la décentralisation…), il semble même
que des directives ont été données pour ne pas appliquer les nouveaux
programmes de 1969.
Le système scolaire va entamer la
traversée du désert, une période d’hésitation aggravée par la succession de
plusieurs titulaires du portefeuille de l’éducation au cours de la décennie
quatre vingt (voir tableau ci-dessous)
Annexe : Les ministres de l’éducation de 1958 à
1988
Période
|
Le Ministre
|
N°
|
Période
|
Le Ministre
|
N°
|
mai 76/avril 80
|
Mohamed Mzali
|
8
|
mai 58 / juint 68
|
Mahmoud
Messadi
|
1
|
avril 80/mai 86
|
Frej chedly
|
9
|
juill 68 / nov 69
|
Ahmed
ben Salah
|
2
|
mai 86 / juil 86
|
Abdel aziz Ben Dhia
|
10
|
nov 69/déc 69
|
Ahmed Noureddine
|
3
|
juil 86 /mai 87
|
Amor chedly
|
11
|
déc 69/juin 70
|
Mohamed Mzali
|
4
|
mai 87/ Nov87
|
Mohamed Sayah
|
12
|
juin 70/oct 71
|
Chedly ayari
|
5
|
/ Avril 88
|
Tijani Chelly
|
13
|
oct 71/ mars 73
|
Mohamed Mzali
|
6
|
Avril 88/avril 89
|
Mde Hédi Khalil
|
14
|
mars 73/ mai 76
|
Driss Guiga
|
7
|
Hédi Bouhouch &
Mongi Akrout , Inspecteurs généraux de l’éducation
Tunis, octobre 2014
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[1] Une
réforme en 1972 -73 réduit la durée de
l’enseignement professionnel à trois années seulement,
(rapport 1982 -84)
[2] Au cours de la
cérémonie d’installation du nouveau secrétaire d’état, le premier ministre Bahi
Ladgham justifia le remaniement dans ces termes «dans la Tunisie nouvelle aucun effort ne
peut porter ses fruits s’il n’y a pas une coordination de tous les secteurs et interaction
de toutes les activités. Ainsi la nécessité s’est fait sentir de rapprocher l’enseignement
du plan et de l’économie nationale. En effet le premier département qui fournit
au pays les cadres nécessaires dans tous les domaines »
Sraieb, N. colonisation Décolonisation et
Enseignemen l'exemple tunisien. Paris: Centre national de la recherche
scietifique (Paris) Institut national des sciences de l'éducation de Tunis 1974.p 264
[3] Au cours des mois de juillet et août 1968
Ben Salah a organisé une série de
réunions pour consultation avec le conseil élargi de l’université le 15
juillet, puis avec les jeunes instituteurs le 21 juillet à l’occasion de leur
séminaire national tenu à Monastir, , la conférence élargie des enseignants le
22 juillet à la bourse du travail à Tunis, les directeurs régionaux de
l’enseignement le 14 août à Tunis ; au cours de ces rencontres le
secrétaire d’état avait exposé les grandes lignes de la réforme , ces discours
édités et publiés par le secrétariat d’état aux affaires culturelles et à l’information
sous le titre « Fi chououn
Attarbkya wa attaalim » est notre principale source , ce document nous a été
gracieusement offert par notre cher maitre Si Ahmed Zghal. Parmi les réunions les plus importantes fut la
réunion du 18 mars 1969 tenue au Lycée
du Bardo avec les commissions chargées de la révision des programmes.
[7] Par décret 238 - 1968 du 30 juillet 1968 quatre ( 4) directions
centrales ont été créées ,et par les décrets 245-249 du 30 juillet 1968 ont été nommés directeur d’administration
centrale .MM :
Tawfik Mazigh, Nacer
Chlioui ( enseignement secondaire) ,Ali Hili ( enseignement supérieur),Hafedh
Tarmiz et Chedly Fitouri( directeur le l’institut des sciences de l’éducation
[9] Les 13 directeurs
régionaux ont pris leur fonction le 27 juillet 1968 , il s’agit de Abdelaziz
ben hassan(Tunis), Mohamed Achour( Bizerte),Mohamed Boulabiar ( Kef), Mohamed
Zbouna ( Jendouba),Bouraoui jerdi (Kasserine) Hédi Mzabi( Sousse) Tawfik Ben
Arfa( Sfax) , Taher Mdhaffar( Gabès), Sadok gouider( Gafsa) Moncef Bouabid(
Medenine) Hsan al Mahjoub ( kairouan) Mohamed el Hédi Khalil ( Nabeul) Moncef
Ben Mahmoud ( Béja)
[17] Ben Salah espérait un retour au régime de 30 heures pour
toutes les classes « on aurait aimé, sur ce point, avoir la possibilité
d’aller au-delà des décisions de la commission nationale et généraliser le
régime de 30 heures pour tous les niveaux » Discours de ben Salah du 10 août 1968 , Fi chououn Attarbkya wa attaalim
, p 78. Opt cité
[18] Cette décision est
contraire aux recommandations de la commission nationale de maintenir
l’arabisation totale des deux premières années de l’école primaire.
[19] Ben Salah a évoqué la question dans le discours du 10
août 1968,faisant remarquer que la presse se met à publier les résultats durant
trois mois … pour des raisons commerciales … disant que selon lui on pourrait s’en
passer complètement , et qu’il n’y avait plus de raison de maintenir cet examen… » , Fi
chououn Attarbkya wa attaalim , p 87. Opt cité
[25] Lelong, M : Le patrimoine
musulman dans l’enseignement tunisien après l’indépendance, thèse d’état p 113
[26] Discours du 18 mars 1969 Sraieb Fi chououn Attarbkya wa attaalim , opt cit et
Sraieb, opt cité , p,281
[27] « Le premier
point évoqué par A.Ben Salah à la
réunion des commissions chargées des réformes des structures , horaires, et
programme tenue le 18 mars 1969 au lycée
du Bardo concerne l’unification de l’enseignement du second cycle qui
devra comporter pour tous les élèves un
tronc commun de trois ans « le tronc commun … doit permettre aux jeunes
de se familiariser avec l’enseignement technologique et de s’intéresser aux
programmes scientifiques quel que soit les débouchés qui leur seront
ouverts »
[30] Les
auteurs du blog furent parmi les premiers normaliens à profiter de cette mesure,
H.Bouhouch est venu de la section normale du Lycée Carthage présidence avec
… et M.Akrout lui est venu de l’Eni de
Sfax avec 4 autres élèves ( Mohamed Raouf Karray , Abdelwaheb Zaghdne, Ftouh Kharrat et ….)
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