Nous terminons avec la note de cette
semaine les réformes des années soixante- dix et le début des années quatre-vingt par un bilan général de la période étudiée , rappelons
que avons consacré la partie 1 ( pour y accéder cliquer ICI ) à la présentation du contexte général du
début des années soixante dix et aux
différentes mesures qui visaient la
réorganisation du ministère de l’éducation nationale au niveau central et régional , prélude aux
différentes réformes pédagogiques qui allaient être engagées au cours de cette
décennie, la deuxième note a été consacrée aux réformes qui avaient été
engagées à l’école primaire (cliquer ICI pour y accéder), la troisième note
aux réformes qui ont touché l’enseignement secondaire. (cliquer ICI pour y accéder)
III.
Le bilan des années soixante dix
Il faudrait distinguer entre la première moitié de la décennie et sa deuxième
moitié.
1.
La première moitié : une période de stagnation et même de recul de la
scolarisation
Les années soixante- dix furent pour l’école une période riche mais aussi
une période d’hésitation et d’inconstance ; rien d’étonnant,
puisque c’est une période de transition politique, marquée par l’abandon de la
politique « socialisante », et le retour du modèle économique libéral
avec ses principe de rentabilité, de productivité.
Cela n’a pas manqué de se répercuter sur les choix sur le plan éducatif :
la première moitié de la décennie (1970-76) a été pour la scolarisation une
période de stagnation et parfois même de recul qui s’est traduite par :
-
Une chute des
inscriptions en première année de l’EP, qui sont tombées à 22342 nouvelles
inscriptions au cours de l’année scolaire 1970 – 71, contre environ 55000 en
1969.[1]
-
La chute des effectifs
des élèves inscrits aux écoles primaires qui passent de 922861 au cours de
l’année scolaire 1970- 71, à seulement 865 776, au cours de l’année
scolaire 1973- 74 ; le même phénomène a été enregistré au niveau de l’enseignement
du second degré dont l’effectif est passé de 184127 à 178997 entre les années
scolaires 1971- 72 et 1974-75.
-
Une baisse du taux de scolarisation
de 5points entre 1972 et 1975, comme le montre le tableau suivant :
Tableau comparatif des taux de scolarisation
garçons
|
filles
|
total
|
|
1972 73
|
85%
|
54%
|
69%
|
1974 75
|
77%
|
51%
|
64%
|
Source : INS, rapport 1974 -
1975
Mongi Bousnina explique dans sa thèse [2] cette évolution par les
restrictions des crédits et « par la politique de stricte application de
la règlementation scolaire en matière de
redoublement, dont a résulté une extraordinaire montée du nombre des renvois
d’élèves ».
Pour Noureddine Sraieb[3], « c’est sans doute
là le résultat de l’application de la nouvelle politique de scolarisation,
fondée essentiellement sur la prise en considération des réalités, et sur la
rentabilité, comme le disait M. Bahi Ladgham, alors premier ministre. »
2. la deuxième
période : la reprise
Depuis 1976, (le retour Mohamed
Mzali à la tête du ministère de l’éducation nationale qui va y rester de mai 1976
au 25 avril 1980) ,commence à se
dessiner une reprise « au cours
des cinq dernières années ( 1976-
1981) ; les effectifs se sont
accrus de 31.4%, et une amélioration du taux de scolarisation … qui enregistre une
légère reprise … sans qu’on parvienne encore à rattraper le niveau de
scolarisation de 1971 »(Bousnina.)
Nous allons essayer de dresser le tableau de cette deuxième période en
s’appuyant sur les brochures officielles du ministère. [4]
Au cours de l’année scolaire 1976 -77, le système scolaire comptait 1151816
élèves ; l’année scolaire suivante ils sont devenus 1194312 élèves dont 84% au premier degré.
a.
Le premier degré ou
l’enseignement primaire :
§
la population scolaire des écoles primaires est passée de 895000 au cours de l’année scolaire 1969-70,
à environ 995000 au cours de l’année scolaire 78-79, soit une augmentation
d’environ 100000 élèves, en 9 ans ; le taux de scolarisation général étant de 68% ( 79.5 % pour les garçons
et 56.1 % pour les filles) ; les prévisions du plan quinquennal 1977-81
prévoyait 95% pour les garçons et 85 %
pour les filles, soit un taux de croissance plus fort chez les filles.[5]
Tableau 2 évolution du nombre d’élèves
pourcentage
|
les élèves en nombre
|
année scolaire
|
|||
fille
|
garçon
|
total
|
fille
|
garçon
|
76/77
|
39.3
|
60.7
|
957107
|
375831
|
581276
|
77/78
|
39.8
|
60.2
|
981255
|
389983
|
912725
|
78.79
|
§ L es
écoles : le
nombre d’écoles primaires est passée de 2180 au cours de l’année
scolaire 1969-70, à environ 2473 au cours de l’année scolaire 78-79, soit une
augmentation d’environ 293 en 9 ans , sans oublier les extensions qui ont
touché plusieurs écoles.
§ Les
instituteurs :
le cadre enseignant est passée de 10006 instituteurs et
institutrices au cours de l’année
scolaire 1969-70, à environ 25342 au cours de l’année scolaire 78-79, soit une
augmentation de 15336 enseignants en 9
ans ; le pays a réussi à assurer son autosuffisance, et a même pu envoyer
certains instituteurs en coopération ; le
nombre de femmes enseignantes n’a cessé d’augmenter ; elles
représentaient 26.4 % au cours de
l’année scolaire 78-79.
Tableau 3 : évolution du cadre
enseignant à l’école primaire
année scolaire
|
instituteurs
|
institutrices
|
total
|
% des femmes
|
76/77
|
17979
|
6004
|
239832
|
25
|
77/78
|
18509
|
6362
|
42871
|
26
|
78.79
|
18663
|
6679
|
25342
|
26.4
|
b.
L’enseignement secondaire
§ La population scolaire qui suit
l’enseignement secondaire toutes filières confondues comptait 180091 élèves au
cours de l’année scolaire 1975-76 ; elle avait atteint, au cours de l’année scolaire 1977-78, soit une augmentation d’environ 30000 élèves[6].
Tableau 4 : évolution de nombre d’élèves de l’enseignement secondaire
total
|
2ème cycle secondaire général et
technique
|
tronc commun
|
professionnel
|
|||||
%
|
Nbre
|
%
|
Nbre
|
%
|
Nbre
|
%
|
Nbre
|
|
100
|
183091
|
37,88
|
69337
|
43,37
|
79402
|
18,75
|
34352
|
1975/76
|
100
|
194709
|
35,51
|
69122
|
43,60
|
84899
|
20,89
|
40688
|
1976/77
|
100
|
213057
|
34,44
|
71228
|
42,68
|
90942
|
23,88
|
50887
|
1977/78
|
Si on s’intéresse à la répartition des
élèves sur les différentes filières, nous remarquerons que l’enseignement
professionnel, qui a pris la place de l’enseignement moyen, représente un peu
plu du cinquième de l’ensemble, et que sa part est en progression ( + 5 points
en 3 ans) ; le tronc commun presque
43%, et le second cycle général et technique
presque 35 %. .
Quant à la distribution des élèves du
second cycle sur les différentes sections ou les différentes spécialités, on
constate que l’enseignement secondaire général concentre presque trois quarts de
l’effectif du deuxième cycle ( 72.2%), la part de l’enseignement technique n’est que
de 22.8% seulement, se répartissant
entre l’enseignement technique industriel ( 14.7 ), et l’enseignement technique économique ( 8.1), ce dernier enregistrait un net recul .
Tableau 5 : répartition des élèves
du second cycle au cours de l’année scolaire 1977 -78
section
ou filière
|
%
|
lettres
|
22,4
|
mathématiques sciences
|
46,8
|
mathématiques technique
|
7,7
|
sciences économique
|
0,3
|
technique industrielle
|
14,7
|
technique économique de gestion
|
4,4
|
Technique Economique Administrative
|
3,7
|
total
|
100
|
Remarque : le rapport de 1976/ 78 parle
de deux options secrétariat et comptabilité et non de technique économique de gestion et Technique
Economique Administrative
§ Les enseignants : le nombre d’enseignants a
dépassé les dix milles , et leur qualification s’est nettement améliorée ;
la proportion des professeur détenteur d’une maitrise ou d’une licence ( PES ) ou
du diplôme de l’école normale des
professeurs adjoints ( PES 1er cycle )
dépasse les 70% ( 7300 sut 10000) ; mais le pays continue
à faire appel à des coopérants étrangers qui représentaient 11.5% de l’effectif, au cours de l’année
scolaire 1977/78 ( voir le tableau ci-dessous) .
Tableau 6 : évolution des enseignants
du secondaire
1975/76
|
1976/77
|
1977/78
|
||||
Nbre
|
%
|
Nbre
|
%
|
Nbre
|
%
|
|
tunisiens
|
7225
|
83,23
|
8175
|
83,79
|
9011
|
85,5
|
étrangers
|
1456
|
16,77
|
1582
|
16,21
|
1166
|
11,5
|
total
|
8681
|
100
|
9757
|
100
|
10177
|
100
|
Conclusion
L’autorité scolaire s’est attelée au
cours de la deuxième décennie de la
réforme scolaire de 58 et toujours dans son cadre a :
-
Raffermir les liens entre les plans de développement
économique et social et le plan de développement éducatif.
-
Accorder une place particulière pour l’enseignement
secondaire technique industrielle et économique pour former les cadres moyens
qualifiés pour les différents secteurs productifs ;
-
Donner aux filières scientifiques et techniques une
bonne place
-
Consolider l’enseignement professionnel et
l’initiation aux travaux manuels
-
Améliorer la qualité de l’enseignement par
l’amélioration du niveau des enseignants des deux degrés
-
Développer davantage l’ancrage des programmes scolaire
à la civilisation et la culture arabo musulmane par l’arabisation de la plupart
des disciplines scolaires de l’enseignement primaire et des écoles normales des
instituteurs et l’arabisation des disciplines des sciences sociales au
secondaire.et par le renforcement de la place la littérature tunisienne dans
les programmes et les manuels scolaire
Telles étaient les principales réformes décidées au cours de la
deuxième décennie qui voulaient trouver des
solutions aux problèmes du système (redoublement massif, abandon,
inadéquation entre la formation et les
besoins réels du pays, déracinement culturel
…)
mais il semble que les résultats n’étaient
au niveau des attentes
, d’après le témoignage du Ministre
Mzali lui même qui le reconnait dans le rapport moral du congrès de la
résistance du parti destourien tenu le 19 juin 1986 dans les termes suivants : « en
ce qui concerne le système éducatif, le rendement interne est encore parmi les principaux problèmes, le nombre d’abandon
au niveau de l’école primaire est encore élevé malgré sa baisse au cours des
dernières années grâce à la création d’une 7ème et une 8ème
année et une certaine amélioration du rendement interne de l’école primaire ,
il est faudrait étendre l’expérience de la 7 et de la 8ème année et
de réviser les contenus de leurs
programmes » en outre Mzali reconnait que l’objectif qui vise à développer
l’enseignement technique et professionnel ne fut pas réalisé , disant à
ce propos : « au niveau de l’enseignement secondaire ,l’idée
était de réorganiser ce cycle afin de renforcer les sections techniques et
professionnelles et de repenser l’enseignement professionnel pour améliorer sa
capacité à s’adapter à la demande du marché de l’emploi »[7], il est à noter que Mohamed
Mzali , ancien ministre de l’éducation et Premier ministre et secrétaire
général du parti à l’époque n’évoque pas dans le rapport l’école de base qui
était prévue dans le plan quinquennal de développement ( 1982/86) et qui faisait l’objet des travaux
de commissions au ministère de l’éducation, Mzali lui préfère son projet de la
7 et de la 8ème et le
développement de l’enseignement professionnel qui n’a pas donné de bons
résultats et a montré ses limites , d’ailleurs les futures orientations vont rompre
avec ces choix contestés.
Hédi Bouhouch & Mongi Akrout ,
inspecteurs généraux de l’éducation ,
Tunis , octobre 2014.
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Bouhouch et Akrout . Rapport de la commission sur
l’enseignement secondaire[1] L’Action 18-9-1967, ; Blog pédagogique
Jerbi,A. La politique éducative ou quelle
politique éducative pour quelle réforme de l'éducation?
Boukhari . O. la gouvernance du système éducatif
tunisien
Bennour, A : Les
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Bouhouch et Akrout. Histoiredes réformes éducatives
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partie)
http://bouhouchakrout.blogspot.com/2016/01/lhistoire-des-reformes-scolaires-en_25.html
[1] N .Sraieb, Introduction à l’Afrique du nord
contemporaine, VI. Enseignement, décolonisation et développement au Maghreb, p. 131-153, I R E M A M
[2] Bousnina, M. (1991). Développement scolaire et
disparités régionales en Tunisie. Tunis: Publication de l'Université de
Tunis I. p 374
[4] Ministère de
l’éducation nationale - Les rapport sur le mouvement éducatif en Tunisie , 1974
- 76 et 1976 -78 , présentés au 37ème et 38ème sessions
de la conférence internationale de l’éducation
[5] Rapport sur le mouvement éducatif en Tunisie
(1976 -78) , opt cité , p 29 et 30
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