Feu Abdelmalak Sallami avec son sourire éternel |
Voilà
sept années déjà, que nous avions accompagné le corps de Si Abdelmalek Sallami
à sa dernière demeure dans le cimetière de sa ville natale Thibar , il
pleuvait beaucoup ce 12 septembre 2012 .
Abelamalek
Sallami fut l’un des piliers de l’inspection pédagogique de
Français et l’un des acteurs de la réforme de 2002 en compagnie
d’une équipe exceptionnelle qui comptait parmi ses membre feu Nejib
Ayed , Hédi Bouhouch, Omrane Boukhari …
Sallami
fut aussi l’un des pionniers du projet de l’approche par les compétences
(APC), il fut pendant plusieurs années le pilote du programme visant
l’introduction de cette approche dans l’enseignement scolaire, il y a assuré
des activités de conception, d’expérimentation, avant la
généralisation puis l’évaluation de tout le processus.
Sallami
était sur plusieurs fronts à la fois. Il a contribué activement à plusieurs
autres programmes éducatifs novateurs en particulier le Programme des
Ecoles d’Education Prioritaire (PEP).
On
lui doit aussi d’avoir conduit une réflexion portant, d’une part sur le
renouvellement des missions de l’inspecteur pédagogique dans un contexte
de réforme systémique, et d’autre part sur la vie scolaire. Ce travail de réflexion a abouti à la publication de
deux décrets parmi les plus consistants dans l’arsenal législatif induit par la
Réforme de 2002.
Abelamalek
Sallami a commencé sa carrière comme professeur de Français dans
les lycées, il deviendra inspecteur en 1982 après avoir passé avec succès le
concours, il termina sa carrière en tant qu’inspecteur général de
l’éducation.
En
outre il travailla au cabinet du ministre avant d’être nommé Directeur
général chargé de la coordination entre les directions régionales de
l’enseignement et de la formation (en 2005) , puis Directeur général du Centre
national de formation et d’ingénierie de la formation (CENAFIF) en 2007 ,
poste qu’il occupa jusqu’à la date de sa retraite en Juillet 2009.
Le blog pédagogique a voulu commémorer sa
mémoire publiant le texte d'une communication qu'il a donnée au cours des journées d'étude sur l'école de
demain tenues à Tunis les 4&5 mai
1998 intitulée: le programme de "compétences de base": Une nouvelle
approche de l'apprentissage et de l'évaluation
Qu’il
repose en paix.
Le
blog pédagogique septembre 2019.
******
Le programme de "compétences de base": Une nouvelle approche
de l'apprentissage et de l'évaluation
III.
la mise en œuvre du programme : état des lieux.
le programme "compétence de base " a vu le jour en
1994/1995[1], à la suite de deux
séminaires nationaux ( appelés PIPO) au cours desquels les principaux
responsables du ministère et un certain nombre d'inspecteurs du primaire et du
secondaire ont mis au point une
stratégie pour l'implantation de
l'évaluation formative dans le premier cycle de l'enseignement de base.
Au lieu de faire un descriptif linéaire des actions entreprises
depuis lors , je vais essayer, pour la cohérence de l'exposé, de dresser un
état des lieux des différentes composantes du programme : la recherche, la
formation , l'expérimentation, la base de données , la gestion et le suivi.
A.
La recherche et la production d'outils et de documents de
références
Des groupes de recherche ont été constitués en 1994/95 , une
année avant le démarrage de l'expérimentation .Ces groupes qui ont été encadrés
par le professeur J.M.De Ketele, ont procédé à :
·
L'élaboration
du cadre de référence théorique et méthodologique du programme.
·
L'analyse
approfondie des programmes officiels d'arabe, de mathématiques et de français
afin d'en extraire les objectifs et les contenus les plus importants au regard
des performances attendues dans chacune
de ces disciplines au terme du premier cycle de l'enseignement de base .
أ La traduction des
objectifs et des contenus identifiés en termes de compétences , c'est-à-dire en
capacités cognitives et/ou psychomotrices s'exerçant sur des contenus précis,
dans des situations déterminées, par exemple :manipuler les nombre de 1 à
100 dans une situation d'achat au marché (compétence en mathématiques à
maitriser avant la fin de la 2ème année ).
·
Le
classement des compétences retenues en deux catégories: les compétences
fondamentales ( compétences de base ou C.B.) sur lesquelles reposent les
apprentissages ultérieurs, et les compétences de perfectionnement qui sont
utiles mais dont l'acquisition ne revêt pas un caractère d'urgente nécessité.
·
La
hiérarchisation des compétences de base
à faire acquérir dans chaque degré du premier cycle ( rappel : un degré
équivaut à deux années d'étude), puis la définition pour chacun de ces ensembles
hiérarchisés de compétences , d'une macro compétence qui les intègre toutes.
Cette macro compétence appelée objectif terminal d'intégration (O.T.I.),
clôture chaque degré du premier cycle et constitue l'unique repère pour
l'évaluation finale des acquis des élèves.
·
la
validation des compétences de base(C.B) et des objectifs terminaux
d'intégration (O.T.I.) au moyen de tests spécifiques administrés dans plusieurs
classes.
·
La
production , en fin de parcours, d'un document de référence regroupant cet ensemble
d'outils.
Les documents produits par les groupes de recherche ont été
validés sur le terrain , puis améliorés. Actuellement les maîtres chargés de
l'expérimentation du programme C.B. disposent d'une variété de documents:
·
Des
documents de références relatifs aux trois disciplines fondamentales: l'arabe ,
les mathématiques et le français.
·
Un
guide du maître en arabe et en français.
·
des
modèles de test d'évaluation qui se rapportent à l'ensemble des objectifs
d'intégration , de la 1ère à la 6ème année de l'enseignement de base.
Nous nous apprêtons maintenant à élaborer des documents
complémentaires :
§ Des livres d'exercices à caractère intégratif en mathématiques, en arabe et en français;
§ Un document pédagogique sur les "savoir-être de base" qui permettra d'opérationnaliser
certaines valeurs et attitudes essentielles ( la tolérance, l'autonomie,
l'esprit critique etc.).
§ Des documents audio visuels qui seront utilisés comme
supports aux activités de formation.
B.
La formation,
La réussite du programme
C.B. est tributaire , dans une très large mesure de la formation des
différentes catégories d'éducateurs
chargés de sa mise en œuvre ( les instituteurs, les inspecteurs, les
assistants pédagogiques et les directeurs d'écoles). C'est pour cette raison
que , dès le départ, l'accent a été mis sur ce volet, et que des actions
d'envergure ( séminaires ,stages sessions de formation à l'école d'été ont été
réalisés)
Au fil des années, notre méthodologie dans ce domaine s'est
affinée. L'an
dernier, nous avons conçu et mis en œuvre une démarche en trois étapes:
Première étape :Elaboration
de référentiel des compétences requises chez chacune des
catégories d'éducateurs participant à la
conception et /ou à la mise en œuvre du programme : les chercheurs , les assistants
pédagogiques, les directeurs d'écoles et bien entendus ,les enseignants. Ces
référentiels ont été conçus collectivement , souvent par /ou avec la
participation des représentants des catégories concernées puis validés au cours
des sessions de formation.
Deuxième étape : mise au
point , sur la base des référentiels des compétences , de plans de formation
qui précisent , les objectifs, le nombre et la durée des modules de formation destinés aux différentes
catégories d'éducateurs cités ci-dessus.
Troisième étape: Conception
à partir des plans de formation , de
modules à l'usage des formateurs , ces modules se présentent comme des cahiers
des charges précis , comportant un descriptif détaillé des activités à
réalisées au cours de chaque session ou journée de formation auquel sont joint
les documents de travail et de référence dont le formateur est appelé à se
servir.
Tous les modules programmés ( une vingtaine) ont été validés au
cours des séminaires de formation organisé cette année . Grace à l'appui de
l'Unicef, nous avons commencé à éditer ces documents sous une forme à la fois
pratique et attrayante.
En complément à ces actions, nous avons entrepris de former , à
laide des experts du BIEF , des formateurs de formateurs . 80 inspecteurs et
assistants pédagogiques , répartis sur toutes les régions, ont bénéficié de
cette formation , et sont aujourd'hui, à même de former , d'une manière
adéquate, les instituteurs chargés de l'expérimentation du programme.
L'expérimentation du programme C.B dans les classes
L'expérimentation a démarré
en 1995/96 dans 65 écoles situées dans 8 gouvernorats différents. Actuellement
275 écoles réparties sur les 23 directions régionales de l'enseignement, sont
concernées par l'expérimentation. L'année prochaine , le nombre des écoles
expérimentales avoisinera les 500 , c'est-à-dire l'équivalent de 10% du nombre
total des écoles primaires.
L'expérimentation est axée sur les quatre volets principaux du
programme:
§
La
planification des apprentissages selon le modèle intégratif ( qui implique l'intégration des savoirs et
des savoir-être à faire acquérir, et non la simple, juxtaposition de contenus
d'enseignement);
§
La
pratique d'une pédagogie d'intégration centrée sur la maîtrise des compétences
de base et des objectifs terminaux d'intégration;
§
Le
recours fréquent à l'évaluation formative, à caractère diagnostique;
§
L'organisation
régulière d'activités de remédiation.
S'il est encore prématuré de tirer des conclusions définitives
concernant l'impact du programme dans les classes expérimentales , l'on peut cependant
affirmer que l'apprentissage et l'évaluation fondée sur les compétences de base
ont considérablement modifié - dans le sens positif du terme- le rapport des
maîtres et des élèves au savoir.
C.
La base de données
Conçue comme un tableau de bord comportant différents
indicateurs permettant de mesurer les progrès accomplis par les chiffres,
celle-ci a été mise en place au cours de la première année d'expérimentation,
(1995/96) . on y a emmagasiné , depuis cette date, diverses données
- régulièrement actualisées- concernant un échantillon de 50 écoles réparties sur l'ensemble de DRE et incluant
chacune un échantillon de 9 élèves
choisi dans la même classe.
Parallèlement , une base de données spécifiquement pédagogique ,
a été implanté à l'institut national des
sciences de l'éducation (INSE) . La fonction principale se cette seconde base
est la validation des tests de fin de trimestre administrés dans les classes
expérimentales.
Ces deux bases de données ne sont pas encore entièrement
opérationnelles. Nous comptons cependant réaliser , avec le concours d'experts
en la matière , les traitements nécessaires pour l'élaboration d'un premier
rapport qui sera soumis à M. le Ministre vers la fin du mois de juin 1998.
D.
La gestion du programme.
L'originalité du programme C.B. , à ce niveau, réside que la
responsabilité de sa mise en œuvre est partagée entre diverses parties: l'INSE
, la direction générale des écoles , la direction générale de la formation
continue, la direction de la prospective et la direction des programmes.
Pour assurer la coordination entre ces différents partenaires,
un comité de pilotage regroupant les responsables des directions concernées a
été mis en place en1995/96 . Ce comité
prend toutes les décisions concernant le programme C.B . La préparation et le
suivi de ces décisions sont assurés par le directeur de l'INSE , aidé en cela
par un coordinateur nommé par M. le Ministre.
Au niveau régional , des équipes formées d'inspecteurs et
d'assistants pédagogiques sont en train de se constituer progressivement. ces
équipes sont appelés à prendre en charge certaines composantes du programme (
formation des maîtres, suivi de l'expérimentation, élaboration d'outils
d'évaluation,,etc.) dans leurs régions respectives.
CONCLUSIONS
La mise en œuvre du programme "compétence de base" a
nécessité comme vous le voyez , la mise en place d'un dispositif complexe.
En fait , et contrairement à d'autres
projets antérieurs qui ont rapidement
périclité , les initiateurs du projet ont envisagé le problème sur tous les aspects : conceptuel,
méthodologique, pédagogique et organisationnel.
Les diverses composantes du programme se complètent les unes les
autres et convergent vers le même but :doter les élèves de compétences solides
et stables qui les habilitent à poursuivre leurs études sans difficulté, et
réduire, ce faisant les disparités en matière de résultats scolaires que nous
constatons actuellement.
Le bon fonctionnement du programme est lié au degré d'engagement
des diverses parties chargées de sa mise en œuvre. Les éducateurs impliqués
dans les activités de recherche et de formation, ainsi que les enseignants
chargés de l'expérimentation, se sont acquittés, jusqu'à présent , à titre
bénévole, des lourdes tâches qui leur ont été confiées . Je tiens à cette
occasion, à leur rendre
un vibrant hommage . Je voudrait également saisir cette opportunité pour
remercier les responsables de l'UNICEF pour leur adhésion sans faille et leur
soutien continu au programme.
Le programme C.B/ préconise une approche de l'apprentissage et
de l'évaluation qui tranche avec les modèles sommatifs traditionnels. Il s'agit
là d'une conception d'avenir, qui balise la voie de l'école de demain.
Cependant , il faut se garder d'être trop optimiste. Pour que les objectifs
du programme soient pleinement atteints,
certaines conditions doivent être réunis. La plus importante , c'est la
compétence professionnelles des enseignants et leur maîtrise de la matière
qu'ils enseignent.
En dépit
des perspectives prometteuses qu'il ouvre, le programme C.B. ne doit pas être
considéré comme une panacée (Produit qui était jadis réputé actif
contre un grand nombre de maladies (panacée d'Esculape ou thapsia, par
exemple). Remède prétendu universel contre tous les maux, capable de résoudre
tous les problèmes : Une panacée dans le domaine économique.) . La rénovation de notre école, la
mutation qualitative de notre enseignement , ne sont pas seulement tributaires de
l'existence de bons programmes, d'un bon matériel pédagogique et d'un bon
système d'évaluation . Elles dépendent également du bon niveau de qualification
des enseignants, de la qualité de la gestion des établissements , et d'autres
facteurs encore que nous sommes appelés à identifiés ensemble au cours de notre
réflexion sur l'école de Demain.
ABDELMALEK SALLAMI, coordinateur du programme "compétence
de base"
Le programme de "compétences de base": Une nouvelle
approche de l'apprentissage et de l'évaluation
Communication
présentée au cours des journées d'étude
sur l'école de demain tenues à Tunis les
4&5 mai 1998.
Publié par le ministère
de l'éducation tunisienne et la banque mondiale ( secteurs sociaux, moyen
orient et Afrique du nord). pp ,161 - 171.
[1] Les différents ministres qui ont accompagné les débuts de ce programme ,il s'agit de M.M Hatem Ben Othman,(novembre 1994-octobre 1997), Ridha
Firchiou (oct 97/fév99), Abderrahim Zouari,Ahmes (fév 99 , janv 2001) Yadh Ouiderni( jan 2001/août 2003).
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