dimanche 23 novembre 2025

Extraits du document le" Programme des programmes" extrait 2

 

Hédi Bouhouch

Dans le souci de préserver la mémoire de l’école tunisienne et de mettre en valeur les apports des acteurs de l’éducation à travers les différentes époques, la présente publication propose à ses lecteurs des extraits d’un document de référence émis en septembre 2002 par la Direction générale des programmes et de la formation continue, à l’époque du ministre Moncer Rouissi.

Il s’agit du document intitulé « Programme des programmes », conçu comme un cadre de référence pour accompagner la réforme éducative de 2002.

Ce document commence par établir un diagnostic de l’état de l’école tunisienne à cette période, en mettant en lumière les nouveaux enjeux auxquels elle devait faire face. Il consacre ensuite l’essentiel de son contenu à la présentation de l’approche par compétences — une approche pédagogique importée de l’étranger et adoptée par le ministère de l’Éducation — en détaillant les rôles que devaient y jouer les différents acteurs : l’enseignant, l’élève et les parents. Le texte décrit également les types de compétences visés et dresse le profil de l’élève à former selon cette nouvelle vision.

Toutefois, cette ambition est restée lettre morte, freinée par de nombreux obstacles. Près d’un quart de siècle plus tard, force est de constater que l’école tunisienne demeure dans une situation comparable à celle décrite dans le diagnostic du Programme des programmes.

 

 

Le rôle des différents intervenants dans l’implantation de l’approche par les compétences

 

Le rôle de l’enseignant dans l’oration éducative

 

La nouvelle orientation dans léducation et lenseignement exige la mise en place de situations dapprentissage et dévaluation qui visent tant les résultats que les marches nécessaires pour les atteindre.

Les différents apprentissages dans lesquels lélève est partie prenante réclament de lui un niveau élevé de conscience et dautonomie dans le processus de construction du savoir. D il découle que lactivité intellectuelle de lapprenant au cours de lapprentissage revêt une importance décisive pour parvenir à des acquis de qualité.

Lélève ne peut accéder à cette performance que si la conception du savoir est fondée, chez lenseignant, sur les notions de construction et de reconstruction, étant entendu que tout savoir se construit dans et par lexpérience. Apprendre, en effet, cest substituer une représentation à une autre, corriger les connaissances spontanément acquises par lélève par les savoirs validés par lécole.

Si telle est la conviction de lenseignant, il sera en mesure de prendre en considération les connaissances antérieures soit pour les confirmer, soit pour les reconstruire et les complexifier, soit, carrément, pour les détruire. Le plus important dans tout cela est que lenseignant ne considère pas son élève comme un ignorant dépourvu de toute connaissance, car lélève sait beaucoup de choses qui le qualifient à vivre avec les autres et à communiquer avec eux  tout en ignorant ce que lécole se propose de lui apprendre. Ce qu’il ignore et qu’il veut apprendre na de sens pour lui que sil entrevoit sa dimension pratique et le bénéfice qu’il peut en tirer pour résoudre les probmes qu’il rencontre dans sa vie.

Par conséquent, lapprentissage ne  peut se  réduire à  une accumulation dinformations. Il doit se concevoir comme une ouverture sur des pratiques pédagogiques qui visent à construire la connaissance avec le concours actif   de lapprenant, le rôle de lenseignant  se  limitant  à  orienter,  encourager,  motiver  et  accompagner  lélève.  Ces qualités de facilitateur ne simprovisent pas. Ce sont des compétences professionnelles qui supposent :

- La maîtrise du métier et de ses fondements théoriques et méthodologiques.

- Une  conception  de  lenseignement  non  pas  comme  une  technique  appliquée automatiquement par le biais dapproches pédagogiques et dorientations méthodologiques, mais comme un ensemble dinitiatives lenseignant engage sa responsabilité et prend, en toute liberté, les décisions qu’il juge pertinentes pour affronter des situations inédites  et introduire les différenciations pédagogiques les mieux à même de répondre aux besoins réels des apprenants.

- La possession d’une « identité » professionnelle que reflète une autonomie créatrice, une vision propre de lenseignement, des pratiques pédagogiques originales appropriées aux  différentes  situations  et  une  remise  à  jour  constante  de  sa  discipline  et  de  sa didactique en vue d’une plus grande efficacité dans son enseignement.

Un enseignant professionnel est celui qui sait apprécier une situation éducative et proposer les solutions qu’elle réclame. Il est aussi celui qui remet en question ses pratiques afin de les améliorer.

Le rôle de l’élève dans l’oration éducative

Lactivité cognitive exercée par les élèves ne tire pas son intérêt du soutien qu’on leur apporte pour les aider à assimiler les savoirs scolaires, mais plutôt de la construction de leurs expériences vécues et de la formation de leurs personnalités ainsi que des rapports qu’ils tissent avec autrui. Lécole, dans ce processus, nest qu’un ensemble de situations spécifiques temporaires qui  contribuent à  la  construction de  lexpérience générale de chacun des élèves.

Lélève  est  dans  un  processus  perpétuel  de  construction  du  monde  afin  de  sy intégrer.  Pour cela, sa relation au savoir ne peut être une relation scientifique, du genre la science pour la science, mais une relation dintérêt visant à prendre ce qui est utile à son adaptation au monde.

Adopter cette conception de la connaissance est de nature à résoudre plusieurs probmes pédagogiques et à dépasser des difficultés dapprentissage relatives au développement intellectuel et à la motivation, car il n’y aurait plus délève incapable dapprendre ou qui ne peut ussir.

Lélève construit son savoir en ladaptant à ses besoins et en s’y adaptant. Le savoir na de sens pour lui que dans la mesure il laide à résoudre des probmes de la vie ou à  réaliser un  projet.  Ainsi,  la  connaissance nest  rien  dautre  qu’une « construction », individuelle ou collective, ayant comme finalité le renforcement des capacités de lélève à résoudre des probmes. Avec un tel savoir, construit avec des ressources scolaires et non scolaires, lélève peut imaginer, innover et créer. De la sorte, le fossé entre ce que lapprenant   sait et ce qu’il ignore ou doit savoir se réduit. Sa vie à lécole devient un projet ouvert visant à construire une nouvelle connaissance sur la base de la connaissance spontanée.

Selon cette approche constructiviste de lapprentissage lélève est lacteur principal dans la construction de son savoir. Lenseignement cesse dêtre une simple transmission du savoir du maître à lélève pour devenir une marche impliquant totalement lapprenant et limitant le rôle de lenseignant à encourager, accompagner, diriger et motiver lélève et à créer les conditions propices à la construction des apprentissages et leur développement.

Le fondement de lapprentissage dans cette orientation éducative est lidée de projet, qu’il soit scolaire ou extra scolaire.

Cette approche attribue à lélève un rôle actif et une participation effective dans la construction du savoir, le développement des savoir-faire et la communication sociale au sein du groupe-classe. Elle offre aussi un cadre pluridisciplinaire facilitant lintégration de plusieurs activités qui élargissent lhorizon de lélève et enrichissent son expérience.

Lenseignant peut charger lélève de réaliser des travaux personnels susceptibles de renforcer ses acquis, de les transférer à la vie pratique quotidienne ou de contribuer au perfectionnement de ses méthodes de travail et au développement de son autonomie. Lon entend par travaux personnels non ceux qui servent à combler un retard ou remédier aux insuffisances mais des projets qui poussent lélève à exploiter ses connaissances scientifiques  et  son  savoir-faire  méthodologique  et  développe  son  aptitude  à  la recherche.

Le rôle des parents dans l’oration éducative

Les parents sont des partenaires de lécole de par leur relation privilégiée avec leurs enfants et de linfluence décisive qu’ils exercent sur eux. Ils sont les transmetteurs de la tradition et de la culture liées au milieu familial. Par leur apport affectif, culturel et moral, ils peuvent aider leurs enfants à réaliser leurs projets et suivre leur parcours scolaires dans un esprit de coopération et en cohérence avec lEcole.

Il nest pas demandé aux parents dagir en spécialistes de tel champs du savoir ou de tel autre mais dapporter à leurs enfants le soutien nécessaire en les accompagnant dans leurs travaux et en unissant les conditions favorables à leur travail.

Dans le nouveau système éducatif le parent nest pas un partenaire indépendant. Il est lié à lenseignant et à l’école par un contrat moral qui fait de lui un collaborateur actif prenant part à la marche de lopération éducative et ce en participant à la vie scolaire et en contribuant aux solutions des probmes qui se posent à lécole, étant entendu que le parent et lécole partagent le même souci : la ussite de lélève.

 

Fin de la deuxième partie, à suivre ; pour voir la 1er extrait CLIQUER ICI

 

Présentation et sélection de l’extrait par Mongi Akrout, inspecteur général de l’éducation

Tunis, mai 2025

Pour accéder à la version ARABE , cliquer ICI

 

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