dimanche 25 septembre 2016

La dernière rentrée scolaire avant la reforme de 1958 en chiffres



 « …Toutes ces réformes vont entrer en application dès le premier octobre 1958 , et en attendant cette date , les fonctionnaires du secrétariat d’état à l’éducation nationale s’attellent jours et nuits, malgré les fortes chaleurs , comme ils l’avaient déjà fait  depuis six  mois  pour accomplir ce travail et préparer les programmes sur lesquels repose l’avenir de cette nation… »
Extrait du discours du Président de la République  du 25 juillet 1957 à l’occasion de la clôture de l’année scolaire 1956/57

 A l’occasion de la rentrée scolaire 2016-2017, le blog pédagogique a voulu dresser un tableau comparatif avec celle de l’année scolaire 1957-1958, c'est-à-dire la rentrée qui correspond à la dernière rentrée avant la réforme de 1958, pour saisir le chemin parcouru depuis, à travers quelques indicateurs .

1)   Premièrement : Les indicateurs relatifs à la composition des élèves par genre et à la scolarisation à la rentrée 1957/58
En 1957 – 1958 la  population scolaire  en Tunisie  était encore peu nombreuse,  elle était essentiellement masculine, et les taux de scolarisation étaient  encore très modestes,.  En effet la population scolaire, au cours de l’année scolaire 1957- 1958, ne comptait que 301 mille 433 élèves, constituée en grande majorité de garçons (environ 70%). Voir le graphique suivant :

Composition des élèves par genre à la rentrée 1957-58




La situation en 2015-2016,
la population scolaire (secteur public) comptait presque deux millions d’élèves (1.984.641), c'est-à-dire  qu’elle fut multipliée par 6.58 fois par rapport à la population scolaire de 1957/58 , les filles représentent   (50.95%) , elles enregistrent ainsi une légère supériorité sur les garçons, il faudrait remarquer que c’est là une caractéristique qui est partagée par  plusieurs système éducatifs dans le monde .

Les statistiques de 1957 révèlent que  le taux de scolarisation était encore faible ; la moyenne se situait autour de 33%, mais on enregistrait de grands écarts à tous les niveaux :
a.     Un écart entre les garçons et les filles : si presque 40% des garçons avaient rejoint les bancs des écoles, un peu plus du cinquième des filles seulement avaient eu la chance d’aller à l’école.

Taux de scolarisation général et par genre en 1957-58



la situation en  2015-2016 :
Le taux de scolarisation pour la classe d’âge 6-11 est de 99.1% ( 99.5 chez les garçons et 99.2 chez les filles) ; pour la classe d’âge 6 -16 ans, il est aussi élevé, atteignant 94.3% ( 93.1 chez les garçons et 95.7 chez les filles).
Source : statistiques scolaire : l’éducation en chiffres http://www.education.gov.tn/article_education/statistiques/stat2015_2016/Livret_StatAR.pdf


b.    Un écart entre les gouvernorats qui montre déjà le clivage entre les régions côtières et les régions intérieures.

Taux de scolarisation par gouvernorat e 1957-58




c.      Un écart à l’intérieur du même gouvernorat

Gouvernorat
délégation
Taux de scolarisation
Médenine
Beni khadèch
7,8
Zarzis
48,5
Sousse
Souassi - Chorban
8,5
Mahdia
67,6
Gabès
El Hamma
11,1
El Mattouia
50


Deuxièmement : l’enseignement primaire public
a.    Les indicateurs généraux


1957- 1958
2015-2016
Nombre d’écoles
820
4.575
Nombre de classes
6.066
47.010
Nombre d’élèves
267.808
1.079.001
Nombre de maîtres
6.195
64.944



Commentaire :
A la rentrée 1957/58  les élèves qui fréquentaient l’enseignement primaire représentaient  l’écrasante majorité de  la population scolaire  soit 88.84 %  de l’ensemble, à la rentrée de l’année précédente ( 2016-2016) , ils ne sont plus que 54.36 %.
Entre les deux rentrées, les statistiques montrent que l’effectif  élève  du primaire s’est multiplié par 4, le nombre des écoles par 5.57, celui des classes par 8 et enfin celui des enseignants par 10.48 fois.


b.    Le corps enseignant en 1957- 1958


hommes
femmes
total
maîtres unilingues d’arabe
3.123
36
3.159
maîtres bilingues
1.112
113
1.225
maîtres unilingue de français
1.051
760
1.811
TOTAL
5.286
909
6.195

Composition des instituteurs par genre en 1957-58



Composition des instituteurs par langue  en 1957-58




COMMENTAIRE
Le tableau ci-dessus montre qu’au cours de l’année scolaire 1957/58 le pays faisait appel à 6195 enseignants pour l’enseignement primaire dont 85.32 % étaient des hommes  et seulement 14.67 % de femmes, l’ensemble se répartissaient selon la langue en trois catégories :  50.99% instituteurs et institutrices unilingues d’arabe,  19.77% unilingues de français et 29.33 % bilingues, si on combine le genre et la langue d’enseignement , nous constatons que 98.86 %   des hommes étaient unilingues d’arabe et que  80.60% des femmes étaient unilingues de français , enfin 58.03  %  des bilingues étaient des hommes.

Troisièmement : l’enseignement professionnel
L’enseignement professionnel ou l’enseignement industriel (des industries) est très ancien  en Tunisie, mais il est resté  très limité, on comptait  en 1958  dans tout le pays 52 établissements spécialisés dont 17 dans la ville de Tunis,  cet enseignement accueillait  les élèves qui ont achevé leurs études primaires, et durait 4 années, ce type d’enseignement sera remplacé par l’enseignement moyen créé par la réforme de 1958.

  

Année scolaire  2015/2016
47
Nbre  d’établissements (écoles professionnelles, centres de formation pour filles, centres de formation pour garçons)
285
Nbre de classes
7003
 3578
3425
Nbre  élèves
Garçons
Filles
558
319
239
Nbre enseignants en 1958
  Hommes
  Femmes


Quatrièmement : l’enseignement secondaire public : un enseignement à l’état embryonnaire

1)   Les lycées et les collèges (voir tableau ci-dessous)


1957- 1958
2015-2016
Nombre de lycées et de collèges
11
1.409
Nombre de classes
287
34.969
Nombre total d’élèves
8.552
893.348
Garçons : 410.575
Filles      : 482.824
                                    élèves garçons
              6774
                                   élèves filles
1778
Nombre d’enseignants
405 (174 tunisiens et 231 étrangers)
75.056

Composition des élèves de l'enseignement secondaire par genre en 1957-58


Commentaire
A la rentrée 1957/58 , la Tunisie comptait 33625 élèves  qui suivaient un enseignement post-primaire   ce qui représente 11.15% de la population scolaire, les élèves des collèges et des lycées (8.552)  ne représentent que 25.40 %  de la population scolaire post-primaire, ce qui confirme le caractère embryonnaire de cet enseignement ;  en comparaison avec la situation au cours de l’année scolaire 2015/2016 , on constate que le nombre de lycées et de collèges s’est multiplié par 128 fois ,  et que l’effectif élèves fut multiplié par 122 fois , celui des enseignants par 185 fois, d’autre part les données  relatives à l’année scolaire 1957/58  montrent que le pays faisaient appel à un grand nombre d’étrangers pour assurer les cours dans l’enseignement secondaire , les professeurs étrangers représentaient à cette époque 57.03 % du corps enseignant, aujourd’hui ce corps est entièrement tunisifié.

2)   Les cours complémentaires [1]
Au cours de l’année 57 – 58, on comptait 18 cours complémentaires comprenant 83 classes suivies par 2.105 élèves, dont 1 .720 garçons et seulement 385 jeunes filles.
3)   les collèges zitouniens
En 1957-58, on comptait 28 établissements collèges zitouniens, avec 303 classes et 8.196 élèves, dont 7.874 garçons, et seulement 322 filles. Il faut préciser, qu’à partir du 1er octobre 1958, cet enseignement va disparaitre suite à l’unification de l’enseignement décidée par la loi de l’enseignement de 1958.

4)   Les écoles normales
Le pays comptait, au cours de l’année scolaire 1957-58, trois écoles normales et trois sections normales dans les lycées et collèges ; en tout, il y avait 28 classes fréquentées par 873 élèves, dont 731 garçons et 142 jeunes filles.

5)   L’enseignement technique (2ème degré)
L’enseignement technique était assuré dans 5 établissements : deux écoles (l’école normale d’apprentissage et l’école technique des cadres féminins), et trois collèges techniques (Tunis, Sousse et Sfax) ;  l’enseignement technique comprenait 123 classes fréquentées par 3.660 élèves, dont 3.358 garçons et 302 jeunes filles.

En guise de conclusion
Les indicateurs  et les données statistiques que nous venons de présenter  se passent de tout commentaire quant au chemin parcouru par la Tunisie dans le domaine de l’éducation,  les réalisations dans ce domaine est une fierté pour le pays, à ce propos l’historien Hédi Timoumi écrivait dans son dernier ouvrage -  l’enseignement de l’ignorance à l’ère de la mondialisation et la réforme de l’éducation en Tunisie - :   «  … Dès son accession à l’indépendance , le président Habib Bourguiba a commencé par unifié l’enseignement , et décrété la gratuité et a entrepris sa modernisation et sa généralisation… l’école tunisienne ( la loi de 1958) a contribuer à asseoir la modernité et à laïciser beaucoup d’aspect de la vie du pays , elle a aussi consolider une identité nationale progressiste et modérée et a permis de former des cadres  qualifiés  pour le pays, enfin , l’école de 1958 a permis à un nombre important d’enfants issus de milieux sociaux populaires une ascension sociale , l’enseignement est devenu en Tunisie une lueur de lumière et une des fierté de la Tunisie,  l’UNESCO a reconnu  sa valeur » [2] p 15

Hédi Bouhouch& Mongi Akrout , Inspecteurs généraux de l’éducation retraités
Tunis , septembre 2016






[1] Les cours complémentaires  «  sont des classes d'enseignement primaire supérieur annexées à des écoles élémentaires et placées sous la même direction (Décret du 18 janvier 1887 » au début La durée du cours d'études dans les cours complémentaires est d'un an  ,puis elle est devenue 4 ans de la sixième à la troisième , il est ouvert aux élèves ayant obtenus le certificat d'études primaires élémentaires sanctionné par le Certificat d'études primaires supérieures
[2] الهادي التيمومي :«تعليم الجهل في عصر العولمة والإصلاح التربويّ بالبلاد ألتونسية دار النشر : محمد علي الحامي

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