dimanche 27 octobre 2024

 

Histoire de la création  de l’annexe  de la Zaytouna  pour les jeunes filles à Sfax


M.H.Sallami

Notre collègue et ami Mohamed Habib Sallami, l’inspecteur de l’enseignement secondaire, a pris l’habitude de publier dans sa page officielle des notes en hommage à des personnalités ayant vécu à Sfax et qui s’étaient illustrés d’une manière ou d’une autre dans l’un des domaines de la vie.


 Si Habib publiait aussi des notes sur des institutions qui ont joué un rôle important dans la vie culturelle de la ville de Sfax, parmi celles-ci la note qu’il a dédiée à l’annexe  de la Zaytouna  pour les jeunes filles que nous reprenons cette semaine au vu de sa valeur historique.

Nous tenons à remercier Si Habib qui n’a pas hésité à nous accorder son autorisation pour la publication de la dite note.

En outre nous avons ajouté à la note le témoignage qui nous été fourni  gracieusement par notre chère amie et collègue Mme Asma Baklouti, qui parle des anciennes élèves de cette institution dont sa sœur Naima, qui  avait rejoint  avec d’autres jeunes filles l’école normale des institutrices de Tunis  à la deuxième moitié des années cinquante pour en sortir avec le diplôme qui leur a permis de devenir des institutrices dans les écoles de Sfax.

 


Au fil des siècles, l'enseignement  Zaytounien à Sfax était exclusivement réservé aux garçons. En 1954, Cheikh Ahmed Fourati, le directeur de l’annexe de la Zaytouna de Sfax, a eu l’idée d’ouvrir  une annexe pour les jeunes filles. Pour cela, il a écrit au cheikh de la Grande Mosquée et de ses annexes, l'Imam Mohamed Taher Ben Achour, pour obtenir son accord, qui a approuvé le projet.

 

Cheikh Fourati a préparé le local, c’était  une maison et il a pensé aux salaires des enseignants et au budget de l’annexe, pour cela Il fit appel aux bienfaiteurs de la ville, qui  ont accepté de faire des dons pour couvrir  les dépenses de l’établissement.

 Ce fut une  solution provisoire pour la première année, par la suite le Cheikh Fourati a décidé demander aux responsables de Tunis d'allouer un budget à l’annexe  de jeunes filles de Sfax dans le cadre du budget de l’enseignement  Zaytounien. Il a soumis la demande à Mohamed Taher Ben Achour  qui l'a approuvée, mais le secrétaire général du gouvernement tunisien, qui était  un français, avait rejeté la demande. 

 Quelle est la solution pour que la jeune fille musulmane de Sfax ne soit pas privée de l’enseignement Zaytounien?

Cheikh Ben Achour décida alors de rendre visite au secrétaire général français, accompagné de Cheikh Fourati et d’un interprète. Il faut savoir qu’à cette époque le secrétaire général décide de tout dans le pays. La discussion s’engage entre la délégation et le secrétaire général, Cheikh Ben Achour lui demanda les raisons du refus d’allouer un budget à l’annexe de jeunes filles de Sfax,  celui-ci  répondit :  « que la loi sur l’enseignement Zaytounien stipule qu'il s'agit d'un enseignement réservé aux AWLED »  et  Cheikh Ben Achour  lui rétorqua  que: « Nous ouvrons bien  à Sfax une annexe pour donner un enseignement aux AWLED» mais  : « Vous l'ouvrez pour les filles » lui répondit le secrétaire  général, alors Cheikh Ben Achour lui  expliqua : « que le terme AWLED  dans notre langue arabe et dans le Saint Coran, fait référence aux garçons et aux filles ». On rapporta  que le secrétaire général fut étonné par la réponse et donna cette fois son accord.

 L’annexe a permis de former les jeunes filles de Sfax dont certaines sont devenues des enseignantes et des fonctionnaires. A l’indépendance, l’annexe  a été fermée le jour où il a été décidé de supprimer l’enseignement Zaytounien. Ce fut  la fin de l'histoire.

 

Mohamed Habib Sallami, inspecteur de l’enseignement secondaire

Sfax , Août 2024.

Traduction Mongi Akrout, inspecteur général de l’éducation

Pour  accéder à la version arabe, cliquer ICI.

 

Témoignage de notre amie Asma Baklouti


Photo collective des élèves de l’école normale des institutrices de Tunis en 1959( Naima Baklouti est la 3ème à gauche dans le 1er rang)

 

« Ma sœur, Naima Baklouti, faisait partie des élèves de ce qu'on appelait dans les années cinquante Aljamaa, littéralement, la mosquée, et ce, au cours des années 55, 56. Cette institution a pris lieu à l’époque, en location, dans l’une des grandes demeures de la médina de Sfax, au voisinage de zaouiet sidi Ali Nouri.

Après un enseignement zitounien de deux ans, les filles du Jamaa furent déplacées vers le collège des filles actuellement le collège Habib Bourguiba situé à l’avenue du même nom, et dans lequel elles ont reçu un enseignement plutôt laïc ; il semble que cette opération a été effectuée sous le conseil de M. Ahmed Zghal, l’éminent directeur du lycée « hay zeitouni à l’époque et l’actuel lycée 15 novembre 1955. Après deux ans d’enseignement, en 1959, les meilleures anciennes élèves du jamaa ont été autorisées à rejoindre l'école normale  des institutrices à Tunis (Monfleury). Ma sœur a rejoint cette école avec un groupe d’amies de Sfax, parmi elles, il y avait de Faouzia Sellami qui habitait dans la médina près de zaouiyat Sidi Ali Ennouri, Naziha Zghal de la route de Téniour, Najet Dhouib dont le domicile est proche de hammam Es-Soltan en Médina, Monjia  Achiche, la sœur de feu Abdel Aziz Achiche, Dalenda kammoun,  et mesdemoiselles Mnif et Mzid. Toutes ces jeunes filles, pour rejoindre la capitale prenaient à chaque fois des voitures  de louage communes, tôt le matin et dont les chauffeurs sillonnaient les jnens et les quartiers de la ville pour effectuer leur ramassage.

Toutes ces jeunes filles, ayant obtenu leurs diplômes, ont enseigné dans les écoles primaires de Sfax. Ma sœur avait enseigné la langue arabe, que dieu lui accorde la santé et le bien-être, surtout après le décès de son mari, l’éducateur Abderrazek Karray, que Dieu le bénisse et lui accorde la paix.

 Asma Baklouti, universitaire, géographe des villes

Sfax- Septembre2024

 

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