A l’occasion de la rentrée scolaire 2024-2025, le blog pédagogique propose à ses lecteurs un document se rapportant à la rentrée scolaire 1912/1913 extrait d’un rapport présenté par M. Abdeljalil Zaouche, rapporteur du budget de l’enseignement devant les membres de la commission consultative[1] à l’occasion de la discussion du budget pour l'année 1913 de la direction de l’instruction publique le 14 novembre 1912. Le rapporteur a parlé de
l’importance de la question de l'instruction des musulmans pour les membres
tunisiens de la commission, il a évoqué la marginalisation des éléments
musulmans dont le taux de scolarisation est resté très faible par rapport
aux enfants des communautés européennes, et il demande plus d’écoles pour
accueillir plus d’enfants “ indigènes “ . |
Extraits du rapport
Séance du jeudi 14 novembre
1912
La séance est
ouverte à trois heures sous la présidence de M. Roy, en
présence de M. Charléty, Directeur général de l’Enseignement.
Tous les délégués sont présents.
Budget de l'enseignement
M. Zaouche, rapporteur du
budget de l’Enseignement, donne lecture du rapport suivant :
Messieurs,
Longtemps encore,
de tous les chapitres du budget, celui de
l’enseignement sera, pour la population indigène, de beaucoup le plus
intéressant.
Dans leur ensemble, sans nul doute,
les prévisions de dépenses au sujet desquelles nous sommes, chaque
année, appelés à donner notre avis, retiennent notre sérieuse
attention. Jamais, quand l’occasion se présente, nous ne nous faisons
faute de réclamer qui une route, qui un bureau de poste,
qui une ligne de chemin de fer, et parfois la lutte ne laisse pas d’être vive
entre nous pour faire prévaloir les intérêts de la région
que nous représentons plus spécialement. Mais le jour où nous
avons à examiner le budget de l’enseignement, l’accord est parfait
dans cette enceinte : tous, nous demandons des écoles et encore des écoles,
tous nous réclamons plus d’instruction pour la population indigène.
J'oserai même dire que nous ne nous en tenons pas là : nous posons
hardiment en principe que les indigènes sont prêts à tous les
sacrifices qui pourront leur être demandés pour le développement des œuvres
d’enseignement populaire.
Aussi bien la tâche du rapporteur du budget de
l’enseignement est-elle d’autant plus aisée qu’il n’a pas seulement l’adhésion
de tous ses collègues de la section indigène, qu’il sait pouvoir compter sur la
bonne volonté, jamais mise en défaut, du fonctionnaire éminent qui
préside depuis quatre ans aux destinées de l’enseignement
dans la Régence. Et dût sa modestie en souffrir, nous tenons
à exprimer ici, une fois de
plus, à l’honorable M°. Charléty la gratitude profonde de
nos compatriotes pour tout ce qu’il a déjà fait en faveur
de l’instruction des indigènes.
Première partie :
Dépenses Ordinaires
Ce budget est en augmentation sensible par rapport aux précédents.
Il s’élève, en effet, en dépenses ordinaires, à la
somme totale de 3.813.002 fr. 20 contre
3.507.354 fr. 20 en 1912, soit une différence
en plus de 305.648 francs. Il y a là un fait dont nous ne saurions nous
étonner, encore moins nous plaindre, puisqu’il est avéré que le nombre des
enfants qui demandent à être admis dans les écoles va toujours croissant et
que, dans plus d’un établissement, on est encore obligé de refuser des élèves.
C’est ainsi qu’à la rentrée d’octobre 1912, les écoles primaires
de la Régence ont reçu :
Français ; |
5.600 |
Indigènes musulmans |
10.000 |
Indigènes israélites |
4.500 |
Etrangers |
9.000. |
Or, le chiffre des enfants musulmans qui fréquentent les écoles
primaires, bien qu’en progression continue depuis quelques années, n’est pas
seulement inférieur de beaucoup à celui des autres éléments ethniques, il est
encore bien inférieur à celui des enfants d’âge scolaire que renferme une
population d’au moins 1.500.000 âmes, en regard de laquelle nous trouvons,
d’une part, d’après le dernier recensement de la population européenne, 46.000
Français, 88.000 Italiens, 11.000 Maltais; de l’autre, d’après des évaluations
dignes de foi, environ 45.000 israélites.
ANNEXE N°1 - ENSEIGNEMENTS
SCOLAIRES DIVERS
I.
Nombre d'élèves indigènes à la
rentrée d'octobre 1912 : 10.000 environ, soit une
augmentation de 1.500 sur le 1er janvier dernier.
II. Classes
ouvertes du 1er octobre 1911 au 31 octobre 1912 : 87, dont 29
spécialement pour les Indigènes. Il faut compter, en outre, 23 classes où
l'enseignement de l’arabe est exclusivement donné.
III.
Enseignement professionnel.
Apprentissage scolaire. Nombre d'apprentis :
- 16 écoles qui reçoivent 345 apprentis, non compris l’école de
Metlaoui, qui compte une trentaine d’apprentis mineurs.
- 4 écoles primaires préparent tout spécialement les indigènes au
métier d’agriculteur : à Tunis, Kairouan, Sfax et Gabès.
En outre, un enseignement agricole est
donné dans toutes les écoles fréquentées par les Indigènes.
- Ksar-Helal : tissage.
- Metlaoui-mine : travaux de mines.
Adjim, Kellabine, Mahdia : pèche et navigation.
- Nabeul (Ecole de filles
musulmanes) : broderies et dentelles.
Kairouan, Sousse, Monastir, Mahdia, Gafsa, Tunis (Ecoles de filles musulmanes)
: tapis, broderies et dentelles.
Dans ces écoles l’enseignement est adapté aux besoins locaux.
IV. Nombre de maîtres d'arabe
nommés du 1er octobre 1911 au
1 er octobre 1912 : 23.
A noter que 5 de ces maîtres sont des mouderrès sortant d’Alaoui, où ils
ont été spécialement préparés en vue des fonctions qu’ils ont à remplir.
On peut certainement beaucoup attendre de ces maîtres pour le développement des
études arabes.»
Source - Procès-verbaux de la conférence
consultative 1912, 36ème session/Régence de Tunis.1912. p.p401et
suivantes
https://bibliotheque-numerique.diplomatie.gouv.fr/ark:/12148/bpt6k91057001.texteImage
Pour accéder à laversion Arabe, cliquer ICI
[1]
[1]
La conférence
consultative est née 1890 est une sorte d'assemblée « des représentants
de la colonie pour prendre leur avis au sujet de questions touchant à leurs
intérêts agricoles, industriels et commerciaux »[1].,
la C.C a tenu sa première session en janvier 1891; Le 2 février 1907 un décret beylical
donne à la C.C le droit d'examiner le budget de l'État et crée une section tunisienne composée
de 16 membres nommés à vie (15 musulmans
et un israélite), consacrant l'une des
revendications des Jeunes Tunisiens.
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