En cette saison de moissons scolaires, le
blog pédagogique a choisi de présenter à ses lecteurs un document qui remonte
au milieu du siècle dernier et plus précisément à l’année 1941 , le document
est en fait un décret beylical promulgué par Ahmed Pacha Bey relatif aux
fraudes aux examens et concours publics.
L’intérêt de ce document réside dans le fait qu’il
s’agit peut être du plus ancien texte
qui traite de la question de la fraude aux examens et aux concours, nous avons
déduit cela parce que le décret en question se réfère à la loi française de
1901, d’ailleurs le texte beylical reprend presque textuellement la loi
française (voir le texte de cette loi en annexe)
Le contenu du décret et de la loi
française
§ Le décret et la loi française qui
l’avait inspiré avaient considéré toute fraude comme un délit qui sera puni
d’une peine de prison et d’une amende, ces sanctions traduisent la rigueur et
la sévérité du législateur vis-à-vis des fraudeurs et leurs complices.
§ Les deux textes avaient énuméré les
différents délits de fraudes : la fuite
de sujet, communiquer les sujets aux candidats avant la déroulement de
l’examen, utiliser de faux documents comme les bulletins de naissances
falsifiés, passer l’examen à la place d’un autre.
§ Les deux textes avaient réuni les
concours de recrutement de la fonction
publique et les examens destinés à obtenir un diplôme étatique.
Louanges à Dieu /
Nous, Ahmed Pacha-Bey, possesseur du
royaume de Tunis, …
Vu la loi française du 22 décembre
1901
Et sur la base de la demande du
secrétaire général du gouvernement tunisien et sur la proposition de notre
Premier Ministre,
Avons pris le décret suivant :
Article
premier :
Toute fraude commise dans les examens et les concours publics qui ont
pour objet l’entrée dans une administration publique française ou tunisienne ou l’acquisition
d’un diplôme délivré par l’Etat français ou tunisien constitue un délit.
Article 2- Quiconque se sera rendu coupable d’un délit
de cette nature, notamment en livrant à un tiers ou en communiquant
sciemment, avant l’examen ou le concours, à quelqu’une des parties
intéressées, le texte ou le sujet de l’épreuve, ou bien en faisant usage de
pièces fausses, telles, bulletins et
extraits de naissance ou autres, ou bien en substituant une tierce personne
au véritable candidat, sera condamné à un emprisonnement d’un mois à trois
ans et à une amende de 100frs à 10000 frs ou à l’une de ces peines
seulement, d’autres peines plus
lourdes peuvent être décidées en cas
de besoin et surtout pour usage de
faux.
Article 3 - Les mêmes peines seront prononcées contre les complices du
délit.
Article 4 - l’article 463 du code
pénal français et le texte 53 du code
pénal tunisienne sont applicables pour les délits cités dans notre décret .
Article 5 - L’action publique ne fait pas obstacle à l’action
disciplinaire dans tous les cas où la loi a prévu cette dernière.
Article 6 -le secrétaire général du
gouvernement tunisien est chargé de
l’application de notre décret.
Fait à Tunis le 26
Ramadhan 1360 , le 17 octobre
1941 .
Le journal officiel tunisien n°127 du
22 octobrz 1941.
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Ce décret représente un durcissement des sanctions encourues par les
fraudeurs et leurs complices , puisque un ancien texte qui remonte à 1887[1] (Décret 18 janvier
1887 ayant pour objet l’exécution de la loi organique de l’enseignement
primaire) prévoyait des sanctions moins lourdes à l’encontre des fraudeurs aux
examens , celles-ci va de l'exclusion
provisoire à l’exclusion définitive ,
ces deux sanctions peuvent être assorties d’une « interdiction pour le candidat de
se présenter au même examen ou à tous les examens de l'enseignement primaire,
pendant une ou plusieurs sessions »
Décret 18 janvier 1887 ayant pour objet l’exécution de la loi
organique de l’enseignement primaire
Chapitre III : Des sessions d’examen et de la composition des
commissions
Art. 117. - Les
commissions d'examen pour le brevet élémentaire, pour le brevet supérieur et
pour le certificat d'aptitude pédagogique tiennent deux sessions ordinaires
par an.
Art. 121. - Toute communication entre les candidats pendant les
épreuves, toute fraude ou toute tentative de fraude, commise dans un
quelconque des examens ci-dessus spécifiés, entraîne l'exclusion du candidat.
L'exclusion provisoire sera prononcée par le président ou par
le membre de la commission qu'il aura délégué pour le remplacer dans la
surveillance des épreuves.
Il en sera référé à la
commission, qui prononcera, s'il y a lieu, l'exclusion définitive.
Les faits qui auront motivé l'exclusion d'un candidat feront
l'objet d'un rapport, adressé par le président de la commission à
l'inspecteur d'académie. L'inspecteur d'académie, après avoir dûment appelé
le candidat, et l'avoir entendu en ses moyens de défense, pourra le traduire
devant le conseil départemental. Le conseil pourra prononcer l'interdiction
pour le candidat de se présenter au même examen ou à tous les examens de
l'enseignement primaire, pendant une ou plusieurs sessions, sans que cette interdiction
puisse s'étendre à une période de plus de deux années. Si la fraude n'est
découverte qu'après la délivrance du titre, le ministre peut en prononcer le
retrait.
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Loi du 23 décembre 1901 réprimant les
fraudes dans les examens et concours publics.
Le
Sénat et la Chambre des députés ont adopté,
Le
Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
Art.
1. Toute fraude commise dans les examens et les concours publics qui ont pour
objet l’entrée dans une administration publique ou l’acquisition d’un diplôme
délivré par l’Etat constitue un délit.
Art.
2. Quiconque se sera rendu coupable d’un
délit de cette nature, notamment en livrant à un tiers ou en communiquant
sciemment, avant l’examen ou le concours, à quelqu’une des parties intéressées,
le texte ou le sujet de l’épreuve, ou bien en faisant usage de pièces fausses,
telles que diplômes, certificats, extraits de naissance ou autres, ou bien en
substituant une tierce personne au véritable candidat, sera condamné à un
emprisonnement de
un mois à trois ans et à une amende de 100 francs à 10 000 francs ou à l’une de
ces peines seulement.
Art.
3. Les mêmes peines seront prononcées
contre les complices du délit.
Art.
4. - L'article 463 du code pénal est applicable pour faits prévus par la
présente loi.
Art.
5 - L’action publique ne fait pas obstacle
à l’action disciplinaire dans tous les cas où la loi a prévu cette dernière.
Par
le Président de la République :
Emile
LOUBET.
Le
ministre de l’instruction publique et des beaux-arts,
Georges
LEYGUES.
http://sites.ensfea.fr/r2math/wp-content/uploads/sites/8/2010/07/Fraud-ex2.pdf
http://www.inrp.fr/edition-electronique/lodel/dictionnaire-ferdinand-buisson/document.php?id=2758
Hédi Bouhouch &
Mongi Akrout , Inspecteurs généraux retraités et Brahim Ben Atig , Professeur
Emérite.
Tunis, Avril 2017
[1] Décret 18 janvier 1887
ayant pour objet l’exécution de la loi organique de l’enseignement primaire (
art 117, 120 et 121)http://www.inrp.fr/edition-electronique/lodel/dictionnaire-ferdinand-buisson/document.php?id=2758
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