« Docteur Ali Zouari est né à Sakit Eddayer
(banlieue de Sfax). Il a fait ses études primaires et secondaires dans sa ville
natale, puis il a rejoint l'école normale supérieure de Tunis pour préparer la
licence d'histoire, après avoir été détourné par Chedly Klibi, de la
littérature arabe à l'histoire.
Une
fois diplômé de l'ENS, il a travaillé à Sfax comme professeur d'histoire, après
quoi il a rejoint l'équipe de Mohamed Masmoudi et de Chedly Klibi lors de la
création du musée régional des Arts et Traditions Populaires (Dar Jallouli). Il
a également travaillé à Radio Sfax à l'époque de Abdelaziz Achich, directeur de
Radio Sfax et président
du Comité Culturel, qui l'a choisi pour
diriger l'Association du Progrès Théâtral. Lors d'une représentation à laquelle
assistait le président Bourguiba au théâtre municipal de Sfax, il l'appela et
lui parla avec beaucoup de paternalisme et de tact, et l'invita à son palais
présidentiel, Kasr al-Hana' à Bishka (situé à Menzel Chaker). Lors de ses
promenades privées, le président demandait aux responsables régionaux d'amener
Ali Zouari avec eux.» Depuis cette date, Si Ali gardait ce beau souvenir sur la
personnalité exceptionnelle du président Bourguiba.
Son
travail à l'Institut national du patrimoine l'a amené à se rendre à plusieurs
reprises en France pour se spécialiser en histoire moderne, puis en Égypte à
plusieurs reprises, notamment au Caire et à Alexandrie, sur les traces de la
présence sfaxienne qui remonte au XVème siècle. Ali Zouari est le
premier sfaxien à connaître les documents tuniso-sfaxiens dans la capitale
fatimide.
Ainsi,
toute sa vie, si Ali a travaillé à Sfax, pénétrant dans ses monuments et ses
quartiers, ses ruelles étroites, ses «ghorfas» et ses caves. Il a gardé l'ABC
de la médina comme si c'était son premier et dernier amour. Sa relation avec
elle s'étend du cœur jusqu'aux profondeurs de la langue française et de la
langue arabe, dans lesquelles il écrit avec aisance.
Son
cœur, sa langue, son âme et son esprit sont dans la Médina
Je
suis toujours heureux de m'asseoir avec Dr Ali Zouari et de lui parler par
téléphone toutes les fois que cela était possible, et chaque fois que je sens
que les détails de la Médina coulent encore dans ses veines et que la nostalgie
l'attache à elle. Sfax n'est-elle pas la
ville qui est présente dans tous ses livres ? La quasi-totalité de ses livres
sont consacrés à Sfax, dans lesquels il immortalise sa relation privilégiée
avec elle et son élan de nostalgie pour elle. La ville, chargée du parfum de
l'histoire et marquée des empreintes de la civilisation, n'a jamais cessé de se
coller à ses doigts et à ses pensées. Chaque fois qu'il voulait écrire, la
ville monopolisait tous ses sentiments et lui faisait perdre l'envie de s'en
éloigner, car il ne voyageait que rarement. Je me souviens qu'il a accompagné
M. Ahmed Belasouad, le maire de Sfax, à sa demande, au Royaume d'Arabie
saoudite en 1981 où Il a donné une conférence à Médine sur "l'état de la
ville arabo-islamique de Sfax et de son expansion commerciale et
industrielle".
Le
souvenir de la médina n'a pas quitté Dr Ali Zaouri et continue à le hanter à ce
jour. Dr Zouari n’a jamais cessé d'exprimer son amour chronique pour elle. Aujourd'hui, y retourner l'inquiète et il
craint d'y entrer quand il la voit investie par des démons et des fantômes, et
même des voleurs et des gangs pendant plus d'une décennie. Selon Al-Jahiz dans
son livre "Al bayen wa attabyin", "Le meilleur discours est
celui dont le peu vous épargne les longues paroles et dont le sens est dans la
signification apparente de sa formulation."
Aujourd'hui, les blessures du Dr Ali Zaouri,
me semblent n'avoir pas de limites, surtout que l'ancienne ville (la Médina)
est tombée si bas et devient le théâtre d'une terrible dégradation. Il se sent
comme un grand exilé et porte sur son visage les stigmates de la tristesse et
de la fatigue. Sa physionomie illustre parfaitement ce vers du célèbre Nizar
Qabbani qui dit en s’adressant à sa bienaimée : Pardonne-moi si j'ai l'air
triste, le visage de l'amant est un visage triste."
La
réalité tragique de la ville historique de Sfax (et de la ville moderne, Bab
Bhar) pèse incontestablement sur son cœur - et sur les nôtres - comme des murs
de plomb. Son cœur est rendu malade par l'état de la ville. Ses chagrins sont
aussi longs que les épis de blé. N'est-il pas vrai que Sfax n'est plus Sfax, ni
ce qu'elle était... et nous ne sommes plus ses habitants ?
Sfax...un
amour qui a possédé Dr Ali Zouari toute sa vie !
Dr
Ali Zouari, il suffit de citer son nom, car c'est un historien unique et
créatif, auteur d'un message, qui ne ressemble qu'à lui-même. La ville et ses
habitants lui ont rendu son amour. Cependant, les institutions universitaires,
scientifiques, culturelles, les médias et les associations l'ont boudé, elles
n'étaient pas équitables vis-à-vis de cette personnalité. La place "Rahbet
Errmed" (la place des cendres) située au cœur de la Médina pourrait être
baptisée "la place Ali Zaouri, ainsi elle portera son nom de son vivant...
et l'un des amphis de l'université pourrait porter son nom pendant qu'il est
encore parmi nous - que Dieu le garde en bonne santé et dans bonheur, comme
disent les sages. La bibliothèque de Dar al-Jallouli pourrait porter son nom...
et on pourrait inscrire son nom en haut de l'une des deux portes de l'entrée
sud de la ville, comme ce fut le cas du nom de Sadok Jallouli sur la porte de
"Bab Al-Jebli. Ainsi il restera comme une lampe aux portes des murailles
de la Medina.
Qui
d'entre nous, aujourd'hui, ne regrette pas le paradis perdu, et qui d'entre
nous n'est pas submergé par une immense nostalgie d'une ville
inoubliable ; qui, parmi nous, n'est pas troublé par une inquiétude
envahissante devant les malheurs de Sfax et le tarissement de ses rêves
irréalisables ?
En
conclusion, combien j'ai souhaité que le Dr. Ali Zouari écrive sa biographie.
Mais puisque cela ne s'est pas produit, ce premier article pourrait-il être une
invitation à réfléchir sur ce que nous savons de lui ?
Ridha
Kallel, Historien, écrivain, journaliste.
Sfax
14/12/2022
https://www.histoiredesfax.com/2022149%84/
Traduction Mongi Akrout & Abdessalem Bouzid,
Inspecteurs généraux de l'éducation
POUR ACCEDER A LA VERSION ARABE, CLIQUER ICI
L'œuvre du Docteur Ali
Zouari
Zouari Ali - Les relations commerciales
entre Sfax et le Levant aux XVIIIe et XIXe siècles / [S.l.] : Institut national
d'archéologie et d'art , 1990.
Zouari Ali - Sfax au XVIIIème et XIXème
siècles : chronique d'une ville méditerranéenne / 1 édition / Tunis : Centre de
Publication Universitaire , 2016.
Zouari Ali. Deux documents d'archives relatifs au
commerce de Djerba et de Sfax avec l'Egypte au début du XIXe siècle.
In: Revue de l'Occident musulman et de la Méditerranée, n°39, 1985. Les
Ottomans en Méditterranée - Navigation, diplomatie, commerce. pp. 189-199.
La
dynamique économique à Sfax entre le passé et le présent : 1er colloque
international, 28-30 novembre 1991 / sous la direction de Ali Zouari, Riadh
Zghal, Faouzi Mahfoudh / Sfax : A.S.M.S., Association de Sauvegarde de la
Médina de Sfax , 1993.
Ali Zouari et Youssef Charfi Moojam Alkalimat w
Attakalid Alchaabia Bi Sfax (Lexique du vocabulaire et des traditions
populaires de Sfax)- Edition Mohamed Ali Hammi, 2017, 704 pages.
Merci pour la vulgarisation de l'oeuvre de cet éminent professeur sfaxien
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