Hédi Bouhouch |
Les 12, 13 et le 14
avril dernier a eu lieu à Tunis le XXIIIe Congrès de la Ligue française de
l'Enseignement, sous la présidence de M. Ferdinand BUISSON, Directeur
honoraire de l'Enseignement primaire au Ministère de l'Instruction publique
et député de Paris. Le cadre de ce bulletin ne nous permet pas de donner
un compte-rendu détaillé des séances de ce congrès qui ont d'ailleurs été
retracées fidèlement par les journaux locaux et par la presse de la
Métropole, ainsi que par diverses publications pédagogiques. Nous publions simplement, le discours prononcé à la
séance de clôture du Congrès par M. Machuel, Directeur de
1'Enseignement en Tunisie, que M. le Ministre de l'instruction publique avait
bien voulu charger de le représenter. |
Discours de M. Machuel
Mesdames, Messieurs,
En me désignant pour le représenter à votre
Congrès, M. le Ministre de l'instruction publique m'a fait un honneur dont je
suis fier, mais dont je sens tout le poids, Par une délicate attention dont je
lui suis profondément reconnaissant, il a voulu que le modeste pionnier qui,
depuis vingt ans, organise l’enseignement sur cette terre de Tunisie qui nous
est devenue si chère à tous, eût le plaisir et la joie de recevoir en
son nom les membres de la ligue de l'enseignement qui n'ont pas hésité à
traverser notre lac méditerranéen pour venir nous apporter leurs sympathies et
leurs encouragements et nous faire profiter de leur expérience et de leur
savoir... A tous, Mesdames et Messieurs, j'adresse le salut le plus cordial
Sans doute aussi, Monsieur le Ministre de l'instruction
publique a pensé que j'étais quelque peu qualifié pour remercier en son nom les
membres des comités tunisiens de la ligue de l'enseignement dont j'avais dû suivre
les travaux. J'ai été en effet, un témoin attentif des efforts vraiment
surhumains qu'ils ont faits pour assurer la réussite de ce congrès. Organiser
des assises de cette importance dans une grande ville de France est déjà un
problème difficile ; avoir mené à bien une semblable entreprise à
Tunis, dans un délai aussi court, en surmontant toutes les difficultés, en
écartant tous les obstacles, est un véritable tour de force.
Il fallait, pour y réussir, toute la foi ardente de M.
Communaux, président de la fédération tunisienne, « le Jean Macé de l'Afrique[3]
», comme l'a si bien dit M. Robelin ; tout le dévouement éclairé de M. Thomas
qui ignore la fatigue lorsqu'il s'agit de faire triompher une idée laïque,
toute l'activité de leurs vaillants collaborateurs. Ces serviteurs inébranlables
de la cause laïque doivent être satisfaits :
ils trouvent dans le succès de leur entreprise, succès
qui dépasse toutes les espérances, la légitime récompense due à leurs efforts,
Je les remercie du fond du cœur de tout ce qu'ils on fait et leur adresse
mes plus vives, mes plus affectueuses
félicitations,
Je me demande aussi, Monsieur le Président,
si M° le Ministre de l'instruction publique, en me faisant prendre la
parole dans cette dernière séance n'a pas entendu m'amener à vous rendre des
comptes ; car vous êtes bien un peu responsables de mes actes si je suis
responsable de ma gestion ; et, si les choses de l’enseignement n'ont pas suivi
l'orientation qu'il fallait ou le développement qu'on espérait, ne devons-nous
pas porter à deux le poids des responsabilités ?... Ce que je puis
vous assurer, c'est que ma constante préoccupation a été de servir la
cause qui vous est chère et que vous représentez ici aujourd'hui c'est que j'ai
toujours eu présents à la pensée les intérêts de la patrie française
et que le désir de justifier votre confiance n'a pas cessé de me servir de
guide...
Machuel présente une bilan flatteur de son œuvre à
la tête de la DIP, en rendant hommage à Jules Ferry , qu'il considère comme
le père de la politique de la France en Tunisie , une politique qui a fait
que "l'instituteur a suivi de
prés le soldat", Machuel estime qu'il a mené avec succès" une lutte
pacifique qu'il fallait engager contre l'ignorance et le fanatisme". |
Qu'était donc l'enseignement français en Tunisie il y
a plus de vingt ans, lorsque vous y êtes venu pour la première fois ? Rien, ou
presque rien. Vous avez voulu, avec le grand citoyen dont vous avez tous,
Mesdames et Messieurs, salué avec respect et enthousiasme la statue[4]
en débarquant sur cette terre qu'il a faite française, vous avez voulu, dis je,
que l'instituteur suivit de prés le soldat et vous avez choisi un fils
d'instituteur[5] pour
organiser la lutte pacifique qu'il fallait engager contre l'ignorance et le
fanatisme. La tâche était ardue, mais vous étiez là pour guider nos pas chancelants,
pour nous prémunir contre les défaillances, pour nous aider de votre puissant
appui.
A cette époque déjà lointaine, les destinées de la
Tunisie étaient entre les mains d'un administrateur émérite, d'un homme au
patriotisme ardent et éclairé, d'un ami de l'instruction, M. Paul Cambon[6], à qui
vous me permettrez d'adresser en passant un souvenir respectueux et ému. C'est
lui, ne l'oublions pas, qui a fondé le premier établissement laïque
d'enseignement public, notre collège Alaoui, pépinière de nos instituteurs,
dont la direction est confiée depuis bientôt douze ans à un
universitaire qui vous touche de près, Monsieur le Président, et qui remplit sa
mission avec un dévouement qui n'a d'égal que sa douce et pénétrante bonté...
Il sait de qui tenir.
Pour Machuel ce qui a été réalisé est remarquable
…"114 établissements primaires publics, 5 écoles primaires supérieures,
une école normale d'instituteurs, un lycée, une école secondaire de jeunes
filles avec une section normale, un collège musulman, une école
professionnelle, une école de musique, une chaire publique d'arabe Notre population scolaire, qui est au total de
18.000 élèves est, pour nos seules écoles publiques, de près de 15.000
garçons et filles. Nos professeurs, nos instituteurs et institutrices laïques dépassent le
chiffre de 300…" |
Depuis lors, et grâce aux efforts de nos Résidents Généraux[7]
qui ont tous attaché la plus grande importance au développement de
l'instruction dans ce pays, de nombreuses écoles publiques, toutes laïques,
ont été créées dans les différentes localités de la Tunisie, Nous
comptons aujourd'hui 114 établissements primaires publics, 5 écoles
primaires supérieures, une école normale d'instituteurs, un lycée, une école secondaire
de jeunes filles avec une section normale, un collège musulman, une école
professionnelle, une école de musique, une chaire publique d'arabe.
Nous avons fondé un peu partout des cantines
scolaires, des bibliothèques populaires, des cours de gymnastique, des cours de
langue arabe. Malheureusement, le nombre de nos établissements scolaires ne
répond pas à nos besoins.
Partout, on nous réclame l'ouverture d'écoles nouvelles, partout nos classes
regorgent d'enfants et nous sommes obligés d'en refuser. Cette situation serait
inquiétante pour l'avenir si nous n'avions pas à la Résidence française un
partisan convaincu de l'instruction, un ministre aux idées avancées et
généreuses, un démocrate de race qui sait que l'on ne peut diriger les hommes
et les conduire au progrès que par l'instruction. Monsieur Pichon[8]
nous donnera la possibilité, soyez-en sûrs, de faire honneur à la dette que la
France a contractée envers les populations de ce pays en y plantant son drapeau
; Monsieur Pichon nous donnera les moyens de créer de nouvelles écoles qui,
est-il nécessaire de l'ajouter? ne pourront être que laïques.
Notre population scolaire, qui est au total de 18.000
élèves est, pour nos seules écoles publiques, de près de 15.000 garçons et
filles. Nos professeurs,
nos instituteurs et institutrices laïques dépassent le chiffre de 300.
Machuel rend un vibrant hommage aux enseignants qui
exerçaient dans les établissements tunisiens , des personnes " dévoués
qui ne font pas seulement honneur à leur chef, mais à la France qui
nous les a donnés" malgré les conditions dans lesquelles ils
accomplissaient leur mission, Machuel les a qualifiés de" missionnaires
laïques de la Tunisie" et qui sont de loin supérieur des missionnaires de
l'église. |
Oh ! Laissez-moi vous la présenter cette élite
admirable, ces collaborateurs dévoués qui ne font pas seulement honneur à leur
chef, mais à la France qui nous les a donnés, à vous tous,
Mesdames et Messieurs, leurs collègues de la Métropole. Nul ne sait mieux que
moi le dévouement sans borne qu'ils apportent dans l'accomplissement de leur
tâche, dans quelque poste qu'on les envoie ; nul ne connaît mieux que moi, leur
savoir sérieux et discret, le courage qu'ils montrent dans des situations difficiles,
l'exemple salutaire et réconfortant qu'ils donnent à nos populations
tunisiennes par la dignité de leur vie faite souvent de sacrifices joints à une
modestie simple et communicative ; ils ont montré à ces populations
tunisiennes l'influence qu'acquièrent rapidement sur les parents et
sur les élèves des hommes qui mettent au service de l'enfance, avec un
désintéressement magnifique, leur temps, leurs connaissances, leur expérience
et parfois leur crédit.
Oh ! On nous parle souvent du dévouement, du désintéressement des
missionnaires. — Je veux bien y croire, parce que j'admire le beau et
le bon où qu'ils se trouvent lorsqu'ils sont sincères ; mais quels
missionnaires, je vous le demande, pourraient être comparés à nos missionnaires
laïques de la Tunisie qui ont accompli en quelques années une tâche admirable,
parce qu'ils ont, sans bruit, sans chauvinisme de mauvais aloi, sans éclat,
semé à profusion les idées françaises, c'est à dire des
idées de justice, de progrès et de solidarité, parce qu'ils ont fait aimer et
respecter notre France et notre République. Aussi, comme vous le disait
dimanche votre éminent Président, ils ont admirablement préparé le terrain sur
lequel vous vous mouvez aujourd'hui avec tant d'aisance... Mesdames et
Messieurs, vous pouvez serrer avec effusion les mains de vos collègues de la
Tunisie : ils sont dignes de votre sympathie.
En parcourant la liste des vœux soumis à votre examen,
on est frappé par leur nombre et leur importance et, en assistant à vos
séances, on constate avec une joie patriotique les idées et les sentiments
élevés qui inspirent les orateurs, et le souci constant qu'ils ont de faciliter
et d'étendre l'instruction de la jeunesse, de perfectionner sa culture morale
et de lui inspirer l'amour du bien et le respect de la personnalité humaine.
J'ai vu avec un légitime orgueil que nos
maîtres tunisiens avaient fourni un contingent respectable de questions
et de propositions.
Machuel n'est pas seulement un administrateur ,il
n'oublie pas son coté pédagogique , étant instituteur d'origine et un grand
spécialiste de l'enseignement des langues ,il critique l'état de
l'enseignement du français et appelle à une simplification de sa grammaire
surtout pour les élèves dont la langue maternelle n'était pas le français"
Combien nous serions heureux de voir disparaître de nos grammaires certaines
règles surannées et subtiles qui compliquent, sans bénéfice aucun pour la
raison, l'étude du français, et en ralentissent l'acquisition au détriment
d'autres connaissances."
|
Parmi les vœux qui ont été adoptés, il en est un dont
je souhaite la prompte réalisation : c'est celui qui a trait a la
réforme de l'orthographe. Plus que partout ailleurs, sans doute, nous
constatons ici les difficultés dont l'étude de notre langue est hérissée et la
peine qu'ont les étrangers à retenir notre orthographe souvent si fantaisiste,
et nos règles grammaticales, parfois si peu logiques.
Combien nous serions heureux de voir disparaître de
nos grammaires certaines règles surannées et subtiles qui compliquent, sans
bénéfice aucun pour la raison, l'étude du français, et en ralentissent
l'acquisition au détriment d'autres connaissances.
Si nous voulons que notre langue conserve la
suprématie qu'elle avait autrefois dans le monde, suprématie qui est peut-être
compromise, à l'heure actuelle, efforçons-nous d'en simplifier
l'orthographe et de débarrasser sa grammaire de règles dont la subtilité seule
a fait souvent la fortune.
Notre langue se déforme, hélas ! Rapidement, dans
nos colonies et à l'étranger; prenons des mesures pour arrêter le mal ; l’une
des plus urgentes est certainement la réforme de notre orthographe et la
simplification de notre grammaire, à la condition que cette réforme
ne porte, aucune atteinte au génie de notre langue.
Vous avez, aussi émis le vœu, Messieurs, que l'on donnât aux élèves de
l’enseignement secondaire les moyens de faire des travaux manuels utiles, et
qu'on les y encourageât.
Nous sommes entrés depuis longtemps dans vos vues,
Messieurs, et ceux d'entre vous qui logent au lycée Carnot de Tunis ont pu
remarquer une grande salle dans laquelle nous avons installé un outillage,
encore insuffisant, sans doute, mais qui peut permettre de donner aux élèves
les premières notions du travail manuel et, avec elles, le goût de l'outil et
le respect de celui qui le manie.
Rendre cet enseignement obligatoire me semble d'une
réalisation difficile tant que nous n'aurons pas pu convertir les parents â
l'utilité de cette innovation,
Ne pensez pas non plus, Mesdames, comme pourrait le laisser supposer l'un des voeux
présentés au Congrès, que nous ayons négligé la question de l'enseignement dit
« ménager ». Il tient au contraire, une place honorable dans nos
préoccupations, et il est donné, avec un certain développement, surtout à notre
école secondaire de jeunes filles.
J'en appelle au témoignage de celles d'entre vous,
Mesdames, qui sont installées dans cet établissement, et je commettrai une
indiscrétion en vous apprenant que nos élèves internes, voulant contribuer à
vous recevoir aussi bien que possible, ont tenu, avant de partir en vacances, à
vous préparer quelques douceurs, à vous distiller, notamment, un
nectar anti-fiévreux que vous avez, parait-il accueilli avec faveur.
Permettez-moi, à ce propos, une réflexion :
n'exagérons rien quand il s'agit d'instruction et d'éducation. Tout est dans
tout, c'est vrai, mais ne nous croyons pas obligés de tout enseigner à nos
élèves ; ne chargeons pas encore leurs programmes ; ils ont déjà tant de choses
à apprendre !
La tâche, Messieurs et Mesdames, est ici, pour nos
professeurs, et pour nos maîtres difficile. Vous n'êtes que depuis quelques
jours en Tunisie ; mais vous avez tous déjà senti qu'on n'est plus ici dans les
conditions ordinaires de la France, qu'il y a quelque chose de différent de ce
que vous êtes habitués avoir et à observer. Le climat, le milieu social et les
conditions économiques dans lesquelles nous vivons; les mœurs, les traditions,
les croyances, les superstitions de notre clientèle scolaire, sont tellement
variés, tellement tenaces, que le rôle de 1’éducateur est extrêmement délicat.
Il doit agir, sans doute, avec résolution et fermeté,
mais aussi avec quelle prudence et quel tact !
Vouloir appliquer intégralement les règlements et les
programmes de la Métropole serait une imprudence et une erreur ; je n'hésite
pas à vous le dire, avec toute la sincérité dont je suis capable. Vous
comprendrez aussi que nos instituteurs ont besoin, pour remplir à la
satisfaction générale leur rôle d'éducateurs, de tous les encouragements, de
tous les concours, de tous les appuis. Ceux de la Ligue de l'enseignement leur
seront particulièrement utiles ; votre action, Messieurs, arrive à son heure;
elle doit puissamment contribuer à développer et à assurer notre
influence morale dans ce pays.
Machuel termine son intervention par deux
recommandations , la première est un appel à l'association pour qu'elle
prenne des initiatives auprès des élèves tunisiens après leur sortie de
l'école afin d'éviter que " l'influence salutaire du maître français
ne s'efface petit à petit". il appelle à "Grouper nos
anciens élèves, développer leur instruction pratique, leur créer des intérêts
et des débouchés, afin de les maintenir dans l'atmosphère des idées
françaises, leur faire apprécier et aimer nos institutions républicaines inspirées
des idées les plus nobles à la fois et les plus humaines" |
Permettez-moi, à ce propos de vous signaler deux questions
qui doivent, à mon sens, fixer plus spécialement votre attention. Si
vous arriviez à les faire aboutir, vous contribueriez ainsi à la grandeur de la
France et à la diffusion de ses idées... Nous pouvons suivre assez
facilement nos élèves français à la fin de leurs études primaires; ils
constituent une minorité dans notre population scolaire (et ils
n'échappent pas à notre direction et à notre influence. Il n'en va pas de même des enfants étrangers ; sortis de
nos écoles, ils se dispersent, ils perdent tout contact avec leurs anciens
maîtres ou avec leurs camarades français ; le bénéfice de l'enseignement qu'ils
ont reçu est compromis et l'influence salutaire du maître français s'efface
petit à petit.
Il y a des œuvres post-scolaires à instituer
dont votre société doit prendre l'initiative, car elle y peut mieux réussir que
nous ne le ferions par voie administrative. Grouper nos anciens élèves,
développer leur instruction pratique, leur créer des intérêts et des débouchés,
afin de les maintenir dans l'atmosphère des idées françaises, leur faire
apprécier et aimer nos institutions républicaines inspirées des idées les plus
nobles à la fois et les plus humaines, n'est-ce pas une tâche digne de
votre activité intelligente et patriotique, et, en la poursuivant avec méthode,
avec continuité, ne répondrez.-vous pas aux vues de votre illustre patron ?
La deuxième recommandation dépasse le cadre scolaire
et touche toute la population locale , Machuel appelle à une politique qui
vise le relèvement économique et morale de cette population dont les
conditions de vie n'honore pas la France " Ne devons-nous pas faire
tous nos efforts pour éviter de laisser se créer chez elle un paupérisme qui
serait peut être humiliant pour notre dignité et périlleux pour notre
influence". |
La seconde question sur laquelle je n'hésite pas à
appeler votre attention est la suivante :Nous avons ici une population indigène
importante, qui s'accroît encore rapidement à l'ombre de notre
drapeau. Cette population vit dans l'ignorance et elle vit difficilement, parce
que les métiers qu'elle professait, les quelques industries qu'elle avait
encore avant notre arrivée ont été profondément atteints par les nouvelles
conditions économiques que notre présence dans ce pays a fatalement
introduites.
N'y a-t-il pas lieu de songer sérieusement à l'avenir
de cette population indigène? Ne devons-nous pas faire tous nos efforts pour
éviter de laisser se créer chez elle un paupérisme qui serait peut être
humiliant pour notre dignité et périlleux pour notre influence. Ces indigènes
faut-il les instruire ? Dans quel sens, dans quelles proportions leur
distribuerons-nous l'instruction ? Le problème est délicat : il mérite un
examen approfondi.
Les uns vous diront qu'il est dangereux d'instruire
les indigènes; d'autres qu'il est non moins dangereux de les laisser dans
l'ignorance. Ou est la vérité ?
Eh bien ! Messieurs, étudiez avec toute
l'attention qu'elle comporte cette grave question ; elle est digne, je vous
l'assure, de la sollicitude de votre grande et généreuse association.
Etudiez-la en bons citoyens qui cherchent l'intérêt bien compris de leur pays,
sans vous laisser entraîner par des théories, sans doute généreuses, mais parfois
inconsidérées ; mais aussi sans vous laisser arrêter par des partis-pris
irréfléchis ou des sentiments indignes d'une grande nation comme la France.
Si vous arrivez à réussir dans la solution
de ces deux questions, vous aurez fait une œuvre de paix qui répond bien aux
aspirations de votre société, et vous aurez rendu à la France le plus signalé
des services, en contribuant à la faire aimer davantage par ses enfants d'adoption
; et, certes, personne ne saurait trouver mauvais que nous désirions la voir
bien française de langue, bien française d'idées, cette terre où nous avons
déjà mis tant de notre activité, de notre génie, de notre fortune, de notre cœur,
et d'en faire le plus beau fleuron de notre patrimoine colonial.
C'est le souhait que fait en terminant le délégué du
Ministre de l'instruction publique.
Fin de l'allocution.
Source : Bulletin officiel de
l’enseignement public , N°37 - avril- mai 1903 - 17ème année - Imprimerie française- B.Borrel .Tunis
Présentation et commentaire. Hédi Bouhouch & Mongi Akrout , Inspecteurs généraux de l'éducation .
Tunis , novembre 2019
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[1] la ligue de l'enseignement : Le 15 novembre 1866, Jean Macé annonce
officiellement la naissance de la Ligue française de l’enseignement , elle se fixe alors comme objectif l'« instauration d'un service public de l'enseignement
soustrait à la tutelle e l'église catholique, laïque par son contenu comme par
ses maîtres, ouvert à tous et dont l'universalité serait garantie par son
caractère obligatoire et sa gratuité » https://fr.wikipedia.org/wiki/Ligue_de_l%27enseignement#Actualit%C3%A9_de_l'organisation
[2] Louis Machuel ,
arabophone ,premier directeur de l'instruction publique en
Tunisie de 1883 à 1908 est considéré comme le fondateur des
écoles franco arabes en Tunisie
[3] Jean
François Macé, né le 22 août 1815 à Paris et mort le 13 décembre 1894 à
Monthiers, est un pédagogue, enseignant, journaliste et homme politique
français. Issu d'un milieu ouvrier, franc-maçon, il est l'un des fondateurs de
la Ligue de l'enseignement. Wikipédia
[4] Machuel parle ici
de la statut de jules Ferry qui se trouvait dans l'avenue qui portait son nom (
aujourd'hui elle porte le nom du président Habib Bourguiba.
[5] Ce fils
d'instituteur est Machuel lui-même
[6] Paul Cambon fut le
premier ministre résident de France en Tunisie du 28 février 1882 au 28 octobre 1986, il contribua
à la création de la direction de
l'Instruction publique et des Beaux-arts
en 1883).
[7] Le résident général est
le représentant de la France en Tunisie et c'est le véritable détenteur du
pouvoir dans le pays , le Bey ne faisair que signer les lois et les décrets
préparer par le résident général
[8] Stephen
Pichon résident général de la
France en Tunisie entre 1901 et
1906
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