Des hommes qui ont servi
l’éducation dans notre pays
« Chaque époque a ses hommes, et
chaque domaine ses illustres figures. Dans notre pays, l’éducation a vu
s’illustrer des personnalités emblématiques, des noms qui ont consacré leur vie
à l’enseignement et à la formation des jeunes générations, à l’inspection
pédagogique ou à la gestion administrative. Cette dévotion a permis à la région
de Sfax de se distinguer par ses résultats, occupant la première place des
classements depuis plus d’un demi-siècle, notamment pour les résultats du
baccalauréat.
Parmi ces figures marquantes de
l’éducation, l’un des noms les plus illustres est celui de M. Mahmoud
Ben Jemaa, qui vient de nous quitter le Mardi 7 Janvier 2025, paix à
son âme .
Une carrière
exceptionnelle
M. Mahmoud est né en 1941 à de Sfax,
en Tunisie, où il a suivi ses études primaires dans les écoles coraniques
"En-Najah" et "En-Najma", situées dans la médina, où l’on
enseignait le français dès la première année en plus du Coran et de l’arabe.
Après ses études primaires, il a rejoint le lycée de garçons de Sfax
(aujourd’hui lycée Hédi Chaker) où il a obtenu, en 1962, le baccalauréat
français, section mathématiques.
Il s’est ensuite rendu en France pour
poursuivre ses études au département de philosophie de la Faculté des Lettres
et Sciences Humaines de Grenoble. Il y a décroché une licence en philosophie
(juin 1966) ainsi qu’un diplôme d’études supérieures (Décembre 1967) avec la
mention Très Bien. Plus tard, il a obtenu le diplôme de recherche approfondie
en 1989 à la Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis.
Après cette brillante formation
académique, M. Mahmoud Ben Jemaa a entamé une carrière en tant
que professeur de philosophie dans les lycées, les écoles normales des
instituteurs et à la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de Sfax. Il a
aussi exercé les fonctions de conseiller pédagogique puis d’inspecteur en
philosophie pendant plus d’un quart de siècle. Il a gravi tous les échelons
jusqu’au grade d’inspecteur général de l’éducation.
Il a laissé une empreinte indélébile
chez tous ceux qu’il a formés, tant sur le plan pédagogique qu’intellectuel.
J’ai eu le privilège de compter parmi ses élèves et de m’abreuver de sa rigueur
dans le travail, son souci constant de perfectionner la formation et de
moderniser les méthodes d’enseignement.
Un homme de culture et
d’engagement
Parallèlement à son rayonnement
culturel et à ses activités au sein de la société civile (à travers
l’Association des Études Philosophiques, la Ligue des Droits de l’Homme, etc.),
M. Ben Jemaa est également auteur, traducteur et poète. Il a écrit de nombreux
articles sur la philosophie et l’éducation, participé à la traduction du
"Dictionnaire critique du marxisme" de Georges Labica[1],
et traduit en arabe 12 ouvrages traitant de questions épistémologiques et
philosophiques diverses, publiés entre 2004 et 2019.
Il a également édité des
"Extraits de la Muqaddima d’Ibn Khaldoun" et des lettres d’Al-Kindi,
accompagnés de commentaires. De plus, il a publié trois recueils de poésie en langue
française, témoignant de sa sensibilité profonde, de son goût raffiné et de son
talent remarquable.
En 2014, il a reçu le prix de
mérite de la Fondation Guido Gozzano [2](au
nom du poète italien) pour son œuvre poétique et le Prix de la
traduction arabe au Salon International du Livre de Tunis en 2018 pour
sa traduction de l’ouvrage de Julia Kristeva [3]:
Histoires d’amour.
Un homme honoré et
respecté
M. Mahmoud Ben Jemaa, est père de
trois enfants. Il a servi l’éducation avec dévouement, sérieux et un souci
constant d’innovation. Il mérite les expressions les plus sincères de gratitude
et les hommages les plus éloquents.
Par cette présentation, nous
souhaitons honorer la mémoire cet homme,
reconnaître ses services inestimables et son rôle actif dans la formation de
cadres et d’hommes que nous célébrons aujourd’hui avec fierté. Cet espace reste
ouvert pour saluer l’homme et évoquer quelques souvenirs.
Abdellatif Hdhili, Professeur de philosophie
Sfax, Octobre 2024
Traduction Mongi Akrout
À la mémoire du regretté de la ville de Sfax et de
la patrie : Feu M. Mahmoud Ben Jemaa.
La nouvelle de ton décès nous a
profondément bouleversés. Une douleur vive a saisi nos cœurs, et une tristesse
immense a envahi nos âmes. Nos êtres ont tremblé de chagrin et de désespoir
face à la perte d’un professeur généreux et d’un ami précieux, qui a consacré
sa vie au service de l’éducation, de la citoyenneté et à la transmission des
valeurs humaines.
Je témoigne que nous t’avons
connu comme un professeur émérite, un penseur exceptionnel, et un inspecteur
talentueux et perspicace. Ton empreinte a marqué des générations de professeurs
à travers les différentes régions de la République. En tant que formateur,
guide et accompagnateur, tu as contribué avec passion et dévouement à
l’amélioration des programmes et des performances pédagogiques. Même après ta
retraite, ton engagement est resté intact, et jusqu’à la semaine dernière, tes
contributions enrichissaient encore cet espace par la profondeur de tes écrits.
Nous avons eu l’honneur de
partager avec toi des discussions enrichissantes, de porter ensemble les
préoccupations du système éducatif et de défendre la place de la philosophie et
de la pensée critique dans les programmes officiels.
Je témoigne, le cœur meurtri, que
tu étais un acteur engagé dans la scène culturelle, un porteur de
préoccupations civiques, un défenseur infatigable des droits humains dans leur
dimension individuelle et universelle et un poète dont les mots, empreints de
sensibilité et de profondeur.
Cher ami, tu étais pour nous une
pensée éclairée, une action bienveillante, et un discours d’une éloquence rare.
Nous avons reconnu en toi un militant passionné pour la justice et un défenseur
intrépide des libertés, œuvrant avec espoir pour un monde plus juste et plus
noble.
Tes articles, tes livres, tes
poèmes, tes traductions, tes conférences, les débats que tu as animés, les
colloques que tu as organisés, ainsi que les responsabilités associatives que
tu as assumées, témoignent de la richesse de ton héritage. Ta disparition est
une perte immense pour la région de Sfax et pour notre chère patrie.
C’est pourquoi nous te pleurons
aujourd’hui avec une douleur profonde, une amertume indicible et une tristesse
infinie. Nous te disons adieu, le cœur embrasé, les entrailles serrées, mais
avec une mémoire empreinte de respect pour une vie exemplaire. Nous nous
inclinons devant la volonté de Dieu.
"Le temps réunit et sépare,
Les hommes ne sont que des voyageurs et des êtres en partance."
Que Dieu t’accorde Sa
miséricorde, honore ta mémoire et perpétue ton souvenir. Paix à ton âme et
éternité à ta mémoire. Nous prions pour que Dieu nous accorde, ainsi qu’à ta
famille et à tes proches, patience et réconfort. Gloire à Celui qui est éternel
et qui a décrété la mort pour ses créatures.
Nous appartenons à Dieu et à Lui
nous retournons.
Abdellatif Hdhili, professeur de
philosophie
Sfax, Janvier 2025
Traduction Mongi Akrout
Pour accéder à la version Arabe Cliquer ICI
[1] Georges Labicaest né le 27 décembre 1930 à Toulon (Var), mort le 12 février 2009 à Suresnes (Hauts-de-Seine) ; professeur, enseignant-chercheur ; philosophe marxiste ; syndicaliste (SNES puis SNESup) ; membre du PCF (1955-1980).
[2]Guido Gozzano (né le 19 décembre 1883 à Turin, mort le 9 août 1916 dans la même ville) est un poète italien du début du XXe siècle., il fut le chef de file de la poésie dite « crépusculaire »
[3]Julia Kristeva, née le 24 juin 1941 à Sliven en Bulgarie, est une philologue, psychanalyste et femme de lettres française d'origine bulgare. Elle est professeure émérite de l'Université Paris Cité
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